Depuis plusieurs semaines, certaines localités de la région de Sikasso font face à l’invasion des chenilles légionnaires. Face à la dangerosité de ses papillons volants sur les cultures et leur fertilité rapide, aucune action de lutte émanant du département en charge de l’Agriculture n’est visible sur le terrain. Les paysans observent impuissamment et avec amertume des dégâts dans leurs champs.
De son nom scientifique, Spodoptera frugiperda, la chenille légionnaire fait référence aux ailes à motifs gris des papillons adultes et aux ravages qu’elles occasionnent sur les fruits. Son nom courant renvoie au fait que les chenilles se déplacent en masse à l’automne. Plusieurs caractéristiques de cet insecte en font une espèce particulièrement difficile à contrôler : en plus de leur impressionnante endurance de vol, les femelles adultes sont extrêmement fertiles, avec plus de 1 000 œufs pondus durant leur vie.
Ces chenilles peuvent coloniser plus de 100 plantes appartenant à 27 espèces différentes. Leurs hôtes préférés demeurent le maïs, le sorgho, le millet, le riz et la canne à sucre. Une autre raison de la difficulté à les appréhender réside dans leur capacité à résister aux pesticides.
Détectée pour la première fois en Afrique de l’Ouest en 2016, la chenille beige et marron a débarqué vraisemblablement à bord de cargaisons en provenance d’Amérique du Sud, par mer ou par avion. Dans les grandes exploitations agricoles comme dans les plus petites parcelles d’Afrique une petite chenille a su, en seulement deux ans, conquérir le continent et menacer la sécurité alimentaire de ses habitants.
Jusque-là, notre pays était épargné par ces insectes. C’est en 2018, précisément au mois de juin dernier que la présence de ses ravageurs a été constatée dans notre pays. La région de Sikasso qui est la plus grande zone agricole, est durement touchée par la chenille légionnaire.
Malheureusement, depuis l’alerte, la réaction du département à travers la Cellule nationale de lutte contre les criquets pèlerins, se fait toujours attendre sur le terrain.. Si la situation continue ainsi, la famine sera inévitable, car chaque jour des dizaines d’hectares sont ravagés par ces insectes. Il ne suffit pas de faire des apparitions sur la télé pour montrer la chenille légionnaire, il s’agit de mener des actions concrètes pour éradiquer le fléau.
Et pourtant l’éradication de la chenille légionnaire n’est pas une chose facile, elle prend souvent beaucoup de temps, car le contrôle de ce ravageur doit d’abord passer par une coopération internationale avec les pays d’Afrique touchés, notamment la République Démocratique du Congo, le Burundi, le Rwanda, l’Ouganda, la Tanzanie, le Kenya, l’Ethiopie, le Soudan du Sud, le Soudan, la République Centrafricaine, le Tchad, le Cameroun, le Ghana, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Sierra Leone, le Liberia, la Gambie, le Sénégal, le Cap-Vert, Madagascar, le Gabon, le Niger et la Somalie…
En attendant, les paysans constatent impuissants les dégâts causés par ces ravageurs. La présence des techniciens du ministère de l’Agriculture est plus qu’indispensable aujourd’hui pour trouver une solution à cette menace. Le renforcement des capacités de la Cellule nationale de lutte contre les criquets pèlerins relégué aux calendes grecs est aujourd’hui nécessaire pour limiter les dégâts dans les champs.
Y. Doumbia
L’Indicateur du Renouveau