Réunis à Sotchi, les chefs d’état africains et russe ont ébauché les contours de leur partenariat. Les deux parties entendent se donner la main pour le développement des infrastructures de base, des transports, de l’énergie, de l’économie numérique, et dans le cadre de la lutte contre le terrorisme
C’est dans le merveilleux Parc des sciences et des arts « Sirius » de Sotchi que s’est déroulée hier la cérémonie d’ouverture des travaux du premier sommet Russie-Afrique, en présence de nombreux chefs d’état dont le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta.
Splendidement installé sur les hauteurs de la station balnéaire, le site affichait déjà aux premières heures de la matinée des aspects annonciateurs d’un grand événement : dispositif sécuritaire impressionnant, organisateurs au four et au moulin. Sans oublier la forêt des drapeaux de plusieurs pays, indiquant la présence de nombreux pays africains. Pour rappel, le thème retenu pour ce sommet est : « paix, sécurité et développement ». La cérémonie d’ouverture était coprésidée par le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine et le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi.
Historique pour certains, nouveau tournant pour d’autres, la rencontre doit esquisser les contours d’un nouveau partenariat axé sur le développement des infrastructures de base, le transport, l’énergie, l’économie numérique, etc. Le premier acte de la cérémonie a été la traditionnelle séance de photo de famille des chefs d’état et gouvernement, suivie de la longue séquence des interventions. Naturellement, c’est le président du pays hôte, qui a été le premier à s’exprimer. Vladimir Poutine a souhaité la bienvenue aux chefs d’état et de gouvernement. « Votre présence remarquable à cette rencontre, a-t-il dit, témoigne de l’importance des liens entre la Russie et l’Afrique. Ces liens de coopération datent depuis la période coloniale où l’ex-Union des Républiques socialistes soviétiques (URSS) avait soutenu plusieurs pays africains à accéder à l’indépendance, a rappelé le président russe.
ACCORDS DE DÉFENSE- Vladimir Poutine a ensuite soutenu que le développement de l’Afrique est une priorité de la politique extérieure russe. « Sur beaucoup de questions, nous avons des approches communes. Nous allons poursuivre des consultations régulières à l’ONU, coordonner nos activités, afin de garantir notre sécurité », a-t-il souligné, ajoutant qu’en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la Russie ne manquera pas de garantir la sécurité régionale. Le sommet de Sotchi, a-t-il annoncé, se penche sur des enjeux essentiels qui interpellent parmi lesquels, les questions de paix, de sécurité, de lutte contre le terrorisme. L’Afrique est minée par les conflits, les crises humanitaires, le changement climatique, la pauvreté. Face à ces défis, il est urgent d’apporter des solutions dans un cadre multilatéral, a lancé Vladimir Poutine qui a abordé la question sécuritaire en expliquant que la Fédération de Russie a signé des accords de défense avec une trentaine de pays africains. Au même moment, elle poursuit la formation des militaires africains. Pour le président russe, il est donc urgent de renforcer nos relations dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. Dans le domaine économique, le volume des échanges avec l’Afrique a atteint les 20 milliards de dollars. La Russie ambitionne de doubler ce chiffre d’ici 5 ans. Dans cette perspective, les entreprises russes sont implantées en Afrique depuis des années et évoluent dans plusieurs domaines (énergie, mines, technologies), a indiqué le président russe.
Vladimir Poutine a annoncé que son pays compte poursuivre sa politique d’annulation des dettes et de renforcement des liens de coopération avec les institutions régionales africaines. à cet effet, de nombreux accords seront signés. Afin de resserrer davantage les liens, il est prévu des consultations politiques régulières entre les ministres des Affaires étrangères et instituer une rencontre de ce genre tous les trois ans. Intervenant à son tour, Abdel Fattah Al-Sissi, président en exercice de l’Union africaine (UA), a souligné que la Russie constitue un acteur important dans l’arène internationale. Ce premier sommet Russie-Afrique permettra de jeter les bases de la coopération entre les deux parties. La création de la Zone de libre échange vise à stimuler les investissements étrangers dans différents domaines. Les pays africains se sont fixés comme objectifs : le développement durable et l’intégration africaine. Dans ce contexte, a relevé Al-Sissi, il s’agira de soutenir la politique cadre de l’UA qui est axée sur la non ingérence dans les affaires internationales et le règlement pacifique des conflits. Il a annoncé que l’Egypte s’apprête à organiser un forum sur la paix et le développement. Cette rencontre, selon lui, sera une plateforme régionale qui permettra de débattre des questions de développement durable. Le président égyptien a invité les chefs d’état africains et le président russe à prendre part à ce forum. De son côté, le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat dira que la date du 24 octobre ouvre une nouvelle ère dans les relations russo-africaines. Pour lui, l’Afrique est l’un des continents qui a bénéficié du soutien de l’ex-URSS. L’Afrique dispose d’importantes ressources naturelles qui ne sont pas exploitées. C’est pourquoi, il a exhorté les opérateurs économiques russes à investir dans le continent.
