Le marché de l’engrais est une véritable mine d’or à ciel ouvert où chaque acteur veut se remplir la poche à satiété. Chaque campagne agricole révèle son lot de scandales au détriment du trésor public qui saigne à blanc à la douleur des paysans et du citoyen lambda. Si l’engrais frelaté n’est pas servi aux pauvres paysans ceux-ci font les frais de la pénurie.
La saisie agricole 2018-2019, année électorale de surcroit n’a pas dérogé à la vilaine règle. Pourtant, on se souvient que des paysans ont été mobilisés de la zone cotonnière à celle de l’Office du Niger en passant par le Mandé pour venir remplir le Stade du 26-Mars au lancement de la campagne d’IBK en juillet dernier. Leur rôle était non seulement de meubler le stade, mais servir également de bétail électoral pour la réélection du président IBK. Nango Dembélé, ministre de l’Agriculture et Bakary Togola, président de l’Assemblée permanente des Chambres d’Agricultures du Mali (APCAM) leur avaient fait la promesse de leur offrir des engrais comme récompenses.
Le ministère de l’Agriculture, en tandem avec les associations faîtières comme l’Apcam, définit pour chaque campagne, la ligne de distribution des intrants agricoles. Cette année deux opérateurs économiques dont Toguna agro-industrie de Seydou Nantoumé ont bénéficié du gros lot du marché des intrants. Des commerçants du Nord qui n’ont jamais intervenu dans le domaine en ont également reçu. Selon des indiscrétions, le marché des intrants pour cette campagne agricole, a été accordé à des proches du régime soupçonnés d’avoir majoritairement financé la campagne électorale du président IBK. Juste un retour de l’ascenseur. Les années précédentes, le marché était réparti entre au moins une dizaine d’exploitants d’intrants avec des quotas prédéfinis.
Il y a quelques semaines, les paysans du Mandé, de la zone Office du Niger et même du Mali Sud (région de Sikasso) se plaignaient du manque d’engrais. Au moment où la culture du coton, du riz et d’autres céréales comme le mil, le maïs, le fonio battent leur plein, les agriculteurs courent après le précieux sésame.
Pour illustration et selon les témoignages des paysans de Kangaba, cette année, la Direction nationale de l’agriculture a envoyé dans les zones du Mandé, 1300 sacs d’urée et 800 sacs d’engrais complexe. Ce qui n’équivaut qu’à la moitié des besoins des champs dans les communes de Maramandougou et de Sélefougou. Pour ces zones à vocation cotonnière, « certains agriculteurs ont été obligés d’acheter de l’engrais subventionné par l’Etat, de Toguna agro-industrie, pour couvrir le reste des champs de coton cultivé », a indiqué un paysan.
La cupidité aidant, de nouveaux intervenants et non professionnels du secteur des engrais ont surgi du néant. Comme dans un délit d’initiés, le business consiste semble-t-il, à attribuer des vrais faux marchés de distribution d’intrants agricoles. L’argent est ensuite indûment payé par le trésor quand bien même le service n’a pas été correctement exécuté.
Des faits inqualifiables qui vont aux antipodes de l’ambition présidentielle pour le développement de la filière agricole dans notre pays. Pour développer le secteur agricole, le président IBK y a consacré 15 % du budget national avec des subventions en tracteurs et autres matériels agricoles. Le plan de campagne agricole 2018/2019 chiffre à plus de 226 milliards de F CFA la contribution de l’Etat et des exploitants d’intrants agricoles pour une quantité d’intrants estimée à 593 395 tonnes. Soit 37 % d’augmentation par rapport à l’année dernière.
Le ministre Nango Dembélé est fortement interpellé et décrié dans cette affaire. Il est accusé d’incompétence notoire et d’être à la solde de quelques individus pour des intérêts sordides. A se rythme, il risque de saboter la politique agricole mis en chantier par le président IBK.
Mamourou Z. Sanogo
Malinet