Le doute plane sur la tenue des élections législatives prochaines dans certaines localités du Mali, notamment dans les régions du centre. Les attaques terroristes contre les positions des FAMa et l’abandon des camps par celles-ci expliquent cette inquiétude.
Le gouvernement tient à la tenue des législatives prochaines comme à la prunelle de ses yeux. Les candidats, surtout les nouveaux, dans leur rêve, se voient déjà à l’hémicycle. Mais ils semblent minimiser la grande menace qui pèse sur la tenue de ces élections dans certaines localités, au centre surtout. Les attaques répétitives contre les positions des FAMa et l’abandon des camps par celles-ci dans les régions de Mopti et Ségou expliquent combien la tenue de ces élections est incertaine.
En effet, dans la nuit du 22 au 23 janvier 2020, les FAMa ont été attaquées à Dioungani . Des militaires y ont perdu la vie. Les rescapés ont, selon les sources locales, rejoint la ville de Koro. La même source nous indique qu’à la suite de l’attaque de Dioungani, les militaires basés à Diankabou ont rejoint la ville de Koro. Les populations, de cette localité délaissée, sont depuis sous la menace des forces du mal.
Dans la région de Ségou aussi, le camp de la Gendarmerie de Sokolo a été attaqué par les terroristes en début de la semaine dernière. Une vingtaine de FAMa y ont perdu la vie et le poste a été abandonné. À ces attaques s’y ajoute celle du Point A, jeudi vers 3 heures du matin, dans le secteur de Macina où un gendarme a perdu la vie et un pick-up de l’armée aurait été emporté par les assaillants.
Face à ces multiples attaques qui coûtent la vie aux militaires maliens et qui coupent le sommeil aux populations, comment l’État pourrait-il sécuriser les campagnes et les scrutins dans ces conditions ? Va-t-il mettre en place un dispositif sécuritaire spécial pendant cette période ? Y a-t-il une nécessité de sous-traiter la sécurité avec les milices pour la tenue des scrutins ? Les réponses à ces questions nous édifieront sur la possibilité ou non de la tenue de ces élections législatives dans certaines localités au centre du Mali.
L’organisation de ces élections est normale puisque les actuels députés ne sont plus légitimes. Les populations ont donc besoin de porter leur choix sur des candidats qui les défendront dignement à l’Assemblée nationale. Mais toutes les conditions devraient être réunies pour la bonne organisation de ces élections. Le gouvernement devrait s’assurer que les candidats pourront faire leur campagne en toute sécurité et les populations, leur vote en toute tranquillité.
Tel n’est, malheureusement, pas le cas pour le moment. La tenue de ces élections est annoncée au moment où des Maliens, civils et militaires, perdent la vie dans les attaques. Au centre, particulièrement, il est difficile que ces élections se tiennent normalement si aucun changement n’intervient. Nombreuses sont ces localités dans les régions de Mopti et Ségou où il n’y a pas de forces armées maliennes. Dans ces localités, les terroristes dictent leurs lois. Et dans les zones où les FAMa sont présentes, elles sont victimes d’attaques barbares qui les obligent à abandonner leurs positions pour rejoindre une grande ville. Dioungani et Diankabou en sont des exemples. Au-delà des forces armées maliennes, des populations civiles sont chassées de leurs villages, leurs biens pillés et leurs bétails sont volés en longueur de journée. Partout, les forces du mal font des victimes. Tous ces maux constituent une menace grave contre la tenue des législatives au centre du Mali.
Si le gouvernement tient à les organiser coûte que coûte, deux décisions s’imposent à lui : mettre en place un dispositif spécial pour sécuriser les campagnes et les scrutins ou sous-traiter la sécurité avec les milices qui sont craintes par les terroristes. Et si le gouvernement optait pour le premier choix, les populations seront frustrées. Elles sentiront protégées par les autorités qu’en période électorale comme ce fut le cas de la présidentielle, en 2018.
En analysant toutes ces situations, tout observateur attentif comprendra que la tenue des législatives est incertaine au centre du Mali. Il revient aux autorités de déployer d’abord les forces armées maliennes dans les localités où elles sont absentes, les équiper comme il le faut. Cela est la condition sine qua non de la tenue de ces législatives. C’est d’ailleurs ce que nous a confié une autorité locale du cercle de Bankass : « Avant toute élection, le gouvernement doit d’abord chercher à sécuriser les populations et leurs biens. Il faut un dispositif permettant aux candidats de faire leur campagne et aux populations de voter en toute sérénité. Et cela n’est pas possible à l’heure actuelle ».
Boureima Guindo