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Studios photos : À L’épreuve de L’évolution technologique

Nombre de ces haut-lieux de l’art de la photographie ont mis la clé sous la porte. Les rares studiosqui arrivent à survivre se réinventent en associant à la photographie d’autres activités comme le transfert d’argent, de sons et d’images. Certains font même de la réparation de téléphones portables

Constat empirique. Les studios photos qui avaient su jusque là franchir les âges sont-ils en train de mourir de leur belle mort ? Aujourd’hui, la question n’est pas d’établir un constat pathétique mais d’aider les studios photos à se réinventer pour survivre.

Les nostalgiques des années 60, 70 et 80, voire les années 90 dans une moindre mesure, gardent toujours à l’esprit l’engouement suscité par la photographie à travers les studios photos lors des bals dansants les week-ends(précisément les samedis soirs) et les nuits de fête. Les promoteurs de studios photos avaient pignon sur rue. Leurs activités prospéraient vraiment puisque hommes et femmes faisaient recours aux studios pour fixer la «belle époque» et certains souvenirs de jeunesse.

Malheureusement, les studios photos à l’ancienne qui n’ont pas pu coller à l’air du temps ont été victimes du progrès. Avec l’explosion des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), ils disparaissent, y compris ceux de célèbres photographes maliens commeSeydou Keita, Montagna Dembélé, Racine KeitaouFelix Diallo à Kita.

Mais certains studios arrivent à survivre. C’est le cas des studios photos de Malick Sidibé, Abderrahmane Sakaly. De nombreux photographes moins connus comme Daouda Coulibaly ou encore SadioDiakité à Médina-Coura parviennent à tirer leur épingle du jeu. Ces petites entreprises photographiques qui ont résisté à la bourrasque continuent de faire les photos et d’en tirer profit. à la photo, ces promoteurs ont ajouté d’autres activités lucratives.

Les NTIC ont offert la possibilité à toute personne disposant par exemple d’un Smartphone ou téléphone intelligent de réaliser des selfies ou de prendre d’autres poses puis de faire leur tirage en un temps record. Ce boom technologique a été un facteur déterminantdans la fermeture de plusieurs studios photos dans la capitale. Il a aussi impacté le comportement et le mode de vie de la population.

Bien avant l’arrivée des téléphones intelligents, nos compatriotes se rendaient chez les photographes dans les studios pour immortaliser des moments importants de leur vie comme le jour de l’anniversaire, le départ vers d’autres horizons, les fêtes nationales, les événements sociaux. Bref, c’était la belle époque de la photographie en noir et blanc. Au fil du temps, les choses ont évolué et les photographes ne sont plus maîtres de leur destin. La clientèle se faitrare.

Cette situation a instauré une morosité dans le marché. Ainsi, des promoteurs de studios photos se sont reconvertis imprimeurs pour ceux qui ont eu cette chance. D’autres se sont installés dans la réparation des téléphones portables, le transfert d’argent, celuid’image et de son ou officient dans les salons de coiffure.C’est le déclin des studios photos dans les grandes villes. à l’exception de quelques uns qui continuent de résister à l’explosion des NTIC avec toutes ses options pour rendre la photo magnifique.

CONCURRENCE DÉLOYALE– Les studios Malick Sidibé et Abderrahmane Sakaly ont encore un souffle de vie, même avec la disparition de leurs créateurs. Ils misent désormais sur les photos d’identité et la reproduction de vieux clichés ou de photos de familles qu’apportent certains conservateurs pour mieux les conserver.

«C’est la vision de notre défunt père que nous entretenons dans ce studio», commente Karim Sidibé, un des fils du célèbre photographe Malick Sidibé. Son studio qui existe depuis les années 1960 est l’un des rares à tirer son épingle du jeu à travers les portraits d’identité, les reportages et expositions photographiques.Depuis plus d’un demi siècle, le studio de l’enfant de Soloba (Cercle de Yanfolila) est un haut-lieu de la photo dans le quartier de Bagadadji.

L’entreprise de photographie conserve toujours sa splendeur et son visage d’un magasin de collectionneur des anciens appareils photographiques. C’est également le lieu de découvrir les Mamiya RZ (les anciens appareils photographiques qui avaient une grande renommée à l’échelle mondiale) et des vieilles chambres, explique le jeune photographe. « Même après la reconstruction de notre studio, il n’a jamais cessé de marcher et je suis convaincu que le studio Malick Sidibé demeurera.

Nous allons continuer de prospérer pour garder notre notoriété », assure Karim Sidibé.Quant à Yacouba Sangaré, propriétaire d’un studio photo au marché de Oulofobougou-Bolibana, il explique s’être installé en 1996. Lui reconnaît vivre des difficultés puisque son studio ne marche plus comme avant. C’est effectivement le déclin des studios avec l’avènement de la nouvelle génération d’appareils téléphoniques (ces portables ultra performants). «Dans un passé récent, j’utilisais plus de 20 pellicules de 32 poses lors de la Saint Sylvestre (Nouvel an) des fêtes de Ramadan et de la Tabaski. Aujourd’hui, le studio ne peut plus vivre de ses activités. Il faut y associer d’autres activités pour survivre.

Ce qui justifie le greffage d’autres activités à celles classiques du studio qui fête sa 25è année d’existence», révèle Yacouba Sangaré qui a eu l’idée de greffer à la photo d’autres activités comme les photocopies, la conception des badges et de cartes de mariage.«Nous sommes en train de tendre à devenir, aujourd’hui, un véritable laboratoire de tirage de photographies artistiques», annonce le photographe Sangaré fort de ses 40 ans d’expérience dans le métier. Le photographe de studio partage le constat de la disparition de certains studios photos mais prévient qu’il n’officiera que dans ce secteur. «Au regard de mon âge, je ne peux rien faire d’autre que la photo», conclut-il.

Quant à Boubacar Samaké, ancien propriétaire de studio photo, il soutient que les studios photos ne sont plus adaptés parce que le secteur est très mal organisé. Certains photographes qui évoluent dans le registre de la débrouillardise ou “Walo” font de la concurrence déloyale.

Ils cassent les prix des photos lors des événements pour s’attirer le maximum de clients. Notre interlocuteur qui n’entend pas continuer à souffrir de cela lance un cri de cœur pour une structuration du secteur. «On ne devient pas photographe avec un téléphone», ironise le jeune reporter-photographe.

Il est bon de préciser que les premiers studios photos ont ouvert leurs portes à Bamako vers 1940. Ainsi, l’invention de Niepce et Daguerre (les inventeurs de la photo) s’est installée dans la mémoire des Maliens depuis longtemps.à l’époque,la photo était réservée aux plus nantis et à la chefferie traditionnelle. C’est grâce à la photo que la jeune génération peut savoir à quoi ressemblait Titi Niaré, un patriarche emblématique de la famille fondatrice de la capitale.

Amadou SOW

Source: L’Essor

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