L’issue de la crise est liée au départ du président Jacob Zuma qui continue, jusque-là, à s’accrocher au pouvoir. Son parti, en perte de popularité, l’exhorte à partir, alors que les élections générales sont prévues en 2019.
Le président de la République sud-africaine, Jacob Zuma, s’accroche toujours au pouvoir et provoque ainsi la paralysie politique du pays. La direction de son parti, le Congrès national africain (ANC), exige son départ pour mettre fin à la crise. Elle a annulé, hier, ses engagements publics prévus dans la journée dans le cadre du centenaire de la naissance de la figure historique de l’ANC, Nelson Mandela.
En revanche, le discours du nouveau chef de l’ANC, élu en décembre, Cyril Ramaphosa, demain au Cap est maintenu. Récemment, le discours annuel du Président devant le Parlement avait été reporté, pour la première fois de l’histoire, à une date ultérieure.
La liste des scandales autour de Zuma discrédite le parti, à l’approche des élections générales de 2019. Pour endiguer la chute de popularité de l’ANC, le nouveau chef Cyril Ramaphosa, élu en décembre, tente d’obtenir au plus vite le départ du chef de l’Etat. Dimanche dernier, les six plus hauts responsables de l’ANC l’ont exhorté à démissionner. Mais il a refusé, comptant aller jusqu’à la fin de son second mandat qui expire en 2019. Il tente d’obtenir des garanties sur son immunité et celle des membres de sa famille impliqués dans plusieurs dossiers judiciaires.
Cette question met Cyril Ramaphosa dans l’embarras, sachant qu’il est élu à la tête du parti sur un programme de lutte contre la corruption. Si le président Zuma démissionne, il sera remplacé par C. Ramaphosa, vice-président de l’Afrique du Sud en exercice, pour un intérim de 30 jours maximum, le temps pour le Parlement d’élire un nouveau chef de l’Etat.
La présentation du budget est prévue pour le 21 février. Et le lendemain, le Parlement doit débattre d’une motion de défiance, la neuvième déposée contre le président Zuma depuis son arrivée au pouvoir. La dernière, en août, a échoué à 24 voix près. Les élections municipales d’août 2016 ont mis à nu la faiblesse l’ANC. Elections où il a subi un revers important en réalisant son plus mauvais score national depuis la fin de l’apartheid en 1994. Année où il est propulsé à la tête du pouvoir.
En effet, il a enregistré un score historiquement bas (moins de 54% au niveau national, contre 62% lors des élections locales de 2011) et perdu le contrôle de plusieurs grandes villes du pays, dont Johannesburg et la capitale Pretoria. Zuma est rendu responsable de cette défaite.
Le parti perd la confiance des populations et le chômage a atteint 27,7% dans une société où les inégalités sociales ne font que s’élargir alors que le pays est membre du G20. Le Président est aussi sous la menace de la réouverture de 783 charges de corruption dans une vieille affaire de contrat d’armement.
Deux mandats et des déboires multidimensionnels
Le 6 mai 2009, le chef de l’ANC, Jacob Zuma, est élu président par le Parlement, après la victoire de ce parti lors des élections générales. Il a évincé, fin 2007, de la direction de l’ANC le chef de l’Etat, Thabo Mbeki, qui l’a limogé de la vice-Présidence deux ans plus tôt pour des accusations de corruption.
En avril 2012, Julius Malema, président de la Ligue de la jeunesse de l’ANC, est exclu du parti au pouvoir, au terme d’une longue procédure disciplinaire, pour ses atteintes répétées à l’image et à l’unité du parti. Il lancera en 2013 un parti de la gauche radicale, les Combattants de la liberté économique (EFF).
Le 16 août de la même année, 34 personnes sont tuées à la mine de platine Lonmin de Marikana, au nord du pays, lorsque la police ouvre le feu sur une foule de grévistes brandissant des armes traditionnelles. La fusillade déclenche une violente vague de grèves dans les mines sud-africaines, faisant une soixantaine de morts. Le 21 mai 2014, Jacob Zuma est reconduit par les députés à la tête du pays, à la suite de la victoire de l’ANC aux élections générales.
Le 2 novembre, un rapport de la médiatrice de la République révèle l’influence exercée sur le gouvernement par la famille Gupta, à la tête d’un puissant empire industriel et médiatique, avec la complicité de Jacob Zuma. Le 31 mars 2017, Zuma limoge son ministre des Finances et adversaire, Pravin Gordhan, déclenchant une guerre ouverte à l’ANC. Des dizaines de milliers de personnes descendent dans les rues en avril pour réclamer sa démission.
Le 29 décembre dernier, la Cour constitutionnelle de l’Afrique du Sud a indiqué que le Parlement doit agir et demander des comptes au président Zuma concernant un scandale de corruption. Le chef de l’Etat est accusé d’avoir fait rénover sa résidence de campagne aux frais du contribuable, pour un montant estimé à quelque 15 millions de dollars.
«L’Assemblée nationale n’a pas demandé des comptes au Président», a déclaré le juge de la Cour constitutionnelle, Chris Jafta. «L’échec de l’Assemblée nationale à établir des règles sur la manière de forcer le Président à un retrait (…) constitue une violation» de la Constitution.
La Cour a ordonné aux députés «de mettre en place un mécanisme qui pourrait être utilisé pour la destitution du Président de sa charge». Ce scandale a éclaté en 2016, quand la Cour constitutionnelle a accusé Jacob Zuma d’avoir violé son serment présidentiel en refusant de rembourser. Ce dernier a fini par accepter de verser 500 000 dollars, une somme fixée par le Trésor.
Source: elwatan