Au cours de la 3e journée de sa mission dans la Région de Mopti, le Premier ministre Boubou CISSE s’est rendu, ce vendredi, dans les localités de Bankass et de Koro. Dans une maîtrise parfaite du timing, il a fait une annonce forte : « je vais déployer nos forces de défense et de sécurité sur le terrain pour un maillage beaucoup plus important, a déclaré le chef du gouvernement.
Pratiquement 3 600 hommes vont monter. Sur les 7 derniers jours, déjà 1 500 sont montés et ceux-ci seront complétés avec 2 000 autres hommes qui vont arriver dans les prochains jours et les semaines à venir. » Dans des localités baignant dans un climat anxiogène, les populations ne pouvaient pas attendre moins d’un Premier ministre à qui l’une des missions prioritaires dévolues par le Président de la République, lors du Conseil des ministres inaugural du Gouvernement, le 8 mai dernier, est : ‘’d’assurer la sécurité des personnes et de leurs biens sur l’ensemble du territoire national’’.
Selon le rapport de OCHA, publié, le 1er juillet 2019, les violences répétitives et de plus en plus meurtrières avec des scènes atroces ont fait plus de 600 tués parmi les civils depuis le début de l’année dans les attaques perpétrées principalement dans la région de Mopti faisant de cette région l’épicentre de l’insécurité avec près de 100 attaques enregistrées, selon d’autres sources.
« De nombreux villages se sont presque vidés de leur population et la vie de milliers de civils est en danger dans les zones de conflits (…) » révèle Mme Mbaranga Gasarabwé, Coordonnatrice humanitaire pour le Mali.
Face à ce tableau apocalyptique, autant l’annonce du Chef du Gouvernement est un réconfort, autant elle interroge. En effet, elle révèle la reconnaissance par les plus hautes autorités du pays que l’une des causes de la persistance de l’insécurité est un déficit d’effectifs. Aussi, la décision de ne déployer les renforts militaires qu’à la faveur de cette visite primatoriale pourrait contenir une bonne dose de populisme et de cynisme. Bien sûr que BC est à bonne école de son illustre prédécesseur, SBM qui a fait un show similaire à Tombouctou. Mais tout de même, servir les renforts au gré des visites interroge sur le niveau de conscience de la gravité de la situation sécuritaire.
De même, un pays pris à la gorge par les terroristes n’a pas besoin d’un one man show d’un Premier ministre qui annonce au monde entier (bien sûr dont les ennemis du Mali) les effectifs qui seront mobilisés dans un délai connu. Ce qu’on qualifierait en d’autres circonstances de divulgation d’informations (de secrets) militaires.
À ce rythme, il ne resterait plus qu’à annoncer le type d’armement qu’emporteront les militaires qui semblent sortir d’un chapeau de magicien.
En réalité, il importe moins aux Maliens les annonces tapageuses que les nouvelles de neutralisations des jihatistes, d’arrêt des conflits intercommunautaires…
Mais, au sommet, tout porte à croire que les dividendes politiques sont ce qu’il y a de vital. Tant pis pour l’efficience.
PAR BERTIN DAKOUO