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Roue libre : Kidal 21 mai : Le Mali à Waterloo

Qui a tiré, qui a donné l’ordre de tirer sur les manifestants en mars 1991 ? Les Maliens se souviendront éternellement de cette question lancinante posée par les avocats des victimes lors du procès  » crimes de sang « . Question restée jusqu’à présent sans réponse et qui entrera dans les  » grandes énigmes de l’histoire  » si chères à Alain Decaux. Car on a cloué le bec à Drissa Traoré de Bougouni membre du Bec de l’UDPM qui s’étant levé, voulait cracher le morceau.

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L’histoire est un éternel recommencement. A quelques années de là voilà que la même question ressurgit : qui a donné l’ordre à l’armée d’attaquer Kidal ? Là encore les deux plus hauts responsables de l’Etat se débinent. IBK est resté muet comme une carpe comme dans l’affaire de l’avion présidentiel préférant laisser seul son premier ministre descendre dans l’enfer. Mais Mara est un mauvais bouclier. Devant les députés il s’est fourvoyé dans des tournures alambiquées comme s’il voulait définir le sexe des anges. Il y a eu, a-t-il dit un manque de coordination et de renseignements sur le terrain.

 

Accusation gravissime qui rejette la responsabilité de la débâcle sur le haut commandement militaire. Parce que cela veut dire que nos soldats étaient laissés à eux-mêmes sur le champ de bataille dans un désordre indescriptible et que dès le départ ils ne disposaient d’aucun élément d’appréciation ni sur l’effectif ni sur le matériel de l’ennemi et encore moins sur sa position. Ils sont partis s’offrir comme chair à canon pour se faire massacrer dans les sables mouvants du désert. Triste épisode qui rappelle la défaite du maréchal Rommel à la tête de l’Afrikakorps face aux troupes britanniques de Montgomery à El Alamein à l’automne de 1942.

L’histoire retiendra que le 21 mai 2013, le Mali est parti à Waterloo comme ce fut le cas de Napoléon Bonaparte dans cette petite commune de Belgique le 18 juin 1815. Et ce fut la fin du rêve impérial de domination mondiale d’un despote qui n’était ni César ni Pompée. Tout comme lui, les Maliens viennent de boire le calice jusqu’à la lie à cause de l’irresponsabilité de leurs dirigeants. Aucun Malien n’a dormi à l’annonce de la triste nouvelle. Il y a des défaites qui ont l’arrière-goût amer de la quinine. A présent voilà un peuple humilié, blessé dans sa dignité, bafoué dans son orgueil. Qui avait dit  » pour l’honneur du Mali, le bonheur des Maliens  » ? A l’heure des comptes, il faut abandonner les slogans creux, les discours sans lendemain, les envolées lyriques.  » IBK d’abord, le Mali ensuite » c’est désormais la nouvelle devise du sultan de Sébénicoro. Comment peut-on envoyer à la boucherie une armée sous équipée et mal formée sachant bien que l’ennemi a une forte tradition de guérilla de surcroit sur un terrain qu’il maitrise parfaitement. Ce n’est pas la faute à l’Etat-major car contrairement à ce qu’il a dit, Mara n’avait aucun redressement à faire à moins de se redresser lui-même. Dans cette malheureuse affaire, Boubèye le maillon faible de la chaine a été l’agneau du sacrifice. C’est par lui que le malheur est arrivé. Nous suivons une pintade qui a le cou tordu et qui nous mène tout droit dans le ravin. Pour laver l’affront qui lui a été fait à Kidal, Mara a voulu immédiatement prendre sa revanche sur les hors-la-loi du désert. Il a ignoré superbement que la vengeance est un plat qui se mange froid. Blessé dans son orgueil et dans son amour propre il nous a jetés tous dans la gueule du loup.

C’est une réaction épidermique propre à l’homme mais qui ne laisse aucune place à la raison. De l’inopportunité de son voyage dans la capitale de l’Adrar des Ifoghas on n’en dira jamais assez. Il savait les risques qu’il prenait vu le précédent de Tatam Ly mais il a voulu aller se pavaner comme un paon dans la basse-cour. Les conséquences de sa mésaventure sont à présent palpables avec le recul de la paix et la surenchère des terroristes. Tout le peuple malien est témoin qu’à son retour de Kidal, le premier ministre était sur le pied de guerre. Ses déclarations martiales laissaient entrevoir qu’il allait illico presto en découdre avec les groupes armés. Et tout le peuple malien savait que l’expédition était imminente. En tout cas si elle avait réussi, l’opération aurait un double avantage : rétablir notre honneur et notre dignité et régler définitivement le cas de Kidal. A contrario le premier des ministres maliens est obligé aujourd’hui de faire contre mauvaise fortune bon cœur. Il s’est même mué en bon samaritain de la paix en ne parlant que de négociation. Le faucon est-il devenu colombe ? Tant mieux si cet apprenti sorcier murit à l’épreuve du pouvoir. Mais c’est Soumaila Cissé qui a tiré la leçon de l’histoire : IBK serait-il un général sans troupe au point que sa propre armée lui échappe ?

Mamadou L DOUMBIA MLD

SOURCE: L’Indépendant
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