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MODIBO MAO MAKALOU, ECONOMISTE ET GESTIONNAIRE FINANCIER : « Les sanctions de la Cedeao/Uemoa frappent de plein fouet l’économie malienne… »

Plongé dans une crise multidimensionnelle menaçant même son existence, le Mali s’est malheureusement vu frappé depuis dimanche 09 janvier 2022 par la CEDEAO et l’UEMOA par une batterie de sanctions économiques aussi dures qu’inédites, au grand dam des populations. « Les impacts de ces sanctions sur l’économie malienne », tel était le thème d’une conférence débats animée, hier mardi 1erfévrier, par l’économiste et gestionnaire financier Modibo Mao Makalou, à la Maison des Aînés.

Très à l’aise, le conférencier a commencé par énumérer les sanctions édictées par la Cedeao et l’Uemoa contre le Mali : «  Gel des avoirs de la République du Mali dans les banques centrales de la Cedeao, suspension de toutes insistance et transactions financières en faveur du Mali par les Institutions de financement de la Cedeao, particulièrement la Bidc et la Boad, fermeture des frontières ». Traitant cette batterie de mesures de très «sévères, méchantes, illégales et illégitimes », Modibo Mao indique ‘’ qu’elles frappent de plein fouet l’économie malienne qui est tournée à 60% vers l’extérieur. A en croire l’économiste Makalou, il ne faut pas se leurrer, ces sanctions auront des impacts économiques, financiers et sociaux conséquents sur les populations déjà éprouvées par une crise multidimensionnelle (politico-sécuritaire, sociale, économique, humanitaire, alimentaire, et sanitaire) qui perdure depuis 2012.

Un blocus total sur le Mali ?

En prenant ces sanctions (politiques, diplomatiques et économiques) aussi dures qu’inédites, les chefs d’Etat de la sous-région ont été très méchants. « Ce n’est pas le Mali seulement, aucun pays de la sous-région ne peut longtemps tenir face à ces mesures », a-t-il laissé entendre. Avant de poursuivre : « La mise sous embargo du Mali, un pays entièrement dépendant des importations, le met dans une position inconfortable ». « Parce qu’il importe par ordre d’importantes ses produits du Sénégal, de la Côte d’Ivoire et du Burkina Faso. En plus de l’or et du coton commercialisés en Afrique du sud, aux Emirats et en Europe, le pays exporte du bétail principalement en Côte d’Ivoire et au Sénégal. Or, ce sont ces pays (Sénégal, Côte d’Ivoire et Burkina Faso) qui lui ont imposé des sanctions », explique l’économiste gestionnaire financier. Et Modibo Mao de prévenir la paralysie du fonctionnement quotidien de l’Etat : si rien n’est fait, le tarissement des stocks des commerçants dans les prochains mois engendrera fortement l’augmentation du prix des marchandises. Conséquence : le marché noir et le trafic prendront de l’ampleur. « Il n’est même pas exclu que les commerçants fassent disparaître les produits pour créer une pénurie artificielle », analyse-t-il. Certains produits comme le sucre, le ciment connaissent déjà une rupture sur le marché et pour de nombreux Maliens, ce sont des commerçants qui ont fait disparaître le produit sur le marché.

« Le kilo du sucre est vendu à 700 ou 750 francs par l’endroit et la tonne du ciment est ainsi passée de 95 000 à 130 000 FCFA », a expliqué M.Makalou, avant d’estimer : «  Avec le gel des avoirs de la République du Mali dans les banques centrales de la Cedeao, les chefs d’Etat de la sous-région veulent paralyser le fonctionnement quotidien de l’Etat, qui dépense par mois 155 milliards de FCFA, dont 70 milliards uniquement pour les salaires ».

À la longue, alerte Modibo Mao Makalou, cette somme sera difficilement mobilisable, puisque les douanes et les impôts qui sont les principaux pourvoyeurs de recettes de l’Etat se trouveront handicapés par la fermeture des frontières. Pour preuve, les douanes doivent mobiliser 1600 milliards cette année. Mais pour sur une prévision de 60 milliards, la douane n’a pu réaliser que 32,5 milliards de FCFA en janvier 2022.

Selon le conférencier, en plus de la douane, l’impact immédiat des sanctions économiques pourrait avoir des répercussions sur les opérations militaires en cours, l’argent étant le nerf de la guerre. « Car sur le terrain, les forces de défense et de sécurité ont besoin de moyens pour mener à bien l’opération de reconquête engagée depuis des semaines », a souligné M. Makalou.

Et les sanctions édictées par les deux institutions sous-régionales, à en croire le gestionnaire financier, ne sont pas de nature à favoriser le ravitaillement des forces sur le théâtre des opérations. « Ce qui n’est pas souhaitable surtout dans cette période où les forces de défense et de sécurité engrangent des victoires éclatantes sur le terrain », regrette-t-il, avant de s’interroger sur le financement du déficit budgétaire qui s’élève à 617 milliards en 2022. Ce déficit, souligne l’économiste, est financé par les emprunts sur le marché financier de l’Uemoa, à travers l’émission de titres publics et l’appui budgétaire des partenaires techniques et financiers.  Or, le Mali a été empêché le 12 janvier 2022 de lever 30 milliards FCFA sur le marché monétaire de l’Uemoa, suite aux sanctions financières de la Cedeao. Les partenaires techniques et financiers quant à eux n’ont jusqu’ici rien annoncé en termes d’appui budgétaire. Toujours selon les explications du conférencier, les sanctions imposées par la Cedeao vont impacter négativement sur les investissements qui ne représentent du reste que moins de 30% du budget de l’Etat.

En tout cas, force est de reconnaitre que ces sanctions qui provoquent déjà une inflation et laissent craindre des pénuries dans plus sieurs secteurs, ont de lourdes conséquences : pour l’économie et pour les Maliens. Il urge de trouver très rapide une solution pour la lavée de ces sanctions qui constituent une impasse pour le Mali comme pour ses voisins.

Agoumour

Source: Le Démocrate

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