Dans son adresse à la nation à l’adresse, à l’occasion du 59e anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale, le président IBK, tout en réaffirmant l’adhésion du Gouvernement à sa mise en œuvre, a annoncé sa volonté de réviser certaines dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, en raison des difficultés pour le Mali de les mettre en œuvre. Comment cet appel du Chef de l’État va être accueilli par les parties signataires ?
Cette question mérite son pesant d’or quand on sait que cette annonce intervient au moment où la confiance entre les parties signataires de l’Accord (CMA, Plateforme, gouvernement) a été mise en mal ces derniers temps par un certain nombre d’événements. À commencer par ceux du 17 juillet dernier à Kidal où des manifestants ont brûlé le drapeau national pour protester contre la visite d’une délégation de députés au camp militaire du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC). Aussi, depuis quelques jours, le Comité de suivi de l’accord pour la paix et la réconciliation fait face à des difficultés. Et des dissensions entre parties signataires ont empêché la tenue de la 38e session du CSA initialement prévu le 17 septembre 2019 à Kidal.
En ces temps de crise, il n’est pas évident que l’invitation du président à cet exercice de révision puisse être favorablement accueillie par toutes les parties.
Or, dans le contexte actuel du processus de mise en œuvre de l’Accord où la tendance est à la méfiance des acteurs, on se demande si le président IBK n’est pas en train de prendre le risque d’ouvrir la boite à pandore. Car en cas d’échec, le président donnera ainsi l’occasion à des acteurs, dont certains sont connus pour leur mauvaise foi, de se mettre en marge du processus et de crier à la violation de l’Accord qui les lie au Mali. De toute évidence, en cas de rejet de la décision du président par une partie des signataires, cela ébranlerait davantage la confiance. Mais, à supposer qu’on procède à la révision et que l’une des parties ne se reconnaisse pas dans la version révisée, cela ouvrait la porte à d’autres négociations qui risquent d’aboutir à une impasse.
Et en cas de crise née de cette tentative de relecture des dispositions de l’Accord, le Mali se verrait rappeler à l’ordre par la médiation qui va s’appuyer sur les dispositions de l’article2 qui stipule : « Les Parties s’engagent à mettre en œuvre, intégralement et de bonne foi, les dispositions du présent Accord en reconnaissant leur responsabilité première à cet égard » et de l’article 52 qui fait d’elle le garant politique de l’Accord et du respect de ses dispositions par les Parties.
Certes, certaines réformes demandées dans l’Accord sont difficiles à mettre en œuvre ; mais, comme on le dit, ‘’l’arbre ne doit pas cacher la forêt’’. Des différents rapports de l’ONU et du Centre Carter (Observateur indépendant) il ressort que les retards accusés dans la mise en œuvre de l’Accord sont essentiellement liés à la mauvaise foi des parties et notamment du manque de leadership du gouvernement. Des obstacles qu’aucune réforme ne peut en réalité lever. D’ailleurs, IBK, lui-même, a appelé à juste titre les groupes armés du nord “à plus de raison, pour que nos efforts, les efforts de toutes les parties, ne tendent plus que vers la paix’’. Comme s’intitule d’ailleurs le document négocié à Alger et signé à Bamako en 2015 : ‘’Accord pour la Paix’’ et non ‘’l’Accord de Paix’’. Cette œuvre est un cadre de dialogue entre les acteurs dans la mise en œuvre de l’Accord à tous les niveaux du processus.
Par Abdoulaye OUATTARA
Source : Info-Matin