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Soumeylou B. Maïga sur l’affaire des équipements militaires : «C’était un instrument politique pour certains, mais…»

Longtemps accusé de détournement d’une importante partie des fonds alloués à l’équipement militaire, l’ancien ministre de la Défense et ancien Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, déballe tout au sujet de cette affaire. C’était à l’occasion d’un débat télévisé le week-end passé, sur les antennes de Renouveau TV.

 

Au sujet de l’affaire dite des équipements militaires, Soumeylou Boubèye Maïga a eu l’occasion de se défendre publiquement en donnant le moindre détail sur cette affaire rocambolesque.  

Dans son intervention, SBM estime que cette affaire servant de fonds de commerce politique, certains ont longtemps entretenu les rumeurs autour de ce sujet. Sinon, indique-t-il, il y a beaucoup de ragots insoutenables qui se racontent à ce sujet.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, rappellera-t-il le contexte qui a motivé l’adoption de la loi d’orientation et de programmation militaire estimé à 1230 milliards de francs CFA. Pour lui, face au contexte de guerre dans lequel se trouve le Mali, il fallait relever le niveau de l’armée afin de faire face aux défis qui s’imposaient à nous. «Notre armée était sous-équipée. Les rations de l’armée étaient entre 20 à 40%.  Nous étions en situation de guerre. Les ressources financières étaient rares. Beaucoup de nos partenaires ne souhaitaient pas que notre armée soient rééquipée jusqu’à un certain niveau. Il fallait donc trouver la formule. D’où l’initiative de la loi d’orientation et de programmation militaire », soutiendra l’orateur.

Dans l’application de cette formule, précisera-t-il, la réglementation en vigueur a été scrupuleusement respectée, en l’occurrence l’article 8 des marchés publics.

Pour surmonter les contraintes financières, poursuivra-t-il, un intermédiaire prêt à financer l’acquisition des équipements a été trouvé. C’était sur la base de remboursement sur 3 ans. Après la conclusion de cette convention, souligne Soumeylou Boubèye Maïga,  le Bureau du vérificateur général a fait un contrôle de conformité ; la Cour suprême aussi. Mais les deux n’ont pas abouti aux mêmes conclusions. Pour différentes raisons le rapport du Bureau du vérificateur général a eu plus d’écho. Et il y a eu un parcours judiciaire. « J’ai été détenu pendant deux jours en France. Et puis il y a eu une procédure qui a été ouverte au Pôle économique, où j’ai été entendu comme d’autres. En novembre 2018,  la Cour suprême a rendu un arrêt qui a condamné l’Etat à payer ce qu’il devait payer. Le contentieux a fait un appel. En mars 2018 la Cour suprême a confirmé son arrêt ». Puisse que ce sujet alimentait le fonds de commerce politique de certains, laisse entendre l’orateur,  plus tard par voie de presse nous avons encore appris la réouverture de ce dossier alors qu’il n’en était rien. « En mars dernier, la Cour suprême a pris un arrêt pour fermer définitivement ce dossier. C’était un instrument politique pour certains. Tout mon entourage a été écouté. La justice a été rendue sur la base du droit. Et il n’y avait aucune possibilité de manipulation politicienne. Si toutes les supplications étaient fondées, je ne serai pas là », se glorifie M. Maïga.

SBM, un homme serein

En réponse à la question de savoir s’il était inquiet  par rapport à une éventuelle réouverture de ce dossier, Soumeylou Boubèye Maïga a été on ne peut plus clair : «Je ne m’en suis jamais préoccupé ni inquiété. J’ai toujours fait confiance en la justice. Il y a des gens qui sollicitent la justice en permanence, mais dès que la décision ne va pas au sens qu’ils veulent, ils crient au scandale».

Soutien au Mali, pas aux militaires

S’agissant de la transition en cours, l’ancien Premier ministre rappelle les actions qu’il a posées dès les premières heures de la chute d’IBK, afin qu’on ait une transition réussie. Son parti fut en effet le premier à proposer une architecture pour la transition. « Quand il y a eu le coup d’Etat en 2020, il y avait des perspectives d’une transition civile. Nous avons dit à l’époque que si des militaires s’engagent dans de telles initiatives, ils ont trois préoccupations : la reconnaissance de leur action; leur présence dans les rouages permettant à mettre en place ce à quoi ils sont venus; leur sécurité. Si nous partions dans le sens de l’époque, nous serions dans une situation d’insécurité totale », se souvient-il. Aussi, SBM dit avoir fait comprendre à la communauté internationale qu’il faut soutenir le processus en cours.

De son point de vue, nonobstant les erreurs et tentatives d’isolement des acteurs clés du coup d’Etat et de la transition par l’ancien Président de la transition et son Premier ministre, leur détention extrajudiciaire ne saurait s’expliquer. Partant, il exprimera son soutien au Mali et non aux militaires. « Je  pense que la détention actuelle de l’ancien président de la transition et son PM n’est pas normale. Je ne soutiens pas les militaires. Je soutiens le Mali », indique-t-il.

