Le 22 septembre 1960 après 105 ans de présence coloniale la France tournait le dos au Soudan français et cela suite à l’éphémère fédération du Mali qui a regroupé le Mali et le Sénégal. Et le discours du tout nouveau président de la République du Mali Modibo Keita a suscité un vent d’espoir. En effet dans des propos au ton martial, le numéro 1 malien de l’époque sous un tonnerre d’applaudissements déclarait : « le nom Mali continuera a raisonné comme un gong sur la conscience de tous ceux qui ont œuvré à l’éclatement de la fédération du Mali ou qui s’en sont réjouis ».
Un message clair à l’endroit de la France et de ses suppôts africains qui ont manœuvré en coulisse pour démanteler cet outil d’intégration qui allait servir de rampe de lancement pour les Etats Unis d’Afrique un vœu pieux des grands panafricanistes. Il fallait briser tout rêve qui allait faire du continent africain un concurrent sérieux des anciennes puissances coloniales sur le déclin. Aussi rares sont les dirigeants africains partisans d’une Afrique forte qui échapperont au complot de l’occident. Il faut dire que la race aryenne ne pouvait admettre une Afrique puissante à 15 kms de l’Europe en passant par le droit de Gibraltar. Une véritable course contre la montre sera engagée pour permettre la nouvelle colonisation de l’Afrique par le truchement du néocolonialisme. La première stratégie adoptée sans conteste la guerre de sécession. La première nation à en faire les frais fut sans conteste l’ex Congo belge Etat continent qui a bénéficié de la générosité de la nature à cause de ses énormes potentialités. Les historiens le disent l’uranium qui a servi à fabriquer les deux bombes atomiques qui ont endeuillé l’empire du soleil Levant a pour origine la mine d’uranium de Shinkolobwe en République Démocratique du Congo l’ex Zaïre du temps de la splendeur du président fondateur Joseph Désire Mobutu. Le roi des belges qui a été propriétaire de la RDC avant de le rétrocéder à la Belgique a commis un véritable génocide par le système du travail forcé. Ce faisant lors de la proclamation de l’indépendance de la RDC, le principal leader nationaliste du pays Patrice Emmery Lumumba n’est pas allé de main morte pour s’en prendre au système colonial et à l’Etat belge. En présence du roi Baudouin, il a justifié la lutte du Congo pour l’indépendance qui est proclamé le 30 juin 1960. Mal lui en a pris et il allait en payer le prix fort. A peine le Congo Léopoldville devenu indépendant les milieux d’affaires occidentaux s’agitent et travaillent à morceler la RDC. Comme on le sait pour des pareilles missions on peut aisément s’appuyer sur un autre noir pour faire le sale boulot. Le choix est vite fait et il est porté sur Moise Tshombe de la CONAKAT qui travailla à la sécession du Katanga qui devient théoriquement indépendant le11 juillet 1960 au même moment Antoine Gizenga, un proche de Lumumba assassiné par la CIA et Mobutu va proclamer l’indépendance du Congo orientale. Curieusement les troupes de l’ONU qui avaient refusé de soutenir Lumumba parce qu’il a fait appel aux soviétiques vont renverser la vapeur en faveur de Mobutu et de Joseph Kasa-Vubu. Une aubaine pour les milieux d’affaires occidentaux qui peuvent désormais piller à volonté les richesses de cet immense pays. Rappelons que le secrétaire général de l’ONU de l’époque Dag Hammarskjöld trouvera la mort au Congo belge dans des circonstances troubles Pour éviter toute surprise désagréable les occidentaux vont fermer les yeux suite à la prise du pouvoir par Mobutu qui travaillera à servir les intérêts occidentaux. Il est lâché amis par ses anciens et doit fuir Kinshasa en 1997 après la victoire de Laurent Désire Kabila à la tête de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) soutenue par le Rwanda, l’Ouganda et l’Angola qui voulait la peau de Jonas Savimbi soutenu par Mobutu. Cette chute est la conséquence directe du génocide rwandais qui a vu l’assassinat du président Juvénal Habyarimana du Rwanda très proche de Mobutu en compagnie de son homologue Burundais Cyprien Ntaryamira. D’autres