La Jarre, « fiyen » fait partie des trousseaux de mariage, dans la majorité des ethnies maliennes. C’est une pratique qui fait partie de nos coutumes et traditions. La présence de la jarre dans les trousseaux à une signification qui relève de la bonne réussite du foyer du jeune couple selon les vieilles femmes. Ainsi, elle joue un rôle primordial dans chaque foyer.
Il est question, ici, d’une vase de différentes tailles, faite à base d’argile, et réservée à la consommation d’eau seine. Cet ustensile ménager symbolise l’entente, l’union et la solidarité dans la famille car tous les membres de la famille y boivent et avec le même bol : cela consolide les liens familiaux. » Une nouvelle mariée ne doit jamais être conduite chez son époux sans une Jarre neuve dans son trousseau. Cela porte malheur au mariage » nous affirme une magnabaga. Elle a ajouté que la jarre peut aussi montrer un malheur dans le foyer en se cassant toute seule sans avoir de coup » nous a confié Bassan, la vielle magnabaga du quartier Daoudabougou. Une jeune femme divorcée nous confirme cela je possédais, dans mon trousseau de mariage, une jarre de taille moyenne. Avant même d’atteindre six mois, elle s’est percée sans avoir aucun coup. Au début, on ne pouvait pas la remplir. J’y mettais de l’eau chaque jour. Mais finalement, il était impossible pour elle de garder même un bol d’eau. Au même moment, mon foyer se déstabilisait, je ne m’entendais plus avec lui. Et on a fini par divorcer » dit-elle.
Selon Bassan, à l’arrivée de la nouvelle mariée dans sa belle-famille, la jarre est trônée par une vieille conseillère matrimoniale « magnambaga ». Elle peut être aussi installée par une autre femme qui répond à tous les critères pour son installation. ‘’N’importe qui ne peut trôner la jarre de la nouvelle mariée. C’est une tâche de très haute estime qui n’est confiée qu’à une épouse modèle. Une femme hors mariage, divorcée ou celle qui a comme habitude d’abandonner son foyer ne mérite pas cet honneur car la protection du nouveau couple en dépend. L’épouse qui entretient sa jarre adoucit le cœur de son époux : » il y’a un réfrigérateur chez moi. Mais malgré tout, je remplis aussi soigneusement ma jarre chaque matin en ajoutant le ‘’baby’’. Mon mari ne boit jamais l’eau du réfrigérateur, mais de la jarre, car, dit-il, cette eau a un goût exceptionnel par rapport à celle mise dans le bidon » dit Fatoumata, une jeune épouse de Kalaban.
La vieille Bassan ne manque pas de souligner qu’une femme modèle se garde toujours de laisser sa jarre vide. Car en plus des membres de la famille, les anges et les âmes des défunts de la famille y boivent. » C’est très grave de laisser la jarre vide dans la maison. Elle confia aussi que son défunt grand frère, au village, a été une fois interpellé par une voix, très tard dans la nuit pour l’informer que la jarre était vide. « Solomane m’a dit qu’il a été réveillé par cette voix qui disait » Solomane y’a pas d’eau dans la jarre. Comment nous, nous allons boire ? » dit-elle en ajoutant qu’effectivement elle était vide et le chef de famille réveilla au même moment, une de ses femmes pour chercher de l’eau.
En effet, la croyance populaire en Afrique soutient que les esprits des morts protègent nuit et jour sur leurs familles. Ainsi ils se servent de la jarre. L’épouse doit toujours veiller à ce que la jarre ne manque pas d’eau, surtout pendant la nuit. La vielle Bassan confia aussi que la femme en aucun cas, ne doit emporter sa jarre de son foyer si elle veut le préserver. » une union ne peut se faire sans malentendus. Cela n’est pas souhaitable, mais si la femme décide d’abandonner momentanément son foyer suite à des discordes, elle peut tout emporter sans conséquence sauf la jarre. Si elle l’emporte, alors elle ne retournera plus dans ce même foyer. Alors, l’épouse qui ne veut plus de son mariage, peut se permettre de briser sa jarre ou de l’emporter » fait elle comprendre.
La Sirène