RFI: Bonjour SBM
SBM: Oui, bonjour…
RFI: le groupe État Islamique attribut l’attaque d’Inates à l’ISWA ( l’État islamique en Afrique de l’ouest ), est ce que c’est une revendication qui vous surprend?
SBM: Pas du tout quand on observe les actions qui se sont déroulées ces derniers temps. C’est que l’État islamique a accrus sa mobilité, son pouvoir et son accès aux ressources dans cette région parce qu’il contrôle quand- même pratiquement toutes les ressources prélevées sur les trafics de poissons, de charbon et d’autres produits comme les flux migratoires surtout dans la région du lac Tchad.
RFI: Est- ce que Inates fait partie des zones dans lesquelles l’État Islamique en Afrique de l’ouest est particulièrement bien implanté ?
SBM: Oui, oui, oui on a vu depuis le mois de Septembre une recrudescence des attaques dans la région de Tillabéri. Et on a vu que dans sa politique de purge de ces espaces qu’il essaye de contrôler, l’État Islamique s’en est pris non seulement aux forces gouvernementales mais même aux leaders sociaux comme les chefs religieux, les chefs de villages qui peuvent faire obstacles à sa propagande. Et le désengagement des forces qui relèvent du G5 dans cette zone, qui étaient dans une procédure de ré- articulation, ce désengagement là a créé aussi une sorte de vacum dont ils ont pu profiter.
RFI: Est- ce que selon vous l’État Islamique en Afrique de l’ouest a pût agir seul dans cette attaque d’Inates?
SBM: D’une manière générale, ce qu’on observe quand- même c’est que même quand les attaques sont revendiquées par tel ou tel groupe, ils se font en alliances entre les principales organisations. Parce que le Sahel pour le moment c’est le théâtre sur lequel ces organisations coopèrent. Parce qu’ils ne cherchent pas à contrôler le territoire, ils ont des cibles identiques…
RFI: ce genre d’alliance a pût opérer lors de l’attaque d’Inates ?
SBM: Quand vous regardez l’importance de l’attaque, la combinaison des armements et tout celà…cela dénote que il y a forcément une coalition. Je pense que aucun des groupes en particulier n’a les effectifs nécessaires pour opérer une attaque d’une telle envergure…
RFI: Au moins 71 morts dans l’attaque d’Inates au Niger, il y avait 49 morts à Indellilane coté Malien, le nombre de victimes se compte désormais par dizaines, comment est- ce que vous expliquez ce changement d’échelle dans les bilans des combats entre les groupes Djihadistes et les forces gouvernementales ?
SBM: Oui je crois que le changement d’échelle est dû en grande partie au fait que les groupes terroristes sont renforcés considérablement. Non seulement en termes de combattants, en termes de ressources, en termes d’encadrements. Ils reçoivent des renforts de combattants étrangers qui proviennent d’autres fronts en particulier…On voit bien que la tactique utilisée est semblable à celle qu’on a observé sur le front Irako- Syrien notamment. La deuxième chose c’est que, ils ont pu complètement s’intégrer dans l’économie de la région, dans cet espace- là, en développant des nouvelles routes de trafics, en s’imposant aux populations qui se sont retrouvées précarisées par l’allègement progressif du dispositif Étatique. Et cette économie de trafics qui est totalement imbriquée dans la logique terroriste procure des ressources importantes, une importante base de recrutements…
RFI: Qu’est- ce qui fait Soumeylou Boubeye Maïga, que les groupes Dhihadistes parviennent à augmenter leurs recrutements dans les zones dans lesquelles ils opèrent?
SBM: Ha ben, ils ont des ressources, que ce soient les armes, la drogue, les flux migratoires qui se développent dans cette zone. D’après les estimations qui sont faites, çà rapporte à peu près 5 millions de Dollars par mois, sur lesquels rien que la » Province » Ouest- Africaine de l’État Islamique reçoivent des revenus nets de 2 millions de Dollars. Et comme dans ces zones il y a une grande précarité, économique notamment, c’est quand- même des ressources importantes pour procéder à des recrutements…
RFI: Est- ce que pour vous il y a une cohérence dans le choix des localités qui ont été ciblées par ces groupes ? Est- ce que vous diriez comme certains, que les Djihadistes creusent une sorte de couloir dans cete zone des 3 frontières; dans lesquelles ils essayent de se mouvoir en toute liberté?
SBM: Quand vous regardez l’évolution de la cartographie des violences au Burkina, elle avait évolué progressivement jusque vers sa frontière avec le Bénin, et parce que tous les trafics qui ne pouvaient plus passer par le Nord Niger notamment, ce sont… essayent d’ouvrir un nouveau corridor pour déboucher sur l’Est du Mali. Vous empruntez le Centre du Mali pour longer le fleuve et remontez par Ber, Tombouctou et même Taoudéni notamment. Parce que, je crois que l’interconnexion avec les trafics est fondamentale dans la résilience des groupes. Les trafics ont besoin d’un environnement de violences et de pagaille pour pouvoir prospérer.
RFI: Soumeylou Boubeye Maïga, merci…
SBM: merci bien…
NB: Transcription de: Alassane Dicko, Plaidoyer et communications.
Source : 22 Septembre
Tags: Tombouctou