otre invité était sur un nuage, euphorique lors de la réalisation de son interview. Le Djoliba venait en effet d’arracher sa qualification pour la phase de poule de la Ligue des champions, une première historique au Mali. Et d’exprime son sentiment : “Je suis animé d’un sentiment de joie, parce que c’est un événement et une qualification historique. Les jeunes ont réussi à réaliser l’ambition de toute une nation, au-delà même de la famille du Djoliba. Bref c’est un grand plaisir, félicitations et merci aux jeunes”.
Oumar Bagayoko était un joueur talentueux au physique impressionnant. Cela poussait d’ailleurs notre professeur d’éducation physique, Diaby Djan, à piétiner ses principes calqués sur la discipline. Oui, Oumar Bagayoko était un élément clé de l’équipe du second cycle de Darsalam. Aussi le prof d’EPS le ménageait à cause de son talent et l’espoir qu’il fondait sur lui. Véritable destructeur de défenses, son audace et son agressivité sur l’adversaire rappelaient cet autre attaquant du Djoliba : Seyba Coulibaly qui soutenait qu’il n’y a pas de bon défenseur, mais de mauvais attaquant.
Oumar Bagayoko jouait le rôle de distributeur, mais au Djoliba l’entraineur Mory Goïta l’a placé au poste d’avant-centre. Il estimait que ses qualités techniques étaient plus profitables en attaque qu’au milieu de terrain. Comment il a valorisé son talent ?
Il est quand même corollaire qu’au début des années 1980 seuls le Djoliba et le Stade malien disposaient d’un centre de formation dirigé respectivement par Aly Koïta dit Faye et Lamine Traoré dit Gilles. On les intégrait volontairement ou par cooptation à la suite d’un match amical contre l’un des centres. Cela ne fut pas le cas d’Oumar Bagayoko. Il a commencé à taper dans le ballon dans la cour des TP (actuel ministère des Transports et des Infrastructures). Son arrivée au second cycle en octobre 1985 va dessiner les sillons de sa carrière de footballeur. Autrement dit c’est à ce niveau qu’il s’est beaucoup distingué lors des compétitions interscolaires. Faye par le plus pur hasard assistait à un match qui opposait notre établissement au Camp Digue sur le terrain du Badialan I à côté des rails.
Ce jour-là, le jeunot artisan de la victoire de l’école de Darsalam, a aussi émerveillé le public. Le technicien djolibiste à la fin du match le prit de côté et l’invita à intégrer le centre de formation des Rouges de Bamako. Certes, il avait l’ambition de jouer dans ce club, mais comment s’y prendre sans un soutien au préalable ? La perche tendue par Aly Koïta dit Faye fut alors une aubaine à saisir absolument. C’est-à-dire consentir un sacrifice, se forger une hygiène de vie et être sérieux pour porter le maillot des Rouges au haut niveau. Tout le reste découlera de cette ambition.
Effectivement, il a œuvré dans le bon sens et signera sa première sélection en équipe nationale dès 1991 avec l’Egyptien Amany. Son successeur, Molobaly Sissoko, l’investira aussi de sa confiance pour les éliminatoires de la Can/Tunis-1994. Malheureusement Oumar Bakayoko n’ira pas au bout de cette compétition. Un mal de dos a entravé sa saison et l’éloignera du terrain pendant au moins un an. Le coach Mamadou Kéita dit Capi, ignorant que le jeunot était malade exprimera son regret de ne l’avoir pas connu avant la Can. Le technicien intransigeant avait également bâti son système offensif autour de lui jusqu’à son limogeage.
A l’ombre des “géants”
Entre-temps Oumar a décroché un contrat à l’Austria de Vienne, en Autriche. Six mois après il fit les frais du changement intervenu au centre de pilotage du club. Les nouveaux responsables promettaient de le rappeler incessamment. Il ne se donnera pas le temps de nourrir un espoir par rapport à cette promesse incertaine. A la faveur d’un match amical international des Aigles en Egypte, Oumar Bagayoko a signé un contrat de quatre ans (1994-1998) au Fahaheel Club de Koweït, puis au Tadamoon pour un an (1998-1999) et Kaitan (1999-2001).
Après cette pérégrination, il mit le cap sur l’Arabie saoudite où il a joué à El Gazoom pendant un an, avant de continuer sur la Grèce pour un périple de neuf ans. Il prit sa retraite en 2011, avec la ferme volonté de jouer une saison supplémentaire au Djoliba, son club de cœur. Mais, l’âge et la fatigue des nerfs auront raison de sa volonté. Il a mis un terme à sa carrière, laquelle a commencé en 1989 dans la catégorie junior des Rouges de Bamako en compagnie des Makan Kéita, Oumar Ly, Alassane Diallo dit Tom Foot, Alamamy Konaté dit Konan, Oumar Traoré dit Rubesch, Dédé Tamboura. Il est important de savoir que ces jeunots n’ont passé qu’une saison à ce niveau.
L’année suivante ils sont montés directement en équipe première, où ils se contenteront des bouts de matches pour confirmer leur talent. A l’époque le médian djolibiste était tenu par feu Moussa Koné, Cheick Diallo et Dédé Tamboura. Donc il n’était pas facile pour ces juniors de gagner une place de titulaire. Avec l’arrivée de l’entraîneur Mory Goïta, Oumar Bagayoko est devenu un élément incontournable de l’attaque du Djoliba. Cette confiance du nouveau coach lui ouvrira toutes les portes du bonheur, comme évoqué plus haut.
Notre héros de la semaine est marié et père d’une fille. Dans la vie il aime le sport, les films documentaires, les jeux de cartes. Il déteste le mensonge et l’hypocrisie. Qu’est-ce qui explique sa passion pour le Djoliba ? “Ma passion est innée. Tout enfant, de façon spontanée, épouse un club dans son cœur et grandit avec cet amour. Cela fût mon cas. Le fait d’être joueur a accentué cet amour, que vous qualifiez de passion”, nous a-t-il dit.
Au terme de sa riche et brillante carrière Oumar Bagayoko est devenu un encadreur à la suite de différentes formations et stages de perfectionnement. D’abord lors de la saison 2011-2012 il a assisté Moussa Kéita dit Dougoutigui, entraîneur de l’AS Bakaridjan. Ce qui lui a permis de comprendre beaucoup de choses dans la gestion d’un encadrement technique. Karounga Keïta dit Kéké lui demandera par la suite de revenir dans la famille. Une proposition qu’il a volontiers acceptée. Il occupe depuis 2013 différents postes dans la barre technique des Rouges, avant d’être nommé coordonnateur du centre de formation.
O Roger Sissoko
Source: Aujourd’hui-Mali