C’est en 1992 que certains composés chimiques pouvant interférer avec le métabolisme des hormones et perturber le fonctionnement du système endocrinien sont, pour la première fois, qualifiés de “perturbateurs endocriniens”.
Le vocabulaire était nouveau, mais pas le constat forgé depuis des décennies à partir d’observations faites dans la nature et en laboratoire : des composés naturels (phyto-œstrogène par exemple) ou de synthèse (certains polluants, pesticides, cosmétiques, phtalates par exemple) peuvent avoir des effets ostrogéniques.
La notion de perturbateur endocrinien est aujourd’hui admise par les instances scientifiques, sanitaires et politiques, malgré une absence de définition commune au niveau mondiale. De nombreuses études tendent à montrer leur effet néfaste sur la santé, l’environnement et la faune.
La définition la plus communément admise des perturbateurs endocriniens est celle élaborée par l’OMS (Organisation mondiale de la Santé) en 2002 : “Un perturbateur endocrinien potentiel est une substance ou un mélange exogène, possédant des propriétés susceptibles d’induire une perturbation endocrinienne dans un organisme intact, chez ses descendants ou au sein de (sous)- populations. Cette catégorie est divisée en deux sous- catégories : la catégorie 2a pour les perturbateurs endocriniens suspectés et la catégorie 2b pour les perturbateurs endocriniens pour les substances possédant des indications de propriétés de perturbation endocrinienne”.
Ils peuvent être d’origine naturelle (hormones) ou issus d’activités humaines et sont présents dans l’eau, l’air et dans de nombreux produits de consommation : industries chimiques, textiles, cosmétiques, détergents, matières plastiques, peintures… Le plus connu est le bisphénol-A, présent dans les plastiques de contenants alimentaires ou les tickets de caisse.
Le perturbateur endocrinien peut agir de trois manières différentes. Il peut mimer une hormone et ainsi provoquer l’effet de cette hormone. Il peut bloquer l’action hormonale en se fixant sur son récepteur. Et enfin, il peut perturber la production d’hormones ou de leurs récepteurs.
Les perturbateurs endocriniens peuvent avoir des effets néfastes sur la santé humaine, la faune et l’environnement. Le dérèglement hormonal provoqué par ces substances peut affecter le système de reproduction, la croissance, le développement et le comportement. La fonction de reproduction semble être la plus sensible à l’action des perturbateurs endocriniens. Diverses études épidémiologiques ont en effet mis à jour une évolution de la fréquence de pathologies des organes de reproduction et une baisse de la fertilité. Ils sont aussi suspectés dans l’apparition de certains cancers.
La communauté scientifique est aujourd’hui mobilisée pour répondre aux nombreuses préoccupations sanitaires que suscitent les perturbateurs endocriniens. Elle prévoit d’éliminer notamment le Bisphénol des tickets de caisse et des jouets. Elle projette aussi l’expertise de 5 substances dont 3 sont suspectées perturbateurs endocriniens : le methylparabène (présent dans les cosmétiques et les produits d’hygiène), l’acide orthoborique (présent dans les adhésifs et lubrifiants), l’hydroxyanisol butylé(dans les cosmétiques et les médicaments).
Dr. Mariko Modibo, endocrinologue-diabétologue
Hôpital du Mali, Missabougou
Source: Le Confident