Dans l’adolescence, chacun de nous projette d’exercer tel ou tel métier. Soit par amour, soit par idolâtrie, soit par instinct enfantin. Tiégoum Boubèye Maïga, lui, ambitionnait d’être magistrat ou journaliste. Ce qui explique son orientation après le bac au lycée franco-arabe de Tombouctou. A l’Ecole nationale d’administration (ENA), section sciences Juridiques, la voie est toute tracée pour porter la robe de juge.
Seulement voilà : son cycle est écourté. Son frère aîné feu Soumeylou Boubèye Maïga l’informe de l’ouverture du concours d’entrée au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Tiégoum saute sur l’occasion, quitte le calvaire des étudiants maliens, liés aux retards de trois à quatre mois de bourses. Il réussit brillamment le concours d’entrée dans la prestigieuse école de journalisme.
Déclic
Etudiant en 2e année en vacances à Bamako, TBM rencontre Alpha Oumar Konaré en compagnie de son grand frère Soumeylou au siège de la Coopérative Culturelle Jamana. Ils discutent de la situation du pays. Convaincu par la capacité d’analyse de Tiégoum et son engagement militant:, Alpha l´informe de son projet de création d’un journal d’informations générales, “Les Échos”. Mieux, il le convainc à le rejoindre dès sa sortie du Cesti pour lancer le journal.
Ainsi, de 1989 à 1993, Tiégoum est rédacteur en chef dudit journal qui, dès son premier numéro, plante le décor dans son éditorial : l´information et la dénonciation. C’est de cette audace de la rédaction dirigée par TBM que le journal “Les Echos” tire sa notoriété, et fût même un point de mire pour d´autres journaux. Au départ du dir-pub Alpha Oumar Konaré, devenu président de la République, Tiégoum finit par assumer d´autres fonctions:
1994-2000 : Directeur de publication du journal “Les Echos”
2000-2002 : Coordinateur de toutes les publications de la Coopérative Jamana (un quotidien, un hebdomadaire, deux revues, un journal en langue nationale, un journal régional)
2002 à 2007 : Chroniqueur éditorialiste au journal “Les Echos”.
Après tout ce parcours au journal “Les Echos” TBM décide de donner une nouvelle orientation à sa carrière de journaliste. Il crée son propre journal “La Nouvelle République”. A partir de 2012, il entame une longue et riche carrière administrative comme chef de cabinet au ministère de l’Industrie et du Commerce (2012-2017). Durant cette même période, il a occupé aussi les mêmes fonctions au ministère des Finances (de juin à septembre 2013).
C’est surtout son passage comme conseiller technique chargé de la communication à la présidence de la République, qui va le hisser au sommet de l’administration. Comment cela est arrivé ? Qu’est-ce que le président lui a dit concrètement ? “A la clôture du sommet du G5 Sahel à Bamako en juillet 2017, le secrétaire général adjoint de la présidence m’invite à lui envoyer mon CV et m’annonce que le président a décidé de me confier la communication de l’institution. IBK devait voyager incessamment pour un sommet de l’Union africaine, il tenait à signer mon décret avant de partir. A son retour nous avons eu un tête à tête où il m’a donné les directives par rapport à la mission, qui m’attendait. “Je veux que nos réussites soient sues” me dit IBK. Il me dressa la liste d’une bonne dizaine de ministères avec lesquels il fallait travailler pour mettre en exergue les réalisations et apporter de la visibilité à leurs actions. Les réformes au sein de l’armée, les acquisitions d’équipements, l’amélioration des conditions de vie des forces de défense et de sécurité, la prise en charge des blessés de guerres et des ayants droits de ceux qui perdaient la vie en mission commandée ; les énormes investissements au niveau du secteur agricole où le budget est passé à 15% ; l’amélioration des conditions des travailleurs; une meilleure représentation des femmes dans les fonctions électives et administratives, etc, ce sont là des domaines qui avaient besoin d’être mieux connus des populations. Dieu merci tout s’est bien passé”.
Il est évident qu’un conseiller à la communication peut jouer un grand rôle auprès du chef de l’Etat. Mais fallait-il que le président se défasse de la complaisance pour l’écouter. L’on se rappelle, le 22 mars 1991 quand Bamako était en ébullition avec des morts et des blessés, Tiona Mathieu Koné a pris la bonne initiative. En sa qualité de conseiller à la communication de feu le président Moussa Traoré, il a fait passer un communiqué sur Radio-Mali, annonçant que le chef de l’Etat s’adressera à la nation d’un moment à l’autre.
Au procès crimes de sang, Tiona Mathieu a dit tout l’effort qu’il a fourni pour que Moussa Traoré accepte de faire un discours. Alors est-ce qu’il est arrivé que le président IBK soit conseillé dans ce sens par son chargé de communication ? TBM soutient que la Cellule de communication proposait souvent des discours en fonction de l’actualité. L’idée est d’abord débattue avec le Secrétaire général avant d’informer le Président qui peut accepter ou pas. Face à certains événements, le Président n’hésite pas à aligner les discours tant en français qu’en bamanan (lors des massacres dont Ogossagou ou lors du mouvement An tè a Bana). Selon Tiégoum, IBK l’a assuré dès le départ de sa disponibilité, “la porte de mon bureau t’est ouverte”. Conseiller du Président certes mais Tiégoum est resté journaliste dans l’âme même à Koulouba. “Quand j’ai des informations que j’ai recoupées au préalable j’informe IBK. Très souvent il me demande d’interpeller le ministre en charge de l’information pour qu’il trouve une solution”.
Grand consultant
Tiégoum Boubèye Maïga n’est pas seulement le journaliste qui écrit des articles de presse. Il s’est aussi vêtu du manteau de consultant sous diverses formes.
Le bicéphalisme à l’Assep
Cependant sur notre insistance, TBM a donné son avis sur une situation déshonorable qui frappe notre famille. Ces derniers temps les journalistes sont divisés avec deux bureaux de l’Assep. En tant que membre fondateur de ce regroupement de presse, il regrette cette crise qui ne se justifie pas. Parce que les deux tendances étaient en compétition, Ousmane Daou ayant gagné les élections, l’autre camp en bon démocrate doit respecter les résultats sortis des urnes. Ce qui n’a pas été le cas selon notre doyen.
Pour lui, l’existence de deux bureaux n’est pas une bonne image pour la presse malienne. Plus inquiétant, Tiégoum ne voit pas de solution immédiate. D’autant plus que chaque camp cherche à se légitimer par des audiences par-ci par-là. Aujourd’hui, les intérêts de la presse ont tendance à voler en éclats. Le mieux serait que les deux protagonistes se parlent. Parce qu´il ne peut pas y avoir deux bureaux Assep.
Depuis son départ de la présidence, Tiégoum Boubèye Maïga s’occupe de son journal, et de son agence de communication créée en octobre 2000. Il est marié. Dans la vie, il aime la lecture, la musique et le sport. Il déteste le mensonge et les hommes sans conviction.
O. Roger (00223) 63882423
Source: Aujourd’hui-Mali