Maciré Diop n’avait pas cette grande taille pour expliquer son statut de gardien de but. Puisqu’il a opté pour ce poste par conviction, il s’est alors donner les moyens pour s’auto former afin de s’affirmer. Évoluant dans son adolescence à l’Africa Sport de Bolibana, comment déboulonner dans l’un des grands clubs de Bamako les portiers de renommée à l’époque : Sory Kourouma du Djoliba, Modibo Dix du Stade malien de Bamako et Seydou Guatigui de l’AS Réal.
La fougue de jeunesse ne lui permettait pas de se soucier d’une telle problématique. Parce que c’est une période pendant laquelle on se croit supérieur, tout en posant à tout bout de champ des actes pour attirer le regard de l’environnement. A ses débuts, Maciré Diop tenait à bout de bras l’Africa Sport dans les compétions inter quartiers. Selon lui, c’est très jeune qu’il décida spontanément de garder les buts. Pour cela chaque matin de bonheur, il s’entraînait seul pendant les vacances. Entre ces temps des années 1976, 1977 et 1978 et notre première rencontre, beaucoup d’eau a déjà coulé sous le pont. Cependant tel que nous l’avons découvert en 1983 à l’AS Réal de Bamako, il était un gardien malgré son statut de remplaçant qui avait le sens de l’anticipation. C’est à dire que rarement le ballon traversait sa zone de vérité, sans qu’il ne capte ou le renvoyer de loin d’un coup de poing. Autre qualité de Maciré Diop : des détentes dorsale et aérienne qui faisaient penser à Seydou Guatigui. En plus de tous ces atouts, il régnait en maître absolu sur le bastion défensif de son club, avec des directives pour symboliser la bonne compréhension dans l’axe central. En un mot, Maciré Diop était un gardien de but qui forçait l’admiration. En signant cette semaine dans la rubrique “Que sont-ils devenus ?”, l’une des tribunes de votre journal hebdomadaires, Aujourd’hui Mali, Maciré Diop s’offusque de la délocalisation des matches des Aigles du Mali. Il estime que cela est insoutenable et incompréhensif. Face à cette situation qu’il qualifie de grave, l’ancien international du Djoliba invite les autorités sportives à trouver les solutions idoines, pour rapprocher l’équipe nationale de son peuple.
En 1978 l’Algérie s’apprêtait à accueillir les 3es Jeux africains. C’est dans cette optique que le Mali projeta une école de football lors de la saison 1976-1977. Pour la circonstance une sélection à travers le district de Bamako a permis de constituer une équipe homogène de jeunes talents parmi lesquels Maciré Diop. Cette équipe fut internée au stade Omnisports pendant quelques semaines. Finalement ce bon projet vola en éclats pour des raisons diverses liées à un leadership entre les grands clubs, dont chacun voulait avoir le plus gros contingent.
Même le stage de deux semaines en Allemagne de cette équipe jeune a été annulé. Les cœurs meurtris, les jeunots se sont résignés tant bien quel mal. Ousmane Traoré dit Ousmanebleny (ancien international des Scorpions) qui faisait partie des encadreurs, n’a pas voulu jeter l’enfant avec l’eau du bain. Laisser tous ces jeunots talentueux à la merci de la rue serait un gâchis dans l’avenir pour le football malien. Il fera de son mieux pour diriger certains d’entre eux vers le centre de formation de l’AS Réal. Dans le lot, figurait Maciré Diop.
Dans la catégorie des jeunes du Réal, Maciré Diop s’arma de patience et se ravisa à conclure que chaque chose en son temps. Après deux ans son groupe profita du relâchement des aînés en fin de saison pour intégrer l’équipe senior. Seulement un jeune gardien de la trempe de Maciré Diop avec des qualités incontestables pouvait-il déclasser le titulaire des Scorpions, l’emblématique Seydou Traoré dit Guatigui ?
