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Nos expatriés : Jonas Komla, «Ce qui manque au football malien, c’est le travail sur la durée»

L’ancien sélectionneur des Aiglonnets qui s’est engagé avec l’ASCK du Togo en janvier dernier en est convaincu : le Mali regorge de jeunes talents et de techniciens compétents. «Si on se montre patient avec la génération
actuelle, elle va faire des merveilles», assure-t-il. Interview

 

L’Essor : Depuis combien de temps vous êtes au Togo et comment vous êtes arrivés dans le pays ?
Jonas Komla : Je suis arrivé au Togo le 27 janvier de cette année, j’ai été contacté par les dirigeants de l’Association sportive des conducteurs de la Koza (ASCK). Ils m’ont invité à partir voir d’abord l’équipe et dès mon arrivée j’ai tout de suite aimé cette équipe. Durant mon séjour, j’ai vu que leur projet était intéressant, donc j’y ai adhéré. La phase aller du championnat venait de s’achever et le club occupait la 6è place du classement. J’ai commencé le travail le 3 février et depuis ce jour jusqu’à maintenant tout se passe bien.

L’Essor : Vous étiez entraîneur d’une équipe de première division malienne, l’AS Performance que vous avez quittée au profit de l’ASCK. Qu’est-ce qui justifie ce choix ?
Jonas Komla : Dans la clause du contrat que j’ai signé avec l’AS Performance, on avait convenu que je pouvais partir à tout moment si j’ai une proposition d’un club étranger. Pourquoi le choix de l’ASCK ? Comme je l’ai dit plus haut, le projet de l’équipe m’a plu et en plus le club a remporté le titre de champion du Togo la saison dernière. L’équipe a participé à la coupe CAF, mais a été éliminée lors de la phase des barrages. Vu le potentiel et la ressource que le club a, je me suis dit que c’est un autre challenge à l’extérieur qu’il fallait tenter. Pour un entraîneur, c’est toujours bien de travailler à l’extérieur parce que ça renforce l’expérience et le niveau. C’est pour toutes ces raisons que j’ai accepté de venir avec le plein accord des dirigeants de l’AS Performance.

L’Essor : Combien d’équipes évoluent en première division togolaise et quelle place occupait l’ASCK au moment de l’arrêt du championnat pour cause de crise sanitaire ?

Jonas Komla : Il y a quatorze équipes en première division togolaise et l’ASCK occupait la 3è position avant l’arrêt de la compétition pour cause de la Covid-19. Le championnat s’est arrêté après 20 journées de débats, il restait 6 journées à jouer et l’ASCK était à trois points du deuxième et à 6 longueurs du 1er du classement.

L’Essor : Le sport mondial est à l’arrêt depuis mars à cause de la Covid-19. Comment ça se passe au Togo ? Est-ce que la saison a été annulée et quelle est votre situation personnelle ?

Jonas Komla : La saison vient d’être annulée par la Fédération togolaise de football (FTF) en raison de la persistance de la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19. Ça veut dire que l’équipe qui est classée première qui est l’ASKO de Kara est déclarée vainqueur du championnat. La fédération a précisé que c’est cette équipe (ASKO de Kara) et le deuxième du classement, à savoir l’Unisport qui représenteront le Togo dans les compétitions africaines des clubs lors de la prochaine campagne. La saison est donc terminée ici, mais les dirigeants de l’ASCK m’ont déjà demandé de poursuivre le travail parce qu’ils sont contents des résultats obtenus par le club. Concernant ma situation personnelle, j’ai eu quelques difficultés au début de la crise sanitaire, mais maintenant tout est rentré dans l’ordre. Je me sens bien ici et mon ambition est de réaliser quelque chose avec cette équipe. En tout cas, je suis prêt à tout donner pour permettre à l’ASCK d’atteindre la place qui est sienne.

L’Essor: Est-ce qu’il y a des joueurs maliens dans le championnat togolais et combien sont-ils ?

Jonas Komla : Il y a deux joueurs maliens dans le championnat togolais. Il y en a un qui évolue avec l’AS Togo Port de mon frère Bréhima Traoré alors que l’autre joue avec l’équipe de Gbohloé-su des Lacs. J’ai de très bonnes relations avec Bréhima Traoré, nous faisons comme si nous étions au Mali. Bréhimablen est comme un frère, nous avons travaillé ensemble au sein de la sélection nationale cadette et depuis, nous gardons des contacts réguliers. Depuis que je suis là, Bréhimablen ne cesse de me donner des conseils et en retour, je fais en sorte que tout se passe bien pour lui.

