Malgré quelques progrès, les femmes peinent encore à accéder aux responsabilités et se heurtent au fameux « plafond de verre » qui freine leur carrière. Pourtant, des avancées plus importantes en la matière stimuleraient la compétitivité des entreprises et la croissance dans son ensemble, s’accordent les experts.
« Les femmes tirent la consommation des pays développés, elles sont les principales utilisatrices d’internet, sont de plus en plus nombreuses à créer leur entreprise, mais elles ne sont que rarement à la tête des plus grosses », résume Irène Natividad.
Cette Américaine a fondé le « Global summit of women » (le sommet mondial des femmes), qui se tiendra à Paris du 5 au 7 juin, pour « réfléchir aux moyens de donner davantage accès aux femmes à des fonctions dirigeantes ». Car le compte n’y est pas.
Certes, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le taux d’emploi des femmes a généralement augmenté. Des progrès notables ont été effectués en matière d’éducation. Ainsi, près de 60% des universitaires diplômés en 2009 dans les pays de l’OCDE étaient des femmes.
Mais les écarts de rémunération restent obstinément élevés: en moyenne, les femmes travaillant dans les pays riches touchent 16% de moins que les hommes, et les femmes les mieux rémunérées 21% de moins.
Par ailleurs, elles occupent moins du tiers des postes de direction, et 10% seulement des sièges de conseils d’administration.
Lutter avec plus de vigueur contre les obstacles à l’égalité des sexes en matière d’éducation, d’emploi et d’entrepreneuriat engendrerait de nouvelles sources de croissance économique et contribuerait à une meilleure utilisation des compétences de chacun, souligne l’organisation.
La ministre des Droits des Femmes, Najat Vallaud-Belkacem, qui se fonde sur les chiffres de l’OCDE, aime à rappeler qu’une convergence des taux d’activité des hommes et des femmes contribuerait à accroître de 10% l’économie de la France d’ici à 2030.
– « Elles vont prendre des coups » –
Se priver de la compétence des femmes est « un gâchis national », n’hésite pas à affirmer de son côté Armelle Carminati, membre du directoire d’Unibail-Rodamco, et très engagée en faveur de l’égalité professionnelle.
Constatant une évaporation des talents plus on monte dans la hiérarchie des entreprises, elle juge que « le tissu productif du pays n’est utilisé qu’à moitié », alors même que l’Etat « investit, par l’éducation, sur du capital humain ».
Pour faire progresser l’égalité femmes-hommes, plusieurs mesures ont été prises.
En France par exemple, le gouvernement s’est engagé à favoriser la mixité des métiers. Les sanctions contre les entreprises ne respectant pas l’égalité salariale ont aussi été durcies. A l’instar d’autres pays européens comme la Norvège, le Royaume-Uni ou l’Allemagne, la France a aussi mis en place des quotas dans les conseils d’administration, avec un résultat probant: de 2012 à juin 2013, le nombre d’administratrices dans les entreprises du CAC 40 a augmenté de 22% à 28%.
« Mais cette hausse n’a toujours pas déteint sur les comités exécutifs, qui échappent au législateur », et ne recensent aujourd’hui que 10% de femmes, déplore Armelle Carminati.
Pour préparer les femmes à l’exercice d’un tel mandat, Viviane de Beaufort, professeur à l’Essec, a lancé une formation spécifique. « Je les préviens qu’elles vont prendre des coups », raconte-t-elle.
Elle chapeaute aussi deux autres programmes: l’un pour aider les femmes à créer leur entreprise et rendre leur projet pérenne car « 8% des entreprises créées par des femmes existent encore après trois ans, contre 32% de celles créées par des hommes ». Une différence qui s’explique, selon elle, par une plus forte « aversion au risque » des créatrices.
Le troisième programme doit permettre aux jeunes femmes de prendre des responsabilités en entreprise. « Je leur explique comment revendiquer une hausse de salaire, ou oser prendre la parole en public », souligne par exemple Viviane de Beaufort, qui doit surtout « les rassurer sur leurs compétences ».
La dernière étape sera, selon elle, « de convaincre les hommes qu’ils ont tout à gagner de la mixité ».
© 2014 AFP