Les premiers résultats, encore provisoires, du second tour de la présidentielle au Liberia qui a opposé mardi la légende du foot et sénateur George Weah et le vice-président sortant, Joseph Boakai, sont attendus jeudi.
La Commission électorale nationale (NEC), qui l’a indiqué sur Facebook mercredi soir, n’a pas précisé d’horaire pour cette annonce attendue avec impatience mais sans signe apparent de tension par tout un pays.
Près de trois décennies après le début d’une guerre civile qui a fait 250.000 morts en 14 ans, le Liberia s’apprête à vivre sa première alternance démocratique entre une présidente élue, Ellen Johnson Sirleaf, et son successeur, qui entrera en fonctions le 22 janvier.
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et le chef des observateurs de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), l’ancien président du Ghana John Dramani Mahama, ont tous deux salué « la tenue pacifique » du scrutin, tout comme l’a également fait l’Union européenne.
Organisé au lendemain de Noël, après avoir été reporté de sept semaines en raison de contestations des résultats du premier tour le 10 octobre par plusieurs candidats, le second tour a vu la participation augmenter tout au long de la journée, pour atteindre « environ 55% », selon M. Mahama.
Si elle salue la bonne tenue des opérations jusqu’ici, sans les problèmes d’organisation rencontré début octobre, la Cédéao encourage la NEC à publier rapidement des résultats « afin d’éviter de créer de l’anxiété parmi la population ».
Le dépouillement des bulletins de vote – le pays compte 2,1 millions d’électeurs – devrait se poursuivre pendant un jour ou deux.
Des médias locaux donnaient toutefois en tête George Weah, l’ancien attaquant du PSG et du Milan AC, vainqueur du premier tour avec 38% des voix.
Dans un pays qui n’a pas connu d’alternance démocratique depuis 1944, « cette transition est cruciale. Si le Liberia la réussit, ce sera une victoire pour lui, pour l’Afrique de l’Ouest et pour l’Afrique en général », a déclaré mardi à l’AFP l’ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan, chef des observateurs du National Democratic Institute (NDI), dont le siège est aux Etats-Unis.
– « Personne ne veut de problèmes » –
« Ne fais pas de bruit. Tu vois bien que j’écoute la radio », lance Samuel Nuahn à son fils de 12 ans. Tout en travaillant dans son garage de la banlieue nord de Monrovia, ce mécanicien de 46 ans, partisan du vice-président Joseph Boakai, garde l’oreille collée à son poste, branché sur une station locale égrenant des résultats partiels.
« C’est du provisoire. Ca ne va pas dans mon sens mais je reste optimiste », a-t-il expliqué à l’AFP. « Quel que soit le résultat, nous l’accepterons sans faire de problèmes. Plus personne ne veut de problème dans ce pays, on n’en a pas besoin ».
« Quelles que soient les provocations, nous ne répondrons pas par la violence », a expliqué le chef de la branche jeunesse de la Coalition pour le changement démocratique (CDC) de George Weah, Jefferson Kotchie, à un groupe de jeunes supporteurs de l’ancien attaquant vedette.
– Atrocités –
Le Liberia est un pays anglophone d’Afrique de l’Ouest, meurtri par quatorze ans d’une guerre civile particulièrement atroce – 250.000 morts entre 1989 et 2003 -, puis par l’épidémie d’Ebola, dont il peine à se redresser.
Il vit encore dans le souvenir de Charles Taylor, 69 ans, ancien chef de guerre puis président (1997-2003), condamné par la justice internationale à 50 ans de prison, qu’il purge en Grande-Bretagne, pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre perpétrés en Sierra Leone voisine.
Sénateur depuis 2014 de la province la plus peuplée du pays, George Weah a choisi comme colistière Jewel Howard-Taylor, ex-femme de Charles Taylor et influente sénatrice de Bong, autre important réservoir de voix. Mais tout deux affirment ne pas entretenir de lien avec l’ancien président.
« C’est un jour historique. Je sais que je vais gagner », a déclaré mardi Weah, qui, à 51 ans, reste très populaire auprès des jeunes. « Nous allons gagner! Parce que le peuple croit en nous et sait que nous sommes les meilleurs », a quant à lui lancé Joseph Boakai, 73 ans.
Dans leurs locaux situés sous les tribune du stade Samuel Kanyon Doe, au coeur de Monrovia, les membres de la NEC ont commencé à comptabiliser, sous le regard d’observateurs et de représentants des partis, les résultats de la province de Montserrado, la plus peuplée du pays, où se trouve la capitale.
Selon un rituel bien rôdé et dans un silence monacal, un responsable exhibe une enveloppe pour montrer qu’elle est bien scellée. Puis il lit le nombre de voix remporté par chacun des candidats, qu’un assistant inscrit dans un programme informatique projeté sur un grand écran, aux yeux de tous. Comme dans n’importe quelle démocratie.
La rédaction