L’Essor : Baye Bah, Cheick Oumar Koné, Alou Badra Diallo «Conti», pour ne citer que ces noms ont également obtenu des contrats à l’extérieur. Apparemment, les techniciens maliens ont la côte sur le continent, qu’en pensez-vous ?

Jonas Komla : Les entraîneurs maliens ont de la valeur et je ne suis pas du tout surpris de voir autant de techniciens de notre pays diriger des clubs étrangers. La seule coupe d’Afrique des clubs que le Mali a remportée (coupe CAF, ndlr), c’était avec un entraîneur local, en la personne de Djibril Dramé que je salue au passage. Les techniciens ont de la valeur, nos dirigeants doivent faire confiance aux entraîneurs maliens. Pour moi, le seul problème des entraîneurs réside dans le fait que nos dirigeants ne nous font pas confiance.

L’Essor : Si on vous demande de faire une comparaison entre le championnat malien et celui du Togo, que diriez-vous ?

Jonas Komla : En général, il n’y a pas une grande différence entre les championnats africains, surtout dans les pays sub-sahariens. Cependant, je dois dire qu’ici au Togo, les clubs donnent plus de moyens aux entraîneurs qu’au Mali. Pour obtenir des résultats, un entraîneur doit être dans de bonnes conditions de travail, tout comme les joueurs. Ce n’est pas souvent le cas au Mali et je suis bien placé pour le dire. Je pense que nos dirigeants doivent faire des efforts à ce niveau, s’ils veulent obtenir des résultats sur l’échiquier continental. Je voudrai donc profiter de cette interview pour demander aux dirigeants sportifs maliens de se pencher sur les conditions de travail des entraîneurs et des joueurs et de s’inspirer de l’exemple d’autres pays.

L’Essor : Vous avez dirigé la sélection nationale cadette du Mali, mais l’expérience n’a pas été concluante. Avec le recul, comment expliquez-vous cet échec ?

Jonas Komla : Pour moi, ce n’est pas un échec, parce que nous avons atteint l’objectif qui a été fixé par la Fédération malienne de football (Femafoot). A notre prise de fonction, l’objectif était clair : qualifier la sélection nationale aux phases finales de la CAN et de la Coupe du monde, ce qui a été fait. Certes, nous n’avons pas pu rééditer l’exploit de nos devanciers qui ont été vice-champions du monde, mais, je le répète, nous avons atteint l’objectif fixé par la fédération.

L’Essor : La plupart des techniciens s’accorde à dire que le football malien regorge de talents, mais jusque-là, la sélection nationale senior n’a pas réussi à soulever un trophée continental. Selon vous, qu’est-ce qui manque encore à notre pays pour vaincre le signe indien ?

Jonas Komla : Pour moi, ce qui manque au football malien, c’est le travail sur la durée. On ne peut bâtir une équipe compétitive en un ou deux ans. Je pense que les gens commencent à le comprendre. Aujourd’hui, nous avons beaucoup de jeunes talents en sélection nationale, il faut leur faire confiance et leur donner le temps de grandir. Je suis sûr que si on se montre patient avec la génération actuelle, elle va donner satisfaction à notre pays. Ces jeunes ne sont pas encore matures, c’est un groupe jeune qu’il faut encadrer et surtout éviter de mettre la pression sur lui. Il faut qu’on soit patient avec les jeunes qui évoluent pour la plupart dans les grands championnats européens et qui ont l’avantage d’avoir évolué ensemble dans les sélections de catégorie d’âge.

L’Essor : Êtes-vous prêts à prendre les rênes des Aigles, si la Fédération malienne de football vous fait appel ?

Jonas Komla : Aujourd’hui, je suis avec l’ASCK du Togo, je me consacre entièrement à cette équipe et je ne voudrai pas brûler les étapes. J’ai connu de très bons moments avec la sélection cadette, pour moi, il est un peu trop tôt de parler des Aigles. Le technicien qui est là, Mohamed Magassouba est un grand frère et aussi un ami, il a de l’expérience et a toutes les chances de réussir avec les Aigles. Evidemment, tous les techniciens rêvent de diriger la sélection nationale de leur pays, mais très honnêtement, je ne pense pas encore aux Aigles.

Interview réalisée par
Djènèba BAGAYOKO

Source : L’Essor

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