Le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) a porté de nombreux mois durant les aspirations légitimes du Peuple malien pour éviter la disparition de notre Pays en tant que Démocratie, République et Nation par le fait d’un régime oligarchique, corrompu et ploutocratique.
Bravant le soleil et la pluie, les sévices, menaces et arrestations, les gaz lacrymogènes et les tirs à balles réelles qui ont fait de nombreux blessés et morts dans ses rangs, mais refusant aussi les postes ministériels et autres privilèges qui lui ont été proposés, le M5-RFP a vu ses premières revendications aboutir avec la «démission» de l’ancien président de la République, de son gouvernement ainsi que la «dissolution» de l’Assemblée nationale.
Un groupe de militaires, regroupés au sein d’un Conseil national pour le salut du peuple (CNSP), déclarant «avoir parachevé» l’action du M5-RFP était en effet intervenu, le 18 août 2020, pour arrêter le président Ibrahim Boubacar Keïta. Ce CNSP apparaissait ainsi comme le partenaire naturel du M5-RFP pour conduire une transition de rupture avec les pratiques contre lesquelles les Maliens s’étaient dressés à Bamako, à l’intérieur du Mali et dans la Diaspora.
Cependant, après de nombreux volte-face, manquements à la parole donnée, dédits et trahisons, il est avéré aujourd’hui qu’il existe une complicité objective et une convergence d’intérêts et d’objectifs entre l’ancien régime, en apparence déchu, et les autorités militaires qui dirigent de fait la Transition et qui ont fait main basse sur toutes les institutions et tentent une offre publique d’achat (OPA) sur l’ensemble de notre Pays et sur tous les leviers d’exercice de sa souveraineté et sur le processus de réformes politiques et institutionnelles.
D’ores et déjà, le M5-RFP porte à la connaissance de l’opinion nationale et internationale qu’il a introduit auprès de la Cour suprême du Mali un recours pour excès de pouvoir contre le décret n°2020-0239/PT-RM du 03 décembre 2020 fixant la liste nominative des membres du Conseil National de la Transition (CNT) dont l’illégalité n’échappe à personne. Cet organe doit être purement et simplement dissout pour illégalité et défaut de légitimité en tant que représentation nationale.
Le M5-RFP dénonce ainsi les initiatives et démarches solitaires et les manœuvres subreptices mises en scène pour donner l’impression d’inclusivité, purement factice, du processus de relecture des textes électoraux engagé par la junte, et refuse que les forces sociopolitiques qui le composent soient réduites à jouer le rôle de faire-valoir et de caution de crédibilité à un tel jeu trouble.
Aussi, le M5-RFP fustige les tentatives de marginalisation l’ensemble de la classe politique par les Autorités de la Transition relativement aux questions politiques et électorales, et les fuites en avant pour détourner l’attention du Peuple sur les priorités de la Transition à travers des pseudo-opérations coup de poing de démolition d’immeubles dans la zone aéroportuaire, alors que les Autorités sont plutôt attendues sur le terrain de la lutte contre l’insécurité, le recouvrement de l’intégrité du territoire national, le retour de l’Administration et des services sociaux de base, la relecture de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, la lutte contre la corruption, l’assainissement de la gouvernance des affaires publiques, etc.
D’ailleurs, le Peuple malien assiste avec désarroi à la tentative rocambolesque d’application de l’Accord issu du processus d’Alger, qui est systématiquement mis en œuvre sans réserve aucune, contrairement aux annonces faites dans la propre feuille de route de la Transition et à l’encontre de l’exigence de relecture promise et fortement attendue par tous.
De même, l’attitude de tolérance voire de complicité vis-à-vis du statut exclusif reconnu à Kidal met à nue la duplicité criarde des autorités de la Transition qui, au détour d’une visite d’une délégation gouvernementale à Kidal annoncée à grand coup médiatique et terminée en queue de poisson, ont remis à l’ordre du jour les velléités séparatistes dont les tenants s’en donnent à cœur joie pour fouler définitivement au pied le drapeau national, l’unité et la souveraineté nationales et implanter des «États-majors militaires» progressivement sur le reste du territoire national, notamment dans le Gourma, à la lisière des régions de Tombouctou et de Mopti, etc., et ce, dans le silence total de la Communauté internationale pourtant fortement présente sur le territoire national, en tant que membre des organes de suivi des engagements pris par les parties respectives et garante de leur respect.
En résumé, le Peuple malien assiste, déçu et désemparé à un reniement systématique de tous les engagements pris par la junte militaire, à une démultiplication et une aggravation des problèmes existants, à une perpétuation des mauvaises pratiques dont la corruption, à une aggravation de l’insécurité et de l’injustice, à une accélération du processus de partition de fait du pays, à un refus d’engager des poursuites judiciaires dans les dossiers avérés de détournement de deniers publics et contre les auteurs, commanditaires et complices des tueries et exactions de juillet 2020 à Bamako, Sikasso et Kayes, à recoudre le tissu social au centre et au nord du Mali, à procéder aux réformes structurelles nécessaires, à œuvrer pour des élections transparentes régulières et crédibles dans les délais impartis, à respecter l’État de droit ou encore à amorcer la Refondation du Mali.
Le M5-RFP, fidèle à ses idéaux et engagements, ne peut ni s’associer, ni rester observateur passif, ni assumer la gouvernance en cours, et prend à cet effet l’opinion nationale et la Communauté internationale à témoin de la confiscation des résultats de la lutte patriotique du Peuple malien déclenchée, le 5 juin 2020.
Aussi, le M5-RFP déclare solennellement se démarquer des dérives et insuffisances, et continuer à porter les justes et légitimes revendications du Peuple malien qu’il entend faire aboutir par tous les moyens légaux et démocratiques.
À cet effet, le M5-RFP exige d’ores et déjà de:
1) mettre à la disposition à la Justice les présumés auteurs, commanditaires et complices des tueries et exactions contre les populations mains nues à Sikasso, Kayes et Bamako;
2) diligenter les dossiers de lutte contre la corruption, notamment par la levée du secret défense dans les marchés relatifs aux équipements des forces de défense et de sécurité;
3) dissoudre purement et simplement le Conseil national de Transition (CNT) pour illégalité et défaut de légitimité;
4) créer les conditions d’une relecture immédiate et consensuelle de l’Accord issu du processus d’Alger;
5) instituer un cadre de concertation politique pour convenir des objectifs et modalités de relecture consensuelle des textes électoraux et de tous autres textes pertinents;
6) convenir des modalités de création d’un organe unique et indépendante de gestion du processus électoral, tel que convenu entre la quasi-totalité des acteurs politiques, afin de réussir la tenue d’élections transparentes régulières et crédibles et éviter le scénario d’une simple formalité pour une cession du pouvoir par la junte à des complices;
7) tenir les Assises Nationales de la Refondation (ANR) pour opérer des reformes consensuelles pertinentes de Refondation de l’État et de la démocratie et préserver la vision du changement de système, objectifs essentiels du combat patriotique du Peuple malien enclenché, le 5 juin 2020.
Le M5-RFP appelle le Peuple malien à se dresser contre la perpétuation du régime défunt et de ses pratiques, et à demeurer mobilisé jusqu’à l’aboutissement de son combat patriotique pour la refondation et la restauration d’un Mali démocratique, républicain et laïc doté d’une gouvernance responsable et vertueuse.
Bamako, le 04 Février 2021
Pour le Comité Stratégique du M5-RFP, Choguel K. MAIGA
Source : L’Inter De Bamako