pays comme le Soudan, l’Ethiopie, la Somalie connaitront le même sort. Pour le cas du Mali dès 1963 des indépendantistes sont signalés dans les environs de Kidal. La raison est toute simple la France qui ne voulait pas abandonner son projet d’Organisation commune des Etats riverains du Sahara voyait d’un mauvais œil l’indépendance des Etats de la région. Partant elle fera de son mieux pour semer le désordre sachant bien que cette partie qui était sous sa domination dispose de richesses fabuleuses à savoir pétrole , uranium et autres terres rares. Rappelons que Paris qui tenait à garder l’Algérie par tous les moyens s’efforcera de punir tout pays qui apportera gîte et assistance au Front de libération national, un groupe nationaliste qui entendait conquérir l’indépendance de l’Algérie par tous les moyens. Durant cette lutte le Mali qui venait d’accéder à l’indépendance soutiendra l’Algérie par tous les moyens. Les nationalistes n’avaient pas tort d’engager la lutte car après deux essais nucléaires Gerboise bleu et Béryl le Sud-algérien subira les affres des effets radioactifs. Pour avoir soutenu Ahmed Ben Bella, le président Modibo Keita devait s’attendre à sa chute ce qui arrivera le 19 novembre 1968. En bon visionnaire, il a demandé à son frère N’Kwame N’Krumah qui venait tout juste d’être renversé au Ghana de rejoindre le président Ahmed Sékou Toure car les impérialistes ne tarderont pas avoir raison sur lui. Il est renversé le 19 novembre 1968. Le prince des ténèbres Jacques Foccart qui dirigera la cellule Afrique de l’Elysée pendant plus de deux décennies liquidera plusieurs régimes. Le 22 novembre 1970 Sékou Toure échappera de justesse à un coup de force à Conakry. Après l’arme de la sécession place aux conflits frontaliers. Pour éviter tout affrontement armé entre les jeunes Etats, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) avait plaidé pour le maintien des frontières héritées de la colonisation mais il fallait compter avec le système racial et tribal que les anciennes puissances coloniales avaient su entretenir. C’est le Maroc et l’Algérie qui seront les premiers à s’affronter pour le contrôle du Tindouf. Peu après c’est l’Ethiopie qui avait annexé l’Erythrée qui allait se battre contre la Somalie à propos de l’Ogaden deux dictateurs étaient à la manœuvre Colonel Mengistu Hailé Mariam et le général Mohamed Siad barre, les deux seront chasser par des rebellions armées. Deux conflits armés vont opposer le Mali à la Haute Volta( BF) et ensuite au Burkina Faso à propos de la bande l’Agacher. Le Tchad et la Libye connaitront le même sort, les deux pays vont très bien se battre à propos de la bande d’Aouzou . Même le Sénégal réputé havre de paix va se mesurer à la Mauritanie dans un bref affrontement à propos de la vallée de Rosso. Le conflit frontalier le plus meurtrier sera celui qui va opposer l’Ethiopie à l’Erythrée qui venait de s’affranchir de la domination d’Addis – Abeba. Les questions tribales et ethniques réapparaissent avec le vent de la démocratie. Aussi une terrible guerre civile va éclater au Liberia qui sera sanctionnée par la mort tragique de Samuel Doe assassiné par Prince Johnson. C’est les pays à deux ethnies qui connaitront les plus grandes tragédies à savoir le Rwanda et le Burundi. Si au Burundi le pire a été évité au Rwanda la rivalité entre Hutu et Tutsi aboutira à un génocide qui fera un million de morts. Cette guerre civile verra la victoire du Front patriotique rwandais dirigé par Paul Kagamé un Tutsi. Cette guerre civile sera à l’origine de la déstabilisation de l’est de la RDC qui se poursuit encore de nos jours. Les effets dévastateurs de l’impérialisme se poursuivent au Sahel suite à la mort honteuse de Kadhafi avec son lot de conflit ethnique et djihadiste. Il faut dire qu’après plus de 30 ans de démocratie, les militaires sont revenus à la rescousse dans certains pays du Sahel pour dit-on remettre les points sur les « I ». Mais, il faut le dire les treillis des années 1970 et des années 1980 n’ont pas fait grand-chose.
Badou S. Koba
Source: Le Triomphe