Ce mercredi, à Kampala, la capitale ougandaise, s’est tenue une marche rassemblant des milliers de fonctionnaires, policiers et partisans du pouvoir et avec en tête Yoweri Museveni, pour dénoncer la corruption. La capitale ougandaise avait été placée sous haute surveillance, des soldats encadrant de près les dignitaires qui défilaient, dont les présidents du Parlement et de la Cour suprême. Les commerces étaient clos et la fermeture des routes a provoqué d’importants embouteillages.
Une initiative qui lui a valu des critiques acerbes au président Museveni de la part de ses détracteurs.
Pour Maria Burnett, une avocate qui a écrit un rapport sur la corruption en Ouganda pour Human Rights Watch en 2013, cette marche n’était « rien d’autre qu’une distraction, un nouvel effort superficiel du gouvernement pour régler la question de la corruption ».
« Malgré de nombreux scandales (…), aucun haut responsable gouvernemental ayant dirigé un service concerné, aucun ministre, n’a purgé de peine de prison pour des délits de corruption pendant le long mandat de Museveni », a-t-elle noté. »La marche d’aujourd’hui (mercredi) est pavée d’impunité », a-t-elle encore critiqué.L’opposant Kizza Besigye avait prévu mercredi une manifestation séparée contre la corruption, mais son entourage a indiqué à l’AFP qu’il avait été arrêté par la police en s’y rendant. M. Besigye, quatre fois candidat malheureux à l’élection présidentielle, est arrêté de manière quasi routinière.
« Les gens corrompus sont des parasites », a déclaré M. Museveni à la foule après la marche, disant voir dans la corruption un « problème spirituel ».Cette marche a suscité de nombreuses moqueries, les critiques rappelant que plusieurs scandales de corruption ont marqué la présidence Museveni.
« Quand le président d’un pays décide de marcher contre la corruption plutôt que de prendre des mesures, ce pays est perdu », a estimé pour l’AFP Joseph Sabiti, un porte-parole d’Action Aid Ouganda et activiste anti-corruption. « On se moque des Ougandais », a-t-il accusé.
Depuis que M. Museveni a pris le pouvoir en 1986, ses gouvernements ont été régulièrement accusés de détourner des millions de dollars d’argent public.
En 2018, un tribunal américain a condamné un ancien responsable gouvernemental hong-kongais pour une affaire de corruption dans laquelle un pot-de-vin de 500.000 dollars (451.000 euros) a été versé sur un compte au nom du ministre ougandais des Affaires étrangères, Sam Kutesa.
En 2012, des allégations avaient circulé selon lesquelles 12,7 millions de dollars d’aide, destinée aux régions les plus pauvres d’Ouganda, avaient été détournés du bureau du Premier ministre ougandais. Dans la foulée, les États-Unis et les pays européens avaient temporairement suspendu leur aide.
En 2013, Mike Mukula, un haut responsable du parti au pouvoir, avait été condamné pour avoir détourné des fonds destinés à lutter contre le paludisme et la tuberculose, et à traiter des enfants atteints du sida.
Lors du procès, le tribunal avait entendu raconter que M. Mukula avait réclamé qu’un chèque soit versé sur le compte bancaire de Janet Museveni, l’épouse du président.
Innocente Nice
afriquinfos