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Nouvelle réforme de la santé au Mali : Un autre coup de bluff du gouvernement

Le nouveau projet de réforme de la santé récemment  initié par  l’État malien est accueilli avec une immense joie par la population, mais approchés par nos soins, beaucoup de professionnels  de la santé restent du moins  sceptiques quant  à  la réussite  de  l’application correcte de cette  nouvelle réforme. Certains estiment que l’environnement actuel de la santé ne permet pas de telles prises en charge ; il y a  nécessité  de  refondation  préalable du plateau technique même de la santé. D’autres diront également que c’est une façon de détériorer les liens entre la population et les établissements de santé en étant  persuadés  que les  mesures d’accompagnement de l’État  feront défaut.

À l’unanimité, chacun des intervenants a salué  cette nouvelle mesure de réforme dans le domaine de la santé, et de confirmer également  la  très bonne initiative,  du fait qu’elle est destinée à la  couche de la société  la plus vulnérable,  à savoir  les enfants, les femmes  enceintes et les personnes âgées. Mais l’expérience des précédents fâcheux, non encore régularisés,  a laissé beaucoup de gens dans le doute quant à la réussite de cette nouvelle réforme. Ils ne s’empêchent donc pas le désir  de  voir  à l’épreuve un   projet à  peine né, avant toute appréciation. Sory Koné, étudiant en biologie appliquée à la FST de Bamako,  dira sans détour que  ce n’est pas possible d’appliquer correctement cette mesure de réforme  dans un pays où tout le plateau sanitaire est à refaire. Il laisse entendre que le Mali a besoin  préalablement de réorganiser   tout son  système de santé. Selon lui, c’est encore une décision  politique de  folklore de l’État comme les précédentes  mesures de traitement des enfants de 0 à 5 ans  contre le paludisme, de la prise en charge des accouchements par  césarienne  ou  également  de la prise en charge  des séropositives du VIH. Il dira concernant  ces cas, qu’il est toujours préférable  d’être sur le terrain pour voir  toutes les réalités invisibles comme  (ruptures de stock des médicaments, manque de kits, complications, infections ou surinfections) des problématiques auxquelles la population lambda  fait face quotidiennement et n’arrive jusqu’à présent pas  à trouver de  vraies réponses. À cela, monsieur Koné dira que rendre gratuits ces soins, c’est comme rendre automatiquement étatique les centres de santé communautaires (CSCOM) qui,  au-delà des accompagnements de tutelles  de l’État, ont une autonomie de gestion  financière par les ASACO. Sur ce point, il dira que c’est mettre en conflit la population et les ASACO  qui puisent la majeure partie de leurs ressources  aux petits  soins,  aux accouchements et aux  consultations pré et postnatales , sans compter les milliers de cliniques et cabinets de soins qui naissent à longueur de journée. Pour lui, l’État devait commencer à résoudre ces problèmes  avant de se lancer dans des projets qu’il n’est pas à mesure d’assurer : « L’État n’a ni  la politique ni les moyens encore moins les  ressources de cette nouvelle réforme ». Il conclut  que ce qui est urgent au Mali aujourd’hui, « c’est la réforme du plateau sanitaire avec le manque criard  de personnels de santé  qui se chiffre à 1 médecin pour 10 000 habitants,  sans oublier  la prolifération des établissements privés de santé ».   Monsieur BrehimaTogola, médecin-chef du centre de santé communautaire de Daoudabougou (ADASCO) dira qu’il avait été approché par l’ensemble de son personnel, dès l’annonce de cette nouvelle mesure,  dans le souci de ne pas être en conflit avec la population. Et, la réponse qu’il a donnée à son personnel était de ne pas s’affoler et de laisser le temps à l’État qui est le premier garant de la santé de la population de proposer les mesures d’accompagnements nécessaires à la bonne pratique de cette mesure.  Il dira que l’État ne manque pas d’ailleurs de moyens supérieurs à la prise en charge effective de la santé de sa population.

Mais le médecin-chef  Togola ne s’est pas empêché par ailleurs  de  confirmer le manque de suivi et d’accompagnement  des mesures de  gratuité du traitement du paludisme des enfants de 0 à 5 ans , de l’accouchement par césarienne et de la prise en charge des enfants dont la mère est séropositive. Des soins qui ont été rendus gratuits depuis fort longtemps.  A 22 ans de service, docteur Togola dira que l’État doit redéfinir  la cible  et les champs d’applications des offres  gratuites  de certains services. Selon lui, ces offres de l’État ne visent que le traitement du  paludisme simple et l’acte simple  et non compliqué de la césarienne alors que le paludisme chez la femme enceinte est déjà synonyme de paludisme compliqué.  Le médecin-chef dira également que l’État doit revoir sa politique d’approvisionnement des centres de santé en Kits, pour empêcher tout conflit avec la population. À le croire, c’est sous le président  ATT que le CSCOM a reçu  son dernier approvisionnement en kits  et jusque-là c’est en rupture totale : « Si à cela il faut ajouter d’autres soins supplémentaires gratuits, c’est une bonne chose, mais ça nécessitera quand même  une bonne politique de suivi et d’accompagnement ».

Quant à Mahamadou Togola, pharmacien, il dira qu’il n’est pas bon d’étouffer un projet avant sa naissance. Pour lui, avoir déjà cette mesure est un acquis important, mais l’appliquer correctement demande du temps et de l’accompagnement. Tout en sachant que l’accompagnement de l’État fera défaut dans l’application de cette nouvelle réforme,  monsieur Togola dira que son application correcte  est un autre combat. Il laissera entendre également que  c’est à la population et aux organisations de santé de se battre pour rendre applicables certaines  décisions politiques des États  prises souvent  pour  uniquement avoir des classements politiques internationaux.  Sinon selon lui, le Mali n’a rien à envier à beaucoup de pays sur le plan de personnels qualifiés dans le domaine de la santé.  Mais à le croire, c’est juste un manque de volonté politique.                                          ISSA DJIGUIBA

Source: Le Pays

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