Le Général Moussa Sinko Coulibaly est un officier de diplômes. Il a fait la prestigieuse Ecole Militaire de Saint Cyr en France, ensuite l’Ecole Militaire d’Accra, le Collège Inter-armes de défense de Yaoundé. Il fut Instructeur à l’Ecole de Maintien de la Paix Alioune Blondin Bèye, puis éphémère directeur de cabinet du capitaine Amadou Aya Sanogo chef de la junte militaire du CNDRE avant de devenir le ministre de l’administration territoriale pendant la transition conduite par le Président Dioncounda Traoré. Acteur clé dans le processus de signature « des accords de Ouagadougou » en juin 2013, entre le gouvernement du Mali et les Mouvements dans le Nord du Pays, il organisa avec succès les élections présidentielles remportées par le candidat du Rassemblement pour le Mali(RPM) Ibrahim Boubacar Kéita. Ensuite, il fut nommé Directeur de l’Ecole de maintien de la paix ‘’Alioune Blondin Bèye’’(EMP) ; une Ecole à vocation sous régionale. Récemment, à la surprise générale, il démissionne de l’armée et du poste de Directeur de l’EMP. Dans une interview qu’il nous a accordée vendredi 22 décembre 2017, il évoque les raisons de sa démission, fustige la mauvaise gouvernance actuelle et affiche les grandes ambitions qu’il nourrit pour le Mali. Lisez plutôt !
Le Pays : Il y a quelques semaines nous apprenions votre démission de l’armée et de votre poste de Directeur de l’école de maintien de la paix. Quelles sont les raisons d’une telle décision ?
Moussa Sinko Coulibaly : Les raisons sont simples. Il est facile pour tout le monde de faire le constat de l’état de dégradation de la situation générale du pays. Et je pense qu’il est de devoir de tout citoyen, en ce moment précis de l’histoire de notre pays, de faire tout ce qui est possible à son niveau pour essayer de contribuer positivement à l’amélioration de la situation. La condition militaire ne permettait plus de contribuer dans les différents domaines : politique, social, processus de paix, gouvernance. Donc, j’ai préféré me libérer de ce statut de militaire pour pouvoir, tout en continuant à contribuer dans les domaines de paix et sécurité, mais aussi contribuer dans les domaines politique, économique, social, culturel et le processus de paix.
Dans vos récentes sorties, et vous venez de le répéter, vous dénoncez la mauvaise gouvernance. Selon vous, quelles sont les causes ?
Je pense qu’aujourd’hui l’équipe dirigeante a renversé les priorités. Pour moi, les priorités de cette équipe c’est comment se faire plaisir et non comment prendre soin de la majorité de la population. Ils sont plutôt dans des agendas personnels, les calculs personnels et non servir la cause nationale. Ils sont là plutôt pour se servir. C’est ce qui explique aujourd’hui toute la mauvaise gouvernance que nous constatons.
Avez-vous des réponses appropriées, applicables à proposer ?
Disons, il y a des recettes simples à proposer : comment gérer efficacement les deniers publics de l’Etat ; comment amener nos jeunes frères et enfants à l’école ; comment améliorer le système de Santé ; comment faire en sorte qu’il n’y ait plus d’insécurité. Il y a des recettes simples que nous voulons mettre en place. Nous pensons que nous avons des solutions pour le Mali. Toutes ces solutions, nous pouvons commencer à les appliquer dès le premier jour si jamais le peuple malien décidait de changer l’équipe au mois de septembre prochain et nous confier une partie des responsabilités de la gestion de ce pays.
Vos camarades sont détenus il y a plus de quatre ans dans l’affaire dite ‘’ Bérets rouges’’. Ils dénoncent leur détention ‘’ arbitraire’’ et ont informé les autorités des actions qu’ils comptent entreprendre pour leur libération. Aux dernières nouvelles, ils auraient été déportés.
Quels sont vos rapports avec eux ?
Etes-vous d’accord avec leur démarche ?
Cet état fait démontre une partie du dysfonctionnement qui existe dans ce pays. Donc notre programme aussi concerne comment faire en sorte qu’on ait une justice efficace, une justice équitable, une justice pour tous. Notre combat se situe à ce niveau. Notre combat n’est pas pour une personne particulière.
Nous avions appris que vous êtes en train de faire une série de rencontres dans le cadre du changement. Avez-vous l’intention de vous lancer en politique et être candidat lors des élections présidentielles à venir ?
Avec les fonctions que j’ai assumées à travers la transition et après dans le premier gouvernement du mandat en cours, je peux dire que je n’ai jamais quitté la politique. Donc c’est une suite logique. Aujourd’hui effectivement, nous avons eu des séries de concertations avec la classe politique, la société civile, avec beaucoup de corps sociaux professionnels. Nous continuons toujours d’ailleurs avec les concertations. L’idée, c’est de faire un grand rassemblement le plus large possible, ouvert à toute forme de regroupement, à toutes les couches et sensibilités du pays, de faire la promotion du changement. L’objectif clairement affiché, c’est de pouvoir mettre en place une nouvelle gouvernance au mois de septembre prochain à travers les élections qui auront lieu au mois de juillet.
La crise du nord est l’une des causes de l’état actuel du Mali. Quelles solutions préconisez-vous ?
Je pense que nous pouvons continuer à partir de l’Accord d’Alger qui est déjà un processus en cours ; même s’il est en train de s’enliser. De l’Accord d’Alger, nous pouvons bâtir un processus solide et efficace.
Votre dernier mot à l’endroit du peuple malien
Je demande au peuple malien de ne pas se décourager, de ne pas penser que la crise que nous vivons actuellement est une fatalité. On a la chance dès le mois de juillet prochain de commencer à écrire un nouveau chapitre de notre histoire. Donc j’invite tous les maliens à se donner rendez-vous pour que l’opportunité qui nous est offerte de changer le cours de notre histoire qu’on ne rate pas cette opportunité.
Boubacar Yalkoué et Agmour
Le Pays