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MOUNTAGA DEMBELE, ENSEIGNANT A LA RETRAITE : « Que les magistrats sachent que le peuple est fâché contre eux »

Enseignant à la retraite, Mountaga Dembélé, accuse les syndicats grévistes de la magistrature de violation flagrante de la Constitution du 25 févier 1992. Selon lui, « si on était dans un pays normal, même étant en grève illimitée, les syndicats devaient observer le service minimum ». Entretien.

Le Focus : Quel est votre point de vue sur la grève illimitée des magistrats ?

Mountaga Dembélé : Je condamne avec fermeté la grève illimitée des magistrats. Les magistrats ont tort cette fois-ci. Au Mali, ce n’est pas le moment de grever à plus forte raison de décréter une grève illimitée.

Dans un pays normal, aller en grève illimitée, sans observer le service minimum, c’est occasionner sa radiation pure et simple des effectifs de la fonction publique. Il faudrait que les magistrats sachent que nous sommes fâchés contre eux. Il y a plus de 15 millions d’habitants au Mali. Nos compatriotes sont en prison. Les concitoyens ne sont pas jugés depuis bientôt trois mois. Ces détenus ont le droit d’être jugés. On n’est pas garant de la Constitution pour rien. On doit assumer nos responsabilités en toute circonstance.

Mais, aujourd’hui, les Maliens sont privées de leurs droits les plus absolus. Ces grévistes ont violé la loi. Ils doivent être sanctionnés pour ça. La vérité est que les magistrats ne cherchent que leur propre intérêt au-dessus de paisibles citoyens. Je le dit en tant qu’enseignant parce que nous sommes des partants volontaires à la retraite, nous revendiquons nos droits depuis 27 ans.

Qui, parmi ces magistrats grévistes, a défendu les droits des partants volontaires devant le président IBK ? Qui a lutté contre la corruption des élites, les pillages des biens publics, etc. ? Récemment, le Bureau du Vérificateur général a relevé beaucoup d’irrégularités dans les services étatiques. Quel magistrat a décidé de tirer l’affaire au clair ?

Hey, qu’ils nous collent la paix ! Là, où il y a droit on parle de devoir aussi. Ils doivent recommencer à faire leur travail honnêtement et dignement sinon là où nous sommes présentement ils ne font absolument rien pour sauvegarder les droits fondamentaux de la population malienne.

Qui a dit non à IBK dans le problème des partants volontaires, à part Malick Coulibaly, président de la Coalition nationale des droits de l’Homme (CNDH) ? Les autres doivent veiller à respecter la population malienne. Ceux qui veulent travailler peuvent recommencer le service dans l’immédiat sinon ceux qui ne sont prêts à recommencer le travail peuvent être licenciés, voire radiés par gouvernement. Ils ne valent pas mieux que les autres. Le Mali n’appartient à personne. Il appartient à nous tous. Nous avons les mêmes droits. IBK et Boubèye devraient prendre leurs responsabilités, faire en sorte que personne ne prenne le pays en otage. Quel culot ! Quelle folie des grandeurs de la part de ces magistrats véreux !  Vraiment, ils n’ont pas honte.

Le Focus : Quoi faire pour une solution pérenne, selon vous ?

M. D. : Je demande au président de la République Ibrahim Boubacar Kéita, président du Conseil supérieur de la magistrature, de dire toute la vérité aux syndicats grévistes de la magistrature (Sam et Sylima), car ils ne sont pas les seuls Maliens. Qu’ils le sachent clairement. Au Mali, il y a des jeunes diplômées qui n’ont pas d’emploi. En toute chose, la manière compte beaucoup. La grève est un droit, mais dans un cadre légal. Quand on observe une grève illimitée pour avoir son droit sans tenir compte l’état de la nation, on doit être sanctionné. Et ces grévistes méritent d’être sanctionnés pour l’acte qu’ils ont posé avec cette grève illimitée.

On comprend leur position. Ils sont dans les bureaux climatisés, voitures et maisons climatisées tous les jours. Les pauvres sont privées de leurs droits. En plus, ils veulent renforcer la sécurité autour d’eux-mêmes et augmenter leurs salaires. Et les autres Maliens alors ? Nous (partants volontaires à la retraite), on n’arrive même pas à subvenir à nos dépenses journalières.

Malgré notre pauvreté, on travaille dignement dans ce pays et nous ne partirons jamais en grève illimitée, parce que le patriotisme nous oblige. Aussi ils doivent comprendre que leurs revendications sont extrêmes. Enfin qu’ils regardent les conditions des citoyens lambda, le calvaire de la population et non les déplacements du président de la République.

Le Focus : Un dernier mot ?

M. D. : Il faut qu’ils (les magistrats, Ndlr) sachent qu’ils ne sont pas la seule couche à revendiquer des droits. On a la police nationale, les enseignants, les promoteurs d’écoles privées et les étudiants. Qu’ils mettent de l’eau dans leur vin. Qu’ils retournent au travail et qu’ils continuent la négociation avec le gouvernement. La grève illimitée n’a jamais été une solution.

Aussi le gouvernement doit-il chercher à connaître qui sont les magistrats grévistes aptes à travailler. Et le gouvernement doit initier des enquêtes dans les dossiers des grévistes, voir qui a fait quoi et comment ils gagnent leur vie en cette période de grève illimitée immorale ? Je suis dans le troisième âge. J’ai 73 ans et je commence vraiment à avoir peur dans mon pays. Le grand Mali perd ses valeurs, sa dignité, son honnêteté et son intégrité. Tant que la justice n’est pas indépendante, nous n’irons nulle part.

Propos recueillis par Hamissa Konaté          

  Le Focus

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