Le 14 novembre 2023 sera inscrit en lettres d’or dans les annales de l’histoire moderne du Mali, car il marque la date du retour de la région rebelle de Kidal dans le giron du Mali. Que de chemins parcourus, que d’obstacles et écueils surmontés pour arriver à cette étape, loin d’être une fin en soi, mais plutôt une étape importante dans le long processus de pacification et pour le recouvrement de l’intégrité territoriale. Les maliens sont fiers de leur armée, avec à sa tête le Colonel Assimi Goita, qui vient, au prix du sang, donner le sourire, la joie et l’allégresse à un peuple qui a attendu pendant plus de 11 ans la libération de Kidal des mains des rebelles. Va-t-on céder à un triomphalisme en renonçant au dialogue pour faire venir certains égarés et éviter un enlisement du conflit ? Doit-on également prendre au sérieux la menace du CSP- PSD qui dit avoir quitté la ville de Kidal par stratégie, mais n’y renonce pas ?
Le mardi 14 novembre toutes les grandes villes du Mali ont vibré au son de l’hymne national et aux chansons à la gloire de l’armée malienne, en général et du Colonel Assimi Goita en particulier, après l’annonce officielle de l’entrée à Kidal par les FAMA. Cette nouvelle a été comme un rêve de plus d’une décennie qui s’est réalisé. Kidal la rebelle, Kidal l’insurgée, Kidal l’indépendantiste, Kidal le serpent, Kidal la terroriste, la liste des qualificatifs est loin d’être exhaustive, cette ville qui est la capitale de la 8ième région administrative du Mali était devenue une énigme insondable et pourtant son histoire est étroitement liée à celle de toutes les autres régions du Mali. Comme pour dire qu’elle est loin d’être une terre étrangère au Mali, bien qu’elle est occupée par des arabo berbères, des tamasheqs qui sont de peau blanche. C’est d’ailleurs cet aspect racial qui semble convaincre certains à dire que Kidal n’est pas malienne. Pour rappel le sous-développement et la minorité raciale blanche ont été les deux fonds de commerce pour certains rebelles Touaregs pour non seulement convaincre une partie de la communauté internationale, mais aussi et surtout certains voisins comme l’Algérie et la Mauritanie qui n’ont été du côté du Mali que du bout des lèvres. C’est pourquoi cette victoire de l’armée n‘est qu’une étape, car les « terroristes » ne s’avouent pas vaincus et ne semblent pas non plus livrer tous leurs secrets c’est pourquoi celui qui désormais considéré comme le héros du 14 novembre 2023, à savoir le colonel Assimi Goita a eu le triomphe modeste en déclarant que la guerre n’est pas terminée.
Pourquoi Assimi Goita est-il le héros du 14 novembre ?
Cette victoire est incontestablement celle du Colonel Assimi Goita, parce qu’il y a cru en dépit des inquiétudes soulevées par une partie de la Communauté internationale et malgré la sonnette d’alarme tirée par les organisations des Droits de l’Homme. Donc il est le héros de ce 14 novembre 2023 qui consacre le retour de Kidal dans le giron de l’Etat malien. Et par cette prouesse il vient d’écrire l’une des pages les plus glorieuses de l’histoire moderne de notre pays. Son nom sera inscrit en lettres d’or dans les annales des hauts faits du Mali. Certains thuriféraires de la transition le comparent à Soundiata Keita qui a unifié l’empire du Mali qui était des petits royaumes éparpillés et vulnérables. Autres temps autres mœurs, ce qui est sûr c’est qu’il fait désormais partie des héros qui ont marqué l’histoire du Mali.
Va-t-on céder à un triomphalisme en renonçant au dialogue pour faire venir certains égarés et éviter un enlisement du conflit ?
Sans nul doute que non, car le Colonel Assimi Goita est convaincu que la guerre est loin d’être terminée et que l’ennemi est à la fois coriace et rusé. Donc pour éviter un enlisement de ce conflit il demeure indispensable d’ouvrir la voie du dialogue. Cette option aura comme avantage non seulement d’isoler les récalcitrants, mais aussi et surtout d’éviter d’entretenir une guerre qui va engloutir et nos ressources financières et celles humaines. En ce cédant pas au triomphalisme les autorités chercheront, à travers une diplomatie dynamique et proactive, d’impliquer les voisins immédiats surtout ceux qui partagent les plus longues frontières avec le Mali, à savoir la Mauritanie et l’Algérie, ensuite se réconcilier avec tous les autres pays de la sous-région et même de la communauté internationale. Ce choix diplomatique aura comme avantage d’isoler les rebelles qui, du reste seraient en train d’user de cette voie pour demander de l’aide afin de « se libérer du joug de l’occupant qu’est celui du Mali ». Donc pas de triomphalisme, mais l’heure doit être à la réflexion pour contre carrer tous les stratagèmes que l’ennemi pourrait être amené à employer.
Doit-on également prendre au sérieux la menace du CSP- PSD qui dit avoir quitté la ville de Kidal par stratégie, mais n’y renonce pas ?
Sans nul doute qu’il faut prendre très au sérieux la menace à peine voilée du CSP-PSD qui, à travers un communiqué, dit avoir quitté la ville de Kidal par stratégie, mais n’a pas renoncé à son objectif. Ce communiqué en dit surtout long quand on sait que les rebelles sont loin d’être seuls, ils ont des soutiens de taille qui détiennent le nerf de la guerre, à savoir les pays du Golf où le pétrodollar circule. Que dire de leurs anciens alliés qui ont certes officiellement quitté le Mali, mais qui disposent encore des voies et moyens pour soutenir, surtout que l’enjeu de Kidal n’est pas que sécuritaire il est également géostratégique voir économique. Donc les rebelles et leurs alliés sont prêts à mener une guerre d’usure qui pourrait durer 20 à 30 ans. C’est pourquoi il est une impérieuse nécessité d’utiliser maintenant la voie diplomatique pour isoler les rebelles et leurs soutiens. Sinon le tout militaire serait difficilement la solution à un conflit du genre.
En somme, selon certains maliens l’armée n’a pas encore coupé la tête du serpent, mais c’est juste sa queue qui serait coupée, donc il demeure encore nocif et garderait probablement tous ses moyens de combat. Donc après cette étape il est plus que nécessaire de jouer sur d’autres tableaux pour pérenniser ces acquis et se tourner vers le développement de l’ensemble du pays.
Youssouf Sissoko
L’Alternance