On se rappelle que d’un commun accord, le gouvernement et le Fonds Monétaire International (FMI) avaient décidé de confier l’audit de l’achat de l’avion présidentiel et des contrats d’équipements de l’armée passés par le ministère de la Défense au Bureau du Vérificateur Général (BVG).
Les résultats de ces audits étaient, d’ailleurs, attendus pour mi-septembre et le représentant du FMI au Mali, Anton Op de Beke, avait laissé entendre qu’ils seront soumis à l’appréciation du conseil d’administration de son institution qui ferait savoir, en décembre prochain, si oui ou non elle reprendrait son appui financier à notre pays. Alors question: le gouvernement aurait-il dessaisi le BVG au profit du Contrôle Général des Services Publics (CGSP), isolément ou en accord avec le FMI? Une question opportune quand on sait que le projet de dissolution du BVG fait l’objet d’une attention soutenue chez le gouvernement malien.
Après avoir intégré le prix de l’avion présidentiel dans la loi des finances rectificatives, le gouvernement vient d’accéder à une autre exigence du FMI en procédant à l’adoption d’un décret fixant le régime des marchés des travaux, des fournitures et des services exclus du champ d’application du décret n°08-485/P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public. En effet, l’adoption d’un nouveau décret qui modifie et précise le champ d’application de l’article 8 controversé dudit code était une autre exigence du FMI qui avait motivé le gel de ses versements à notre pays depuis le mois de mai à cause des « dépenses hors budget » occasionnées par l’achat d’un avion présidentiel à 17 milliards FCFA) et un contrat d’équipement de 69 milliards FCFA passé par le ministère de la Défense à travers un intermédiaire privé, en l’occurrence Guo Star SARL.
Par rapport à ce dernier point, le représentant du FMI au Mali, Anton Op de Beke, avait souligné, dans une récente interview, qu’il y «avait un abus d’une provision dans le code des marchés publics au ministère de la Défense de faire des achats exigeant le secret défense». Mais, a-t-il ajouté, dans la pratique, cette provision a été utilisée pour toutes sortes d’achats qui incluent l’avion présidentiel et des fournitures qui ne sont pas du tout de nature militaire. Pour lui, cela est une mauvaise utilisation des ressources du pays. D’où l’exigence du FMI de voir limiter l’usage de cet article 8. Ce qui vient, en effet, d’être obtenu suite à l’adoption en conseil des ministres du vendredi dernier, d’un nouveau décret limitant l’usage abusif qui était fait de cet article, ajoutées à cela les surfacturations présumées dans la passation gré à gré de ces marchés de plus d’une centaine de milliards F CFA.
Dans un communiqué du gouvernement à l’issue de la relecture de l’article 8 du code des marchés publics, le nouveau » décret détermine le périmètre d’application du « secret en matière de défense « en dressant une liste de travaux, de fournitures ou de prestations dont l’acquisition peut justifier le recours à la procédure dérogatoire prévue à cet effet « . En outre, il « circonscrit la notion » d’intérêts essentiels » de l’Etat en la définissant et en précisant les conditions dans lesquelles cette disposition peut être utilisée…et définit les modes de passation en prévoyant l’appel d’offres restreinte et la négociation directe « .
Une banque indexée pour avoir fermé les yeux
Le projet de décret adopté désigne aussi les autorités ainsi que les seuils de conclusion et d’approbation des marchés passés sous le sceau « de secret en matière de défense » ou au titre de la sauvegarde des » intérêts essentiels de l’Etat « . Il prévoit enfin, selon le communiqué du gouvernement, » un audit de l’ensemble des marchés par le Contrôle Général des Services Publics (CGSP) et institue une obligation pour les ministres concernés d’établir, chaque année, un rapport sur l’état d’exécution desdits contrats à l’attention du président de la République et du Premier ministre « .
C’est dire que le contrat pour l’achat d’équipements militaires de 69 milliards FCFA passé par le ministère de la Défense avec la société Guo Star SARL et celui de 35 milliards FCFA passé avec CIM SARL seraient concernés par cet audit dont l’on attend que les conclusions soient portées à la connaissance du contribuable malien. En guise de transparence, si tel est en vérité l’objectif recherché. Dans la même affaire, une banque de la place est indexée pour avoir fermé les yeux sur des transferts douteux par rapport à des contrats passés par le ministère de la Défense.
En tout cas, l’opinion n’est pas dupe. Elle attend encore et avec beaucoup d’impatience les résultats de l’audit du Bureau du Vérificateur Général et de la Section des comptes de la Cour Suprême sur l’achat de l’avion présidentiel qui incriminerait, selon des sources concordantes, des hauts placés dans l’appareil d’Etat soupçonnés de surfacturation à hauteur de plusieurs milliards FCFA. Vivement alors que la vérité soit portée à la connaissance des citoyens.
Mamadou FOFANA
SOURCE: L’Indépendant