Le regroupement des organisations de la société civile du Sahel conseille les États européens et africains, réunis en sommet ce jeudi 17 février, de ne pas commettre les mêmes erreurs du passé en continuant de privilégier une réponse sécuritaire qui ne s’attaque pas aux causes profondes de la crise.
À la veille du sommet Union européenne et Union africaine qui s’ouvre aujourd’hui à Bruxelles, la Coalition citoyenne pour le Sahel a élaboré une déclaration, signée par une trentaine d’organisations, rendue publique ce mercredi 16 février. Elle alerte et conseille les dirigeants sur la crise sécuritaire dans le Sahel.
Pour la Coalition, ce sommet est une occasion de promouvoir un véritable sursaut civil pour s’attaquer aux causes profondes de la crise au Sahel et mieux protéger les populations civiles.
« Rarement le Sahel n’a été autant au cœur de l’actualité. L’attention se focalise sur un possible retrait des troupes françaises et européennes du Mali, sur l’arrivée de forces russes, sur les coups d’État militaires et sur les brouilles diplomatiques », indique la déclaration.
Toutefois, le regroupement regrette que les « besoins des populations civiles, qui continuent à être les premières victimes de l’insécurité, semblent relégués au second plan par les gouvernements et les acteurs internationaux ».
La population civile est la première victime de cette insécurité dans le Sahel. Mais, le Mali, le Burkina Faso et le Niger sont les plus exposés aux conséquences de la dégradation de la situation sécuritaire.
Au Burkina Faso, au Mali et au Niger, près de 2000 civils ont été tués dans des violences au cours des 12 derniers mois, dont les deux tiers attribués aux groupes dits djihadistes, selon Armed Conflict Location & Event Data Project (ACLED).
« 2,5 millions de personnes ont dû fuir leur maison, dont une majorité d’enfants aujourd’hui déscolarisés – deux fois plus qu’il y a un an. 15 millions de Sahéliens dépendent de l’aide humanitaire, l’insécurité alimentaire se répand à une vitesse alarmante et l’accès aux services de base, comme la santé, est toujours aussi défaillant. Malgré l’urgence, seuls 48% des besoins humanitaires sont actuellement financés », alerte la Coalition citoyenne pour le Sahel
Il y a tout juste un an, les chefs d’État sahélien et leurs partenaires internationaux avaient pris des engagements forts, lors du sommet du G5 Sahel de N’Djamena, sur la protection des civils, la gouvernance, l’urgence humanitaire et la lutte contre l’impunité, qui sont les quatre priorités identifiées par la Coalition citoyenne pour une réponse plus efficace à la crise dans la région (les Piliers citoyens).
Malheureusement, les promesses de ce « sursaut civil et politique » consigné dans la déclaration finale du sommet semblent bel et bien avoir été enterrées, affirme la Coalition qui estime qu’un an après ce sursaut civil et politique est plus urgent que jamais au Sahel pour enfin mettre en œuvre une stratégie qui répond aux besoins des populations.
« Continuer à privilégier une réponse sécuritaire qui ne s’attaque pas aux causes profondes de la crise reviendrait à reproduire les mêmes erreurs qui ont conduit à l’impasse actuelle », prévient le regroupement d’associations de la société civile.
Également la Coalition dans son document de plaide pour le respect des droits de l’homme très souvent malmené en déplorant la poursuite de l’impunité, qui entretient la défiance des populations et alimente le cycle de la violence.
« Dans tout le centre du Sahel, il continue à y avoir des allégations d’abus par des éléments des forces de défense et de sécurité, tandis que les procès des principaux auteurs de violations avérées se font toujours attendre », affirme-t-elle.
Par ailleurs, elle estime que les impératifs de transparence et de redevabilité doivent s’imposer également à toutes les forces étrangères présentes au Sahel. À cet effet, elle a pris acte de la communication de l’état-major français sur la mort de 4 civils lors d’une opération militaire le 8 février au nord du Burkina Faso.
Elle regrette cependant que la France n’ait toujours pas répondu aux demandes de la société civile et du Président du Niger d’ouvrir une enquête sur la mort de trois civils en marge d’une manifestation contre un convoi militaire français à Téra, au Niger, en novembre dernier.
PAR SIKOU BAH
Source : Info-Matin