Au moment où les agitations syndicales se calment, le front politique est de nouveau en ébullition. La publication du Manifeste pour la refondation du Mali de l’iman Mahamoud Dicko, des conférences de presse musclées organisées par le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), les anciens députés de la 6ème législature et le meeting du Front de refus de l’application de l’Accord d’Alger sont les signes avant coureurs d’une nouvelle tension politique contre la transition.
À peine la fin du bénéfice du doute accordé aux autorités de la transition par les Maliens, la tension est montée d’un cran la semaine derrière. Tous ceux qui ont pris la parole, ont jeté l’anathème sur la gestion de la transition. Ils dénoncent et condamnent la façon dont les militaires sont en train de gérer le pays. Mais la surprise est venue du côté de l’imam Mahamoud Dicko qui avait laissé entendre après le départ d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) du pouvoir le 18 août 2020 de retourner dans la mosquée.
Dans le Manifeste pour la refondation du Mali qu’il a publié dans les médias, l’iman sort de sa réserve pour une autre aventure quand il déclare: «Depuis le 18 août 2020, j’ai laissé ma porte grande ouverte. J’ai inlassablement écouté et observé, mais la situation me paraît trop grave pour que je garde silence. Si nous ne réagissons pas maintenant, activement et collectivement, l’État qui nous gouverne n’a plus de sens. Il faut sauver le pays». Ce nouvel engagement de l’imam Mahamoud Dicko est interprété par les uns come une rupture avec les militaires au pouvoir et pour les autres comme un avertissement et pour d’autres encore qu’il est toujours là. Il regrette en ces termes son soutien à Ia classe politique et particulièrement à IBK: «Nul être non plus n’est parfait. Je me suis souvent trompé en soutenant des hommes qui, guidés par des intérêts égoïstes et matérialistes, n’ont pas su incarner le redressement du Mali tant souhaité. J’ai cru, comme en 2013, qu’une participation forte à un projet électoral pourrait, à elle seule, porter l’espoir de résolution de nos problèmes de gouvernance politique et sociale. Je me suis trompé. Je le regrette sincèrement».
Pour sa part, le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) a, au cours d’une conférence de presse qu’il a animée, jeudi le 4 février, dénoncé les initiatives et démarches solitaires et les manœuvres subreptices mises en scène pour donner l’impression d’inclusivité, purement factice, du processus de relecture des textes électoraux engagé par la junte, et refuse que les forces sociopolitiques qui le composent soient réduites à jouer le rôle de faire-valoir et de caution de crédibilité à un tel jeu trouble. Aussi, déclare-t-il solennellement se démarquer des dérives et insuffisances, et continuer à porter les justes et légitimes revendications du Peuple malien qu’il entend faire aboutir par tous les moyens légaux et démocratiques.
Quant aux anciens députés de la 6ème législature, ils ont, au cours d’une conférence de presse, demandé leur rétablissement dans leur droit. Par la même occasion, ils réclament la dissolution du Conseil national de transition (CNT) qui à leurs yeux ne reflète pas l’émanation du peuple malien.
Le Front du refus de l’application de l’accord d’Alger n’est pas resté en marge. Il a organisé un meeting populaire, samedi le 6 février, à la Bourse du travail. Les organisateurs demandent aux autorités de la transition de ne pas appliquer l’accord d’Alger comme elles souhaitent le faire.
Les partisans de Ras Bath, eux aussi, étaient dans la rue pour demander sa libération. Malheureusement, ils ont été dispersés à coup de gaz lacrymogènes.
Au regard de cette situation, il est fort possible que les uns et les autres mettent de côté leurs rancœurs pour former un front commun contre les autorités de la transition qui cristallisent aujourd’hui des mécontentements.
Yoro SOW
Source : L’Inter De Bamako