L’exigence du respect de la durée de la transition

De l’analyse de Soumeylou Boubèye Maïga, la gestion de l’équipe gouvernementale dirigée par Choguel Kokalla Maïga ne rassure guère. Le tâtonnement du chef du gouvernement suscite beaucoup d’interrogations. Car, estime-t-il, la réussite d’une transition, c’est d’en sortir. Or, s’inquiète-t-il, aucune action perceptible de finir cette transition n’est visible. Aujourd’hui, rien n’est sûr, affirme l’ancien Premier ministre Maïga. Mais, souligne-t-il, face à cette tentative de divertissement du peuple pour obtenir une éventuelle prorogation du délai de la transition, la classe politique ne se laissera pas faire. D’ores et déjà, un regroupement de partis politiques, dans lequel notre parti est partie intégrante, a fait des mises en gade le mois passé au sujet du respect du délai de la transition et du calendrier électoral. Car, s’indigne SBM, aujourd’hui, aucun acte du gouvernement ne présage la tenue des élections générales aux dates indiquées. A ce jour, si on était de bonne foi, on aurait déjà fini avec le ficher électoral. Malheureusement, il n’y a aucun acte concret pour la réalisation du calendrier électoral. Si nous ne respectons pas le calendrier, cela sera un grand échec de la transition. Les conséquences seront énormes. La transition doit mettre en œuvre les réformes qui sont compatibles avec le calendrier électoral. Car, nous restons attachés à la Charte de la transition, sachant bien que beaucoup de gens qui sont aux affaires dans cette transition ne veulent pas qu’elle prenne fin. De toutes les façons, indique SBM, les Maliens ne sont pas prêts pour une prolongation de la transition.

Disponibilité réaffirmée pour servir le Mali

Cette tribune aura été l’occasion pour le président de l’Asma-CFP de rappeler à certains de ses compatriotes qu’on peut servir le pays sans être président de la République, Premier ministre ou ministre. On peut être utile à son pays sans être aux commandes, insistera-t-il. Avant de préciser les domaines où il peut être très utile pour le Mali, notamment la reconstruction de l’unité nationale, le travail pour garantir la souveraineté de l’Etat et l’approfondissement de la démocratie.

Aucune alternative à l’Accord d’Alger

Etant l’un des acteurs clés de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, Soumeylou Boubèye Maïga martèle que beaucoup de points contestés par la population ont été faits sur la base de consensus national. «Il ne faut pas se faire d’illusion. On n’a pas d’alternative à la mise en œuvre intégrale de l’Accord. Les derniers états généraux de la décentralisation de 2013 avaient également axé sur la régionalisation. Il avait été décidé que la région soit le pivot de la décentralisation et que son président soit élu par suffrage universel. Ce n’est pas l’Accord qui nous a amené ça. Et c’est ce qui est revenu dans l’Accord. La centralisation crée une inégalité entre les citoyens. Il faut une tertiairisation de nos politiques publiques. Si vous voyez l’inégalité sociale, il faut savoir quelle tire sa source au niveau des territoires. La grande centralisation crée une inégalité au niveau du développement. Les gens doivent s’approprier des réformes qui ont été annoncées il y a longtemps pour comprendre la nécessité de cet accord », a-t-il soutenu.

Il est en tout cas convaincu que le Mali aura à gagner sur le plan militaire en mettant en œuvre l’Accord. Car, étant un pays très vaste, nos effectifs actuels ne peuvent pas combler le vide sécuritaire, selon SBM.

Tirer des leçons du cas afghan

Au sujet de l’Afghanistan, l’ancien Premier ministre invite l’Etat à la vigilance. Car, la situation en Afghanistan confirme qu’on ne peut pas bâtir une stratégie sur une intervention étrangère. Dans la lutte contre le terrorisme, il faut le volet militaire et le volet politico-idéologique. Chaque fois qu’il y a une action militaire, il faut qu’il y ait une coordination des autres démembrements. C’est-à-dire une reconquête administrative territoriale, la mise en œuvre d’une reconstruction politique et sociale. Notre histoire récente montre que tout ce qui est possible ailleurs peut se reproduire ici. Il faut une doctrine d’ensemble. Nous avons besoin de l’appropriation par la politique nationale. Dans la situation dans laquelle nous nous trouvons, nous sommes dans un champ de confrontation internationale. Il faut une continuité dans l’administration. Nous avions déployé 8000 hommes à l’intérieur. Nous avons essayé de les traquer dans leur retranchement. Tant que nous ne ferons pas comme l’Algérie, nous nous en sortirons difficilement. C’est-à-dire entreprendre parfois des offensives, même s’il n’y a pas d’attaques.

Oumar KONATE

Source : La Preuve

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