Certains responsables de l’Office du Niger (O.N.) ont vu dans leur position une opportunité d’affaires. Au lieu de se rendre utiles aux paysans, en leur servant de bons conseillers pour la réussite de leurs activités agricoles, ces responsables au niveau local, n’ont pas trouvé mieux que de les spolier, en s’adonnant à des pratiques peu orthodoxes pour s’approprier des terres.
Les agissements de certains agents ne représentent que la partie visible de l’iceberg, car ceux-ci peuvent-ils agir dans l’impunité totale sans la complicité de certains responsables de la société (O.N.).
Le cas le plus emblématique se passe à Sarkala (à deux km du pont barrage de Markala) dans la zone de M’Bewani où un agent de l’Office du Niger est parvenu à chanter et intimider les villageois pour se faire attribuer à lui seul, plus d’une dizaine d’hectares au détriment des habitants, qui ne démordent pas. Cet agent, un certain Moussa Traoré en service à Markala ne serait pas à son premier coup, selon les représentants du village de Sarkala à Bamako. Il dispose à son actif, plusieurs hectares à Sarkala, qu’il exploite déjà comme jardin fruitier. Comme si cela ne lui suffisait pas, il finit par jeter sa convoitise sur un champ de céréale du village de Fakènè ( Sarkala) appartenant à Abou Traoré du village de Fakènè, selon nos interlocuteurs. L’agent de l’Office du Niger vint trouver Abou Traoré dans son champ pour lui dire d’arrêter de le cultiver, pour la simple raison que c’est lui Moussa Traoré, qui serait désormais le propriétaire de la parcelle en question, faisant 5 hectares. Selon ses dires, la Direction de l’Office du Niger lui aurait fait un bail sur ce champ de 5 hectares. Curieux, quand on sait qu’il en faut plus pour une décision de bail. N’en croyant en rien de ses discours intimidant, le paysan de Fakènè Abou Traoré a continué de cultiver son champ, jusqu’au jour où il a été jeté en prison à Markala, en plein mois de juillet, période propice aux activités champêtres. A la manoeuvre, l’agent de l’Office du Niger à Markala, Moussa Traoré.
Le tribunal de Markala dans la nasse
L’affaire ne sera prise au sérieux par les habitants, que lorsque le paysan propriétaire du champ, Abou Traoré fut convoqué au tribunal de Markala par le nommé Moussa Traoré, afin qu’il renonce à la propriété de son champ.
Comme pour ne rien faciliter, les interrogatoires vont se solder par une décision du juge de Markala, de garder en détention le propriétaire du champ, pendant une dizaine de jours, au cours desquels il a subi d’intenses pressions dans les locaux de la justice (torture morale), afin de l’obliger à signer un acte de renonciation à sa propriété sur son champ au profit de cet agent de l’Office du Niger. Chose que Abou a refusé naturellement, d’où cette détention prolongée.
Selon nos informations, le juge de Markala a vidé le délibéré le 24 septembre dernier, en prenant la lourde responsabilité de retirer le champ à son propriétaire (la famille Traoré a toujours exploité ce champ de génération en génération), au profit de l’agent de l’Office du Niger, Moussa Traoré.
Croyant toujours en la justice malienne, même s’il existe quelques brebis galeuses, le paysan de Sarkala a fait appel de la décision du juge de Markala, qui n’a convaincu personne. On doute fort que le droit ait été dit dans cette affaire, sinon sur quoi le juge peut-il se fonder pour retirer le champ situé juste derrière les maisons du village, à une famille, qui l’a exploité de génération en génération, et qui n’a pas d’autre activité qu’agricole, au profit d’un agent de l’Office du Niger, usant de conflit d’intérêts pour se faire des biens mal acquis, et de sa position pour s’approprier plusieurs hectares de terre appartenant aux villages.
Une question récurrente
L’identité des bénéficiaires de périmètre à l’Office du Niger reste inconnue comme le sexe des anges, malgré quelques tentatives de dévoiler le secret pour plus de transparence. Car ce n’est qu’un secret de Polichinelle que les plus grands bénéficiaires des espaces irrigués à l’Office du Niger, ne sont pas les paysans, mais il y a des responsables et des agents de l’Office du Niger et leurs marabouts, des juges, des fonctionnaires et autres. Ce n’est pas interdit, c’est même normal, si cela était possible, que chaque Malien ait son lopin de terre, mais que cela se fasse au detriment des populations locales, est une aberration.
C’est à juste titre qu’un Directeur de l’Office du Niger s’était proposé de publier la liste de tous les bénéficiaires de parcelles à l’Office du Niger, au regard de l’ampleur du brigandage foncier dans ces zones. Pour la petite histoire, il a quitté ses fonctions sans avoir pu réaliser cet idéal.
Le Républicain est à mesure de publier la liste des bénéficiaires, le nombre d’hectares dont chacun dispose, assorti d’un plan, en ce qui concerne les villages de Sarkala (dans la zone de M’Bewani). Le nombre d’hectares attribué aux agents de l’Office du Niger, à des prête-noms et à des gens fictifs, est exorbitant. Le village de Sarkala ne s’est pas opposé, a même accepté que des personnes venues d’ailleurs, comme des responsables, des agents de l’Office du Niger, puissent bénéficier de lopin sur un espace non encore cultivé par les villageois, et désigné à cet effet. Mais à la mise en oeuvre le nombre d’hectares, que les agents de l’Office du Niger se sont attribués a dépassé tout entendement, selon les ressortissants de sarkala à Bamako.
Vivement le recensement, l’identification et la numérisation des bénéficiaires dans les zones de l’Office du Niger, de l’Office riz Ségou et de l’Office de la Haute vallée du Niger (OHVN). Ce recensement devrait être érigé en projet, comme l’a été l’identification de l’effectif du personnel de la fonction publique de l’Etat et des Collectivités.
En ce qui concerne l’affaire de Fakène (Sarkala), il serait étonnant qu’un agent puisse se livrer à de telle manœuvre, sans la complicité de certains responsables de la Société. De tels agissements sont difficiles, voire impossibles sans une implication à des niveaux insoupçonnés de la Direction de l’Office du Niger, ou à un niveau moindre, du responsable de la zone de M’Bewani. (Notre enquête se poursuit). Le nouveau Président Directeur Général de l’Office du Niger, Badara Aliou TRAORE, nommé le 14 février 2024, doit prendre le taureau par les cornes et néttoyer les brébis galeuses et mettre de l’ordre dans cette boîte stratégique pour notre pays.
Il est temps que les services considèrent les paysans comme des vrais acteurs du développement local, et les traitent en conséquence pour que règne un climat serein favorable à la productivité. Le milieu rural partout sur le territoire national, peut offrir une opportunité à quiconque de produire et d’améliorer ses revenus, mais ce n’est pas en anéantissant le paysannat en lui prenant ses terres, en se servant de la justice pour l’intimider ou l’opprimer réellement, qu’on gardera un climat de paix et de quiétude favorable à l’activité agricole à l’Office du Niger. La justice en disant le droit peut contribuer au renforcement de la paix et de l’ordre public. Le contraire serait une aberration, qui alimenterait les tensions et serait lourd de conséquence. A bon entendeur … affaire à suivre.
B. Daou
Le Républicain