Premier otage français arrêté en 2009 au Mali, Pierre Camatte revient sur sa douloureuse captivité et évoque en même temps les rapports entre le Mali et l’Algérie. “Mon sentiment est que le Mali et l’Algérie ont des relations qui n’ont jamais été au beau fixe“, lance-t-il.
Pour la première fois, l’ex-otage français enlevé en 2009 au Mali s’exprime dans un journal malien. Dans une interview accordée à notre confrère “Carrefour”, l’homme revient sur ses conditions de détention, son amour pour le Mali, la question de la rançon et la relation tumultueuse entre le Mali et l’Algérie ? Sur ce dernier sujet, Pierre Camatte semble ne pas comprendre la position du voisin immédiat du Mali.
Interrogé sur son état de santé et état moral, M. Camatte affiche un air de sérénité même si les images de sa captivité restent encore vivantes. “J’ai à présent des souvenirs de cette douloureuse expérience gravés dans mon cerveau. Le temps a fait son travail évidemment. J’ai encore beaucoup d’amis au Mali auxquels je pense toujours. Je suis en contact régulier avec eux”.
Exilé dans son propre pays
Animé d’un sentiment d’impatience face aux actions qu’il a pu mener dans le Nord et les potentialités énormes que recèlent cette zone, Pierre Camatte évoque avec nostalgie son séjour dans notre pays. “J’ai un lien particulier avec le Nord du Mali. Nous avons vécu des moments de joies et de souffrances pendant que nous étions en train de tracer une voie pour l’économie locale, handicapée par la sécheresse. Tous ces événements qui se passent et qui font fuir les populations ne sachant plus de quoi demain sera fait sont regrettables”.
Et de regretter le conflit armé qui a fait tomber le Nord du Mali : “Etre sous l’emprise de tous ces groupes qui se disputent et se mettent à travers le développement, en procédant au trafic de drogues, entraînent forcément des morts d’hommes. Toutes ces bévues, c’est pour une question de leadership, de légitimité dans la zone du Nord. Aujourd’hui, je me sens comme un exilé, car j’avais adopté cette zone dans un sentiment global”.
Rançon non, contreparties oui !
Lors de sa libération, la question d’un paiement de rançon a été évoquée et on parlait à l’époque d’une forte somme. Mais l’ex-otage préfère se mettre derrière la position officielle de son pays.
“Le principe de la France, c’est de ne pas payer de rançon aux ravisseurs. Mais il faudra forcément se dire qu’il y a des contreparties qui sont de différents types. Un groupe de ravisseurs ou tout autre groupe de pressions peuvent avoir accès à telles ou telles facilités pour aboutir à la libération d’un otage. Cela est fort possible”, explique-t-il.
Cependant, souligne-t-il, “dans mon cas, j’ai appris par la suite que quatre Algériens qui avaient le sang sur leurs mains en Algérie avaient été échangés contre ma libération, d’ailleurs sans l’aval du gouvernement algérien”.
Et pour conformer la position souvent qualifiée de louche de l’Algérie dans la crise malienne, Pierre Camatte fait une révélation : “Mon sentiment est que le Mali et l’Algérie ont des relations qui n’ont jamais été au beau fixe”.
Médiatrice dans la crise malienne, l’Algérie est pourtant dans une position ambiguë qui agace une bonne partie de l’opinion nationale. Comme ce fut le cas lorsqu’il s’agit de survoler son territoire pour chasser les terroristes dans le Nord du Mali.
En d’autres termes, Pierre Camatte confirme que son ravisseur était Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), la branche de l’Algérien Abou Zeid et dit l’avoir rencontré plusieurs fois.
A. M. C. avec Carrefour
Par L’Indicateur du Renouveau