Comme cinquième invitée, la rubrique Icône-Femina reçoit Mme Aïssata Sidibé, communément appelée Bijou. Native de Bamako Coura, elle a fréquenté des écoles catholiques cotées de Bamako, avant d’être de la 2è promotion de la filière socio-anthropologie de la Flash. Depuis lors elle travaille à l’Inps où elle est actuellement chef du service des Relations publiques. Mère de trois enfants, elle parvient à gérer son calendrier malgré un calendrier chargé par ses activités professionnelles, sociales et politiques car elle est cadre du parti Fare Anka Wuli.
« Les femmes doivent beaucoup plus avoir confiance en elles-mêmes »
Née au quartier Bamako Coura il y a de de cela 38 ans, Mme Aïssata Sidibé y a grandi jusqu’à l’âge de 15 ans, avant de s’installer à Kalabancoura où ses parents venaient de terminer la construction de leur nouvelle maison.
Mais elle garde encore en souvenir cette douce enfance passée à Bamako Coura où « je reste marquée par tout cet amour qui m’entourait » dit-elle, pour faire allusion à l’éducation africaine qu’elle a reçue dans une grande famille à l’Africaine. « En dehors de mon père et de ma mère je bénéficiais de l’attention de tout le monde, les tantes, les oncles, et je me rappelle encore les journées que je passais avec ma grand-mère maternelle. Mon enfance à Bamako Coura, ce n’est que de beaux souvenirs », se rappelle Mme Aïssata Sidibé dite Bijou qui décrit avec une grande joie ces moments de jeunesse où il y avait donc du beau monde autour d’elle pour forger son éducation ancrée dans les grandes valeurs africaines.
Actuellement responsable des Relations publiques à l’Institut national de prévoyance sociale (Inps), elle ne rencontre pas de difficulté pour conduire ses missions que facilite son éducation à l’Africaine qui aiguise le sens des contacts tout en laissant une place importante au discernement.
Il faut rappeler qu’elle a intégré l’Inps, la seule structure où elle a eu à travailler, depuis qu’elle est entrée en production, après de brillantes études à la faculté des Lettres, des Arts et Sciences Humaines (Flash) de Bamako où elle a obtenu une Maîtrise de la deuxième promotion de Socio-Antropologie de cette faculté.
Signalons qu’auparavant, Mme Aïssata Sidibé dite Bijou a fait ses études primaires et secondaires dans les écoles catholiques, plus précisément aux Cours Sainte Thérèse du Fleuve, avant d’intégrer le Lycée Notre Dame jusqu’à l’obtention du Diplôme d’études fondamentales (Def). Elle a ensuite passé quelques mois au Lycée des jeunes filles pour revenir, la même année, au Lycée Notre Dame où elle a décroché son baccalauréat.
Au moment où elle prenait fonction à l’Inps, on ne parlait pas autant de l’approche genre, comme maintenant. En son temps, la tendance générale était que les femmes devaient se débattre dans la jungle des machos. Il fallait du caractère, de la baraka et surtout du soutien pour ne pas sentir cette pesanteur dans son lieu de travail. « Je n’ai pas eu de problème particulier à ce niveau-là. J’avoue que j’ai senti cette différence qui se faisait entre les hommes et les femmes au départ seulement, mais ma chance est que j’ai eu, comme premier directeur de service, une dame très forte et très brave. Elle m’a beaucoup impressionnée et m’a donc inspirée. Mais il faut dire qu’après, j’ai noté que les choses s’amélioraient petit à petit et je dois dire même aujourd’hui qu’il n’y a presque plus cette différence homme-femme dans nos services ».
C’est d’autant plus vrai qu’aujourd’hui elle est responsable des Relations publiques de l’Inps et s’en tire bien car comme elle le dit : « Je suis toujours en contact avec les hommes dans le cadre de mon travail, mais il n’y a pas de confusion du genre. Un respect mutuel caractérise nos relations de travail surtout avec la presse où il y a plus d’hommes que de femmes, mais ce sont tous mes amis et me respectent bien ».
Il faut souligner que l’éducation qu’elle a reçue, notamment celle africaine fondée sur la grande famille où chacun y va de ses humeurs, lui a beaucoup facilité le travail de Relations publiques qu’on lui a confié. En effet, cette éducation l’a forgée suffisamment pour la préparer à évaluer rapidement les situations afin de choisir la meilleure démarche permettant d’atteindre ses objectifs efficacement et rapidement.
Mais ne pense-t-elle pas que les femmes ont encore un combat à mener pour accéder à davantage de postes de responsabilités ? « Oh que si ! » répond Mme Aïssata Sidibé, avant d’ajouter : « Les femmes doivent beaucoup plus s’affirmer, avoir beaucoup plus confiance en elles-mêmes et arrêter d’être dépendantes des autres ».
