En vigueur depuis le mercredi 25 octobre dernier, la grève de 72 heures du Syndicat national de l’Administration d’Etat (SYNTADE) pour protester contre la loi 2014-015 du 27 Mai 2014 portant enrichissement illicite au Mali, a été partiellement observée dans certains services publics.
Pourtant, le lundi 23 octobre 2017, le Président Ibrahim Boubacar KEITA avait reçu à Koulouba, une délégation de ce syndicat, conduite par son secrétaire général, non moins patron de l’Union Nationale de travailleurs du Mali (UNTM), Yacouba KATILE, qui a promis qu’ils vont continuer les négociations avec le gouvernement. Que s’est-il passé en 24 heures pour le SYNTADE retourne de façon spectaculaire sa veste ?
Tout a commencé par la réunion du 10 octobre dernier, où le SYNTADE, après à une large consultation des structures de base de toutes les régions, a décidé «d’observer une grève d’avertissement de 72 heures dans tous les services de l’administration d’État à compter du mercredi 25 octobre et cela jusqu’au vendredi 27 octobre 2017 à 00h ; de relancer ladite grève pour une durée de cinq jours, soit du lundi 6 novembre au vendredi 10 novembre 2017, si le gouvernement ne prend pas les dispositions qui s’imposent pour abroger purement et simplement la Loi n° 2014-015 du 27 mai 2014 et toutes les dispositions qui s’y rattachent ».
Pour son secrétaire général, Yacouba KATILE, ses mandants n’exigent ni plus ni moins que le retrait pur et simple de la loi portant l’enrichissement illicite.
En effet, le SYNTADE interprète cette loi, initiée par le gouvernement pour assainir notamment l’administration publique, comme une ingérence dans la vie privée de ses militants. Comme si ses derniers n’étaient pas des agents publics. Face au refus du gouvernement de revenir sur cette Loi, les fonctionnaires de l’État observent, depuis avant-hier, une grève de 72 heures.
Le jusqu’au-boutisme !
Face à la menace de grève, la Commission de conciliation entre le gouvernement et le SYNTADE a siégé, depuis la semaine dernière, selon nos sources. Mais le SYNTADE, a-t-on appris, s’oppose à toute forme d’application de cette loi sur l’enrichissement illicite dans notre pays, «gangréné par la corruption et le népotisme».
Le grief soulevé par les syndicalistes est le caractère rétro actif de la loi. De même, le SYNTADE dénonce le caractère discriminatoire de la liste des assujettis à la loi ainsi que son anti-constitutionnalité.
C’est ainsi que vendredi dernier, les négociations entre la Commission de conciliation et le SYNTADE ont porté autour des points de revendication du syndicat au ministère de la Fonction publique.
Face au blocage, le président de la République a jugé nécessaire d’intervenir dans le dossier en invitant les responsables du SYNTADE chez lui à Koulouba, lundi dernier aux environs de 19 heures.
Pour apaiser à propos de l’anti constitutionnalité de la loi, indiquent nos sources, le Président IBK s’est engagé à envoyer le texte devant la Cour Constitutionnelle pour le contrôle de sa légalité constitutionnelle. En attendant, il a demandé aux responsables syndicaux de bien vouloir sursoir à leur mot d’ordre de grève.
Aussitôt, le lendemain mardi, le Premier ministre, confirme nos sources, a envoyé la requête à la Cour constitutionnelle.
Loin de calmer les ardeurs du SYNTADE, ses responsables se sont radicalisés au cours des négociations avant de maintenir leur mot d’ordre de grève pour le mercredi dernier.
Pourtant, au sortir de son audience avec le Président IBK, Yacouba KATILE s’était montré compréhensif et sensible aux échanges avec le Président IBK. Il a déclaré au micro de nos confrères de l’ORTM : «Nous sommes satisfaits d’être reçus par le Président IBK», avec qui, ils ont la même vision de développement du pays. Et M KATILE d’ajouter: «Nous allons continuer les négociations avec le Gouvernement». Entre cette volonté de poursuivre le dialogue et le déclenchement brutal du mot d’ordre de grève, le mercredi dernier, il y a certainement une longueur d’avance qui mérite réellement d’être explicitée.
Aujourd’hui, le SYNTADE exige l’abrogation de la loi et le gel de toutes les activités de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite. Pour cela, il donne l’ordre de paralyser toute l’administration d’Etat pendant 72 heures.
Pour une perte évaluée à plusieurs milliards de francs CFA, alors que les portes du dialogue étaient loin d’être fermées.
Si la grève est un droit inaliénable au Mali, consacrée par la Constitution, cet arrêt de travail du SYNTADE n’est ni plus ni moins qu’une honte pour les grévistes qui avouent et assument sans coup férir toutes les reproches de népotisme, de vol, de corruption…, à eux faites par les citoyens au quotidien.
Ce qui était, hier, une humiliation pour le Malien, devient, hélas, aujourd’hui un motif de fierté.
Décidément, il y a lieu de revoir tout notre système éducatif qui semble avoir failli ou pris une distance importante avec notre culture et nos mœurs.
Par Sidi Dao
Source: info-matin