Elles voulaient à elles seules diriger les affaires du pays sans l’implication des acteurs politiques acquis aux réformes politiques et institutionnelles, mais face à la réalité du terrain et à la complexité des tâches, les autorités de la transition viennent de jeter l’éponge. C’est dans ce sauve-qui peut que le Premier ministre Moctar Ouane est parti à la rencontre de la classe politique malienne, mercredi dernier.
Vilipendés, jetés à la vindicte populaire, accusés de la descente aux enfers du Mali par les thuriféraires, les opportunistes, les arrivistes de la 25ème heure et qui sont parvenus à gagner le cœur des putschistes du 18 août 2020, les hommes politiques professionnels ont gardé le cap et sont restés sur leur position à ne pas répondre aux provocations des amateurs politiques, malgré leur mise à l’écart de la gestion de la transition. Comme on a coutume de le dire le temps est le meilleur juge. Et il vient de donner raison à la classe politique (loin d’accorder un blanc- seing à elle). En désespoir de cause, le Premier ministre Moctar Ouane est parti à la rencontre de la classe politique. Il a été question de sauver ce qui peut être encore sauvé du reste de la transition.
Nommés à la tête des deux des trois (03) organes de la transition pour une période de dix-huit (18) mois, le président de la transition, Bah N’Daw et le Premier ministre Moctar Ouane sont aujourd’hui rattrapés par leur manque de vision et leur pilotage à vue des affaires de l’État. Six (06) mois après, ils viennent de comprendre que la gestion clanique et méprisante qu’ils ont voulu imprimer à la marche de la transition a atteint ses limites objectives. Elle leur a fait savoir qu’on ne peut pas diriger un pays (surtout en période de transition) en laissant sur le quai certains fils et filles du pays au nom d’une prétendue revanche pour l’avènement d’une nouvelle race d’hommes politiques aussi prédateurs que les précédents.
C’est dans ce cadre qu’il faut situer, mercredi dernier, la rencontre entre le Premier ministre et la classe politique. Il a souhaité l’implication de la classe politique pour une transition apaisée et réussie. C’est ainsi qu’en constat d’échec que Moctar Ouane déclare ceci: «Ma conviction est que la classe politique a un rôle de premier plan à jouer dans la promotion de notre jeune démocratie et une place centrale dans les réformes politiques et institutionnelles que nous attendons tous avec impatience».
Il convient de dire aujourd’hui que la gestion solitaire de la transition est à bout de souffle. Dans la mesure où, depuis la nomination des autorités de la transition, c’est le surplace. Rien ne bouge et rien n’évolue conformément aux aspirations des Maliens qui ont battu le pavé pour chasser le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) en août 2020 pour l’avènement d’un Mali Nouveau. Mais contre toute attente, les fleurs n’ont pas donné les fruits escomptés. Le Mali nouveau annoncé est presque dans l’impasse du fait de peu d’imagination des membres du gouvernement à proposer un projet fédérateur autour des réformes pour faire sortir notre pays de l’ornière. Mais aussi du mépris affiché par le président de la transition qui se dit être au-dessus de la mêlée et de ne pas être politique, malgré le poste de président hautement politique qu’il occupe au nom du peuple malien.
À la recherche d’alliés
Avec le temps, les autorités de la transition ont compris qu’elles ont composé avec des gens dont une plume d’oiseau est plus lourde que leur poids politique. Et la sortie médiatique de l’iman Mahomoud Dicko est tombée comme un pavé dans la marre. Son Manifeste pour la refondation du Mali ne fait pas de cadeau à la gestion de la transition. On a l’impression que la rupture est consommée entre les autorités de la transition et l’imam Dicko.
Si tel est le cas, les autorités de la transition semblent être à la recherche d’autres alliés sûrs pour conduire le reste de la transition. Et avec le cadre de concertation que le Premier ministre veut instaurer avec la classe politique, il n’est pas exclu que dans les jours à venir qu’on assiste à la formation d’un nouveau gouvernement avec les représentants des partis politiques exclus au début de la transition. Et avec ce nouveau soutien politique et populaire, les réformes pourraient voir le bout du tunnel au grand bonheur des Maliens qui veulent le changement pour un Mali débarrassé des bandits à col blanc dont les actions ont été nuisibles au développement de notre pays, depuis le 26 mars 1991.
Yoro SOW
Source: Inter De Bamako