Des personnes qui ne parviennent pas à rentrer en possession de leurs pensions de retraite jusqu’au 8 du mois suivant ; un personnel civil et militaire qui se plaint de mystérieuses retenues de salaires, il y a certainement une situation économique et financière délétère.
Les agents admis à la retraite de la Fonction publique de l’État ne sont pas encore au bout de leurs peines. Jusqu’à hier lundi 8 juillet, ils n’étaient pas rentrés en possession de leurs pensions, sans que des explications convaincantes ne leur soient fournies. En effet, apprend-on, si certains ont été servis sans que l’on ne puisse véritablement dire par quel truchement, le gros lot des retraités qui a pris d’assaut des banques, la semaine dernière, doit prendre son mal en patience. Ce n’est certainement pas l’expression qu’ils utiliseraient puisqu’ils sont animés d’un sentiment de révolte.
« C’est du jamais vu. Habituellement, nous sommes payés entre le 24 et le 27 du mois. Cette fois-ci, nous sommes le 8 du mois suivant et nous ne voyons toujours pas le bout du tunnel. C’est inexcusable ; il faut rapidement mettre un terme à ce désordre », tonne un ex-agent de la Police à la retraite.
Par ailleurs, des agents civils et militaires se plaignent de mystérieuses retenues opérées sur leurs salaires. Nos sources révèlent qu’elles n’ont ni été prévenues ni été informées de l’utilisation éventuelle des sommes carottées.
En attendant les explications qui seront données par qui de droit, si l’on s’en donnait la peine, la certitude est qu’il y a une violation flagrante de la LOI N° 2017-021/ DU 12 JUIN 2017 PORTANT MODIFICATION DE LA LOI N° 92-020 DU 23 SEPTEMBRE 1992 PORTANT CODE DU TRAVAIL EN RÉPUBLIQUE DU MALI en ses articles suivants :
Article L.121 nouveau : ‘’Aucune retenue ne peut être faite sur la rémunération du travailleur en dehors de celles prévue à la présente section. Il est interdit à l’employeur d’infliger des amendes’’.
Article L.123 nouveau : ‘’Sont possibles dans certaines limites, les retenues nées des saisies attribution ou de cession volontaire souscrite dans les formes définies par la réglementation.
Les cotisations syndicales peuvent être collectées par l’employeur, à la demande du ou des syndicats, sous forme de cession volontaire de salaire dûment établie par le travailleur, au profit de l’organisation de son choix.
Il ne peut y avoir compensation entre les appointements ou salaires et les sommes dues par le travailleur, notamment au titre de la réparation d’un préjudice, que dans la limite de la partie saisissable’’.
En est-on là par hasard ? Assurément pas. Au contraire, il s’agit de l’amplification d’une situation de pourrissement sur laquelle l’alerte a pourtant été donnée. On se rappelle qu’au détour d’un doux euphémisme, le ministre de l’Économie et des finances, le Dr Boubou CISSE évoquait « une tension de trésorerie » pour porter la contradiction, lorsque le Chef de file de l’Opposition, en pleine opération de charme des magistrats grévistes déclarait : ‘’le trésor public est vide. La dette intérieure est énorme et sans compter le prestige du Mali à l’extérieur qui nous fait honte à chacun d’entre nous aujourd’hui. Je crois que ça vient confirmer le manque d’intérêt du gouvernement, et de ce régime pour les populations, pour les cadres. Et je crois qu’il n’en fait qu’à sa tête. Je crois que cela n’augure pas de bons lendemains’’.
La confusion dans laquelle baigne le pays en ce mois de juillet pourrait bien donner raison à Soumi champion dont l’observation, en son temps, a été diversement interprétée et pour beaucoup sortie de son contexte.
Pour autant, le régime va-t-il faire amende honorable, demander l’indulgence des Maliens face à son incapacité à les mettre dans leurs droits les plus élémentaires (paiement des pensions des retraités, respect du caractère sacré du salaire d’un travailleur) ? L’autoflagellation ne fait pas partie des pratiques politiques sous nos cieux et ceux qui nous dirigent en ce moment ne s’y soumettront jamais. Mais, tout au moins, pourraient-ils faire l’effort de ne pas prolonger les souffrances de ceux qui ont rendu de bons et loyaux services au pays et qui ont le droit le plus absolu de jouir de leur retraite. Cela, ‘’pour l’honneur du Mali et le bonheur des Maliens’’.
Au-delà des considérations de droit, l’entretien des personnes du 3e âge est une valeur cardinale de notre société. Ne la galvaudons pas, pour rien au monde. Notre grand pays ne mérite pas de sombrer à ce point.
PAR BERTIN DAKOUO