Mais comment les femmes doivent-elles s’affirmer, selon elle ? « Les femmes doivent étudier d’abord. Surtout les jeunes filles, elles doivent accepter d’étudier et d’aller jusqu’au bout. Les études sont très importantes pour ouvrir certaines portes de responsabilités de nos jours ».
Mais il n’y a pas que les études. Il faut aussi que les femmes changent de comportement pour ne plus être enfermées dans des stéréotypes du genre : « Elles ne pensant qu’à gaspiller de l’argent en dépenses ostentatoires comme les « sumu » et autres événements organisés pour du « m’as-tu-vu ». Qu’en pense Mme Aïssata Sidibé dite Bijou ? « C’est une réalité » reconnaît-elle. Mais elle-même abhorre le gaspillage. « Moi je peux dépenser follement strictement dans le cadre familial, mais pas pour me faire voir à la télévision ou pour autre chose. Quand cela concerne ma famille directe, à savoir mon père, ma mère, mes sœurs, mes frères, là je n’hésite pas à dépenser sans compter car je le fais par solidarité, par devoir familial et social. Ce n’est donc pas pour que l’on parle de moi. Il y a des gens qui exagèrent vraiment à la télé et publiquement pour faire de l’ostentation. S’il faut aller prendre un crédit pour faire des choses comme cela, ce n’est vraiment pas la peine. Cela n’apporte rien du tout. Raison pour laquelle, moi je préfère la vie discrète pour être tranquille dans mon coin » laisse-telle entendre.
Puis elle précise : « Vous savez, on peut donner tout ce que l’on veut à quelqu’un, sans faire une publicité autour de ce geste et il y a encore des gens qui le font. Mais si on donne pour qu’on en parle, je ne suis pas de cet avis-là. Maintenant, chacun est libre de faire ce qu’il veut, selon sa vision des choses. Mais la vie actuelle nous appelle à plus de retenue, voire de rationalité dans les dépenses pour mieux construire l’avenir de ce pays et celui de nos enfants ».
En dehors de ses activités professionnelles, Bijou qui aime bien la marche comme activité sportive, est engagée dans activités associatives, en plus d’être une femme politique. En effet, comme activité associative, il faut noter qu’elle est dans des tontines « avec les amies, les camarades d’école et la famille, plus précisément entre cousines » révèle-t-elle. Ces tontines se passent les samedis. « Trois samedis du mois » précise-t-elle.
En tant que femme politique, elle est membre du secrétariat exécutif du parti Fare Anka Wuli où elle est secrétaire nationale adjointe chargée des mouvements associations et des groupements socio professionnels. Elle estime qu’il faut bien un changement dans la vision des responsabilités à confier aux femmes. « Il faut que ça change parce que chez nous au Fare ça change parce que c’est une femme qui est 2è vice-présidente. Il faut donc qu’il y ait une nouvelle manière de voir la femme au sein de la politique. Il faut même que l’on change la manière de faire de la politique ».
Et que pense-t-elle donc du quota de 30% réservé aux femmes pour les postes électifs et sur les listes électorales ? « C’est mieux que rien car même cela on ne parvient pas à le respecter. On va donc se contenter de ça, mais qu’on respecte ce principe d’abord ».
Selon elle, gérer toutes ces activités et s’occuper comme il faut de sa famille, ce n’est pas facile. Mais il faut trouver la solution pour le faire « car être femme, c’est aussi cela » dit-elle. En effet, elle avoue qu’avec ses charges professionnelles et ses activités politiques et sociales elle n’a pas trop de temps à accorder à la vie familiale, mais ses trois enfants n’en souffrent aucunement car elle sait aménager son agenda pour être à leurs côtés au moment où il le faut.
Comme message à lancer aux femmes, selon la tradition de cette rubrique, Mme Aïssata Sidibé dite Bijou les appelle à la solidarité : « J’appelle les femmes à plus de solidarité entre nous les femmes. Nous constituons la majorité dans ce pays, mais sans une vraie solidarité nous gagnerons difficilement la place qui nous revient dans le fonctionnement du pays. C’est clair que sans une vraie solidarité, nous les femmes, nous ne pourrons aller là où nous devons atteindre. Le problème, c’est entre nous-mêmes. Il faudrait donc que chacune de nous prenne conscience de la nécessité de nous donner la main, franchement. Si nous le faisons, nous pouvons régler beaucoup de problèmes du pays ».
Amadou Bamba NIANG
Par Le Challenger