Voilà comment il est devenu un éternel réserviste au Réal, même lors de la finale de la Coupe du Mali en 1980 contre le Djoliba AC, défait par un but à zéro. Il s’est quand même fait valoir les quelques rares fois où il a été titulaire. Ce qui lui a valu d’ailleurs des convocations en équipe nationale. Mais des dirigeants réalistes, selon lui, seraient intervenus pour ne pas créer une frustration dans la famille réaliste.
Autrement dit, il fallait éviter de mettre Guatigui dans une situation inconfortable. Parce qu’il est évident que Maciré Diop se mettrait dans une autre posture après son passage en équipe nationale. Au bout des nerfs, l’incident d’Ouagadougou précipita son transfert au Djoliba. Il prit le soin de rencontrer l’entraîneur Karounga Kéita dit Kéké. D’emblée celui-ci lui tint un langage de vérité, mais très décourageant. Il faisait référence à la pléiade de gardiens de but dont disposait le Djoliba : Karamoko Diané, Mamadou Diarra dit Zami. La validation de son transfert dépendait alors de sa résignation comme troisième sinon quatrième gardien.
La Volonté de Dieu
Maciré Diop dit avoir accepté volontiers cette proposition de Kéké. Ce transfert au Djoliba a eu quand même le mérite de favoriser sa sélection en équipe nationale, pour les éliminatoires de la Can-1990. Mieux, il participa à deux tournois Cabral, avec une finale perdue face au Sénégal en 1988 en Guinée Bissau. C’est-à-dire qu’avant la fin de la saison il devint titulaire au Djoliba et rata la saison suivante un contrat au Gabon.
Feu Seyba Sangaré l’informera que Kéké n’a pas voulu le laisser partir pour ne pas créer un vide dans le club. Aucune réaction de sa part pour manifester sa désapprobation. Sur cette question Maciré Diop soutient qu’il n’est pas parti au Gabon, parce que le bon Dieu ne l’a pas voulu. Au Djoliba, il a remporté deux titres de champion (1988, 1990), tout en perdant trois finales de coupes du Mali (1988, 1989,1990). De toutes ces finales perdues, il retient une qui constitue son plus mauvais souvenir. Pas la défaite en tant que telle, mais l’interprétation qui en a été faite. Qu’est ce qui s’est passé ?
“Le Stade malien de Bamako a battu le Djoliba à la finale de 1988, par le score de trois buts à un. Pendant que j’avais de la peine à digérer ma déception, au même moment je faisais l’objet d’une accusation très grave : la corruption. Après le match de façon discrète des dirigeants m’ont filé pour savoir si je rencontrerai un dirigeant stadiste pour prendre l’argent du match vendu. Pourtant ce jour je suis effectivement sorti pour aller voir un ami. C’est là où j’ai été sauvé. Comment je l’ai su ? J’ai été informé par les mêmes supporters qui étaient chargés de me filer. Ils m’ont avoué avoir rendu compte fidèlement de tous mes mouvements durant le temps de la filature. Comment peut-on accuser un joueur d’avoir truqué un match, sans avoir la preuve palpable. Cela m’a fait très mal. Mais l’essentiel est que je sois blanchi, et surtout je ne me reproche absolument rien”.
Maciré Diop ne fait pas exception à la catégorie de joueurs qui tirent le diable par la queue pour survivre. Transitaire de formation, il a travaillé pendant longtemps dans une grande entreprise de transit jusqu’au coup d’Etat de 2012, où les activités ont pris un sérieux coup, occasionnant son chômage. A sa retraite footballistique en 1992, il rejoint l’encadrement technique du Centre Salif Kéita comme entraîneur des gardiens de buts. Il quittera ses fonctions à la suite de l’incompréhension entre les deux promoteurs (Salif Kéïta et Sékouba). Depuis lors il occupe les mêmes fonctions au Djoliba.
Maciré Diop est marié et père de quatre enfants.
O. Roger Tél (00223) 63 88 24 23
Source: Aujourd’hui-Mali