Après un mois de suspension, la France a annoncé la reprise de sa coopération militaire avec le Mali, selon un communiqué du ministère français des Armées. Si les autorités transitoires sont constantes sur la tenue des élections présidentielle et des députés à l’Assemblée nationale, pour février 2022, ont-elles fait tabula rasa des recommandations de dialogue des foras nationaux avec les jihadistes maliens, en l’occurrence avec Iyad Ag GHALY et Amadou Kouffa ? Quel est alors le prix de la reprise des opérations conjointes entre les Forces armées maliennes et les soldats de l’opération Barkhane ?
La nouvelle est tombée en ce vendredi 2 juillet 2021 : «la France a décidé la reprise des opérations militaires conjointes ainsi que des missions nationales de conseil, qui étaient suspendues depuis le 3 juin dernier». C’est ce que le ministère français des Armées a annoncé dans son communiqué mis en ligne sur son site.
La France a justifié cette décision par les engagements des autorités transitoires maliennes à l’échelle régionale.
«La France prend acte des engagements des autorités maliennes de transition, endossés par la CEDEAO lors du sommet du 19 juin. Un dispositif d’accompagnement de ces engagements a été mis en place», a argumenté Paris.
Il est important de rappeler qu’en ce qui concerne la situation politique dans la région, à l’issue de sa 59e session, la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement, réitère ses préoccupations au sujet de la crise au Mali dans le contexte des problèmes sécuritaires relatifs aux attaques terroristes et à la pandémie de COVID-19 entrainant de terribles impacts socio-économiques. La Conférence se félicite du rapport présenté par S.E. M. Goodluck Ebele JONATHAN, Envoyé spécial et Médiateur de la CEDEAO au Mali, suite à sa mission effectuée au Mali du 8 au 9 juin 2021 en vue de dialoguer avec les parties prenantes sur les décisions prises par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO lors de son Sommet extraordinaire tenu le 30 mai 2021 à Accra, au Ghana. 15. La Conférence prend note de la nomination d’un Premier Ministre civil et de la formation d’un nouveau Gouvernement.
Elle prend également note de l’engagement des Autorités de la Transition à se conformer au calendrier électoral ; l’élection présidentielle étant prévue en février 2022.
La Conférence a également été informée du mécanisme de suivi qui sera mis en place pour s’assurer du respect strict du calendrier électoral publié le 15 avril 2021. Elle donne instruction au Président de la Commission d’assurer le fonctionnement efficace du mécanisme et la mise en œuvre des mesures qui y sont contenues.
La Conférence a pris note de l’évolution positive de la situation au Mali et décide de rester saisie de la situation politique malienne.
Outre l’organisation d’élections transparentes, crédibles et le retour des civils au pouvoir, l’ancienne puissance coloniale semble accabler les militaires de fricoter avec les jihadistes avec lesquels ils passent des accords. En effet, Emmanuel Macron avait laissé entendre, le 30 mai, lors d’un entretien au Journal du dimanche, qu’il ne resterait pas « aux côtés d’un pays où il n’y a plus de légitimité démocratique ». En ligne de mire, aussi, du président français : le profil des nouvelles autorités maliennes, qu’il craint plus ouvertes à « l’islamisme radical ». « Si cela va dans ce sens, je me retirerai », avait assuré M. MACRON.
Il faut rappeler que le président français Emmanuel Macron a déclaré, fin novembre 2020, dans un entretien donné à Jeune Afrique : « Avec les terroristes, on ne discute pas. On combat. » Ce, alors que le Mali a déjà fait évoluer sa position sur le principe de l’ouverture d’un dialogue avec les groupes islamistes, qui sévissent principalement dans le nord et le centre du pays. Que ce soit la Conférence d’entente nationale, du 27 Mars au 02 Avril 2017, le Dialogue National Inclusif (DNI), du 14 au 22 décembre 2019, tous les foras ont recommandé d’engager le dialogue avec Amadou Koufa et lyad Ag Ghali pour ramener la paix au Mali.
En parlant d’engagement des autorités transitoires pour justifier la reprise des opérations militaires conjointes, faudrait-il comprendre qu’elles ont fait tabula rasa de ce qui a été décidé par le peuple malien et qui s’est imposé comme une évidence face à une limite objective de la force armée ?
Par contre, pour ce qui est de la tenue des élections, la France prend acte des engagements des autorités maliennes de transition, endossés par la CEDEAO lors du sommet du 19 juin.
«Les groupes terroristes ont pour objectifs l’établissement, sur l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, de l’islamisme radical ainsi que la régression des libertés et des droits humains. La France reste pleinement engagée, avec ses alliés européens et américains, aux côtés des pays sahéliens et des missions internationales, pour s’y opposer», a expliqué le ministère des Armées.
La France avait décidé de suspendre sa coopération militaire avec le Mali au lendemain du coup d’État du 24 mai dernier, le deuxième en 9 mois.
«Dans l’attente de garanties, la France (…) a décidé de suspendre, à titre conservatoire et temporaire, les opérations militaires conjointes avec les forces maliennes ainsi que les missions nationales de conseil à leur profit», avait indiqué le ministère français des Armées dans un précédent communiqué, le 3 juin dernier.
PAR BERTIN DAKOUO
Source : INFO-MATIN