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Sikasso : à Yorosso, Karangana sans coton

Des acteurs du coton ont abandonné la culture du coton graine cette année à cause de la baisse des prix. Une situation inquiétante pour la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT), qui redoute une saison sans coton, notamment à Karangana (Sikasso).

 

Il y a quelques mois, des acteurs du coton avaient annoncé la couleur : limiter la culture pour la campagne 2020-2021. Les dernières statistiques, recueillies notamment dans la commune rurale de Karangana, dans le cercle de Yorosso (Sikasso), indiquent une forte abstention des cotonculteurs, au lieu d’une réduction du périmètre consacré à la culture du coton.

La filière coton, fortement touchée par la Covid-19, est en grande difficulté. En effet, face à la baisse du prix du coton-graine pour la campagne 2020-2021, de 275 francs CFA à  250 francs CFA le kilogramme et la hausse des certains intrants agricoles, des paysans ont abandonné la culture du coton cette année. «Sur une superficie d’emblavure de 810 000 ha, les réalisations sont estimées à 170 000 ha pour la campagne 2020-2021 » (La lettre confidentielle du Mali,  046, 9 août 2020).

Un fait inédit

Dans la commune de Karangana, l’une des principales zones de production du coton du cercle de Yorosso, la situation est inquiétante. Sur une prévision de  30 à 33 000 ha pour la campagne en cours, les réalisations sont seulement à 620 ha pour l’ensemble de la commune.

Un fait inédit depuis l’installation, en 1985, de l’usine de la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT) à Karangana. Le spectre d’une saison sans coton plane. « Nous ne sommes pas sûrs que l’usine travaillera cette année. Les quelques hectares cultivés seraient certainement acheminés vers la CMDT de Koutiala », prédit Seydou Sankata, chef d’usine de la CMDT de Karangana.

Mahamane Goïta est un cotonculteur de la commune de Karangana. Sa production saisonnière de coton varie, depuis des années, entre 14 et 15 tonnes pour une superficie de 18 ha. Il pouvait gagner jusqu’à 2 000 000 francs CFA. Mais tout comme de nombreux autres paysans, il a abandonné cette année : « Dans un premier temps, les propositions des autorités ne nous arrangeaient pas, parce qu’on allait s’endetter au moment de la vente. A l’issue des négociations, les autorités ont accepté d’acheter le kilogramme du coton à 250 francs CFA », explique Mahamane, obligé de trouver une alternative moins avantageuse. « A la place des 18 hectares de coton, j’ai mis du sorgho que je vendrais pour subvenir aux besoins urgents de ma famille. Mais, cela n’est pas assez pour moi comparé au coton », précise-t-il.

D’ores et déjà, les conséquences de cette chute de la production du coton se font déjà sentir. Daouda Koné, un autre paysan, en témoigne : « D’habitude, je réalise 7 ha de maïs. Mais j’ai été obligé de réduire la superficie de mon champ à 3 hectares, car je ne pouvais pas avoir d’engrais avec la CMDT. Pour ces trois 3 ha, j’ai été obligé d’acheter de ma poche 15 sacs d’engrais à près de 250 000 francs CFA. Cet argent aurait pu servir à autre chose, surtout avec la période de soudure », a-t-il déploré, avant de souhaiter le retour à la normale.

2 millions de personnes vivent du coton

L’usine de Karangana emploie environ 200 personnes dont 46 permanents. Les saisonniers, qui constituent  la majorité de ses employés,  travaillent pendant 5 à 6 mois de la campagne. Ces derniers sont, en partie, issus de la commune de Karangana et ses environs. L’arrêt annoncé de l’usine risque de fortement impacter l’économie de la commune durant la prochaine campagne. «Toutes ces personnes seront au chômage pendant des mois », affirme le chef d’usine.

Moussa Coulibaly, un autre agent de la CMDT de Karangana, s’attend au chômage à la prochaine campagne. « Je comptais énormément sur la campagne prochaine pour faire quelques réalisations. En plus de mon salaire à la CMDT, je gagnais assez d’argent en réparant des téléphones, mais le marché sera moins reluisant cette année. Car il n’y aura pas de saisonniers dans le village »s’inquiète ce chef de ménage.

Selon certains observateurs, cette situation risque de pousser un grand nombre de jeunes de la commune sur le chemin de l’exode rural afin de pouvoir venir en aide aux siens. Deux millions de personnes vivent de la culture du coton au Mali. C’est le deuxième produit d’exportation du pays après l’or et devant le bétail.

Source : Benbere

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