VOYAGE MÉMORIEL- à sa suite, le représentant du G5 Sahel a fait remarquer que le continent africain est confronté à de graves crises humanitaires et au terrorisme. Selon lui, la réponse à ces problèmes, n’est pas seulement militaire, elle est aussi humanitaire. Raison pour laquelle, il a demandé à la Russie de financer un projet du G5 Sahel dont le montant s’élève à 2 milliards d’euros (1312 milliards de Fcfa). Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, s’exprimant devant ses pairs, a indiqué que le rendez-vous de Sotchi est, pour lui, un voyage mémoriel, puisque l’ancien président Modibo Keïta y a séjourné deux fois. Il a qualifié le sommet de Sotchi de retrouvailles entre la Fédération de Russie et l’Afrique. « Aujourd’hui que toute l’Afrique se retrouve autour de vous est un signe que nous saluons », a souligné le chef de l’état, ajoutant que la préoccupation principale du Mali concerne la sécurité. Ibrahim Boubacar Keita a rappelé que 22% du budget national sont alloués à la sécurité. « Nous avons besoin que votre amitié se manifeste dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent », a plaidé le président Keïta, avant d’indiquer que ce sommet est une plateforme de débats autour des défis : sécurité, changement climatique, drame humanitaire. Pour le chef de l’état, aujourd’hui aucun pays ne peut faire face seul au terrorisme. Il a demandé à la Russie d’aider le G5 Sahel à faire face aux groupes terroristes qui endeuillent les pays du Sahel.
Envoyée spéciale
Christiane DIALLO
Le président Keïta à propos du sommet : « TOUTES LES PRÉOCCUPATIONS DE L’HEURE ONT ÉTÉ ÉVOQUÉES »
Dans un entretien accordé à la presse nationale pour tirer le bilan du rendez-vous de Sotchi, le chef de l’état, Ibrahim Boubacar Keïta, a d’abord remercié le président de la République arabe d’Égypte, Abdel Fattah Al-Sissi, et le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine pour l’invitation à ce forum, qui était une première. Le président Keïta a rappelé que le 24 octobre est la date de création des Nations unies, une date symbolique à laquelle s’est tenu le sommet Russie-Afrique. Au cours de cette rencontre de haut niveau, a-t-il rappelé, toute l’Afrique était représentée et toutes les préoccupations de l’heure ont été évoquées : sécurité, défense, lutte contre le terrorisme, changement climatique. « Nos pays sont obligés d’investir dans la défense, 16 à 32% des budgets. Chacun a salué l’expertise russe en matière de lutte contre le terrorisme. Les événements récents survenus ont prouvé qu’elle devient incontournable. Ce sommet est hautement symbolique pour le Mali », a développé le chef de l’état qui a fait remarquer que le choix de Sotchi pour abriter ce sommet n’est pas fortuit. Sotchi, rappellera-t-il, est une station balnéaire située au bord de la mer Noire et qui a déjà abrité de nombreux rendez-vous diplomatiques importants par le passé.
Un forum économique a été organisé en marge du sommet. Lors de cette rencontre, des pistes de coopération ont été explorées. « Là aussi, la Russie est prête à répondre dans tous les domaines (mines, agro-industrie, transport), s’est réjoui Ibrahim Boubacar Keïta, avant d’ajouter que « cette rencontre est venue à son heure et elle n’a pas déçu ». Aussi, il a été décidé d’instituer une rencontre de haut niveau tous les trois ans. Selon lui, cela se comprend, puisque les grands pays veulent toujours élargir leur offre.
Au cours de l’entretien avec le président Poutine qui s’est déroulé en présence d’autres chefs d’état, des questions bilatérales ont été évoquées et seront prises en charge, a assuré Ibrahim Boubacar Keïta qui s’est dit satisfait de la rencontre.
C. D.
L’Essor