En prélude du référendum constitutionnel du 18 juin, le Cnid a organisé le samedi dernier au CICB un exercice dit d’appropriation pédagogique du document de projet de la nouvelle Constitution en dix points questions-réponses avec comme conférencier le président du parti, Me Mountaga Tall, un des acteurs majeurs de l’avènement de la démocratie au Mali.
Autre les militants du parti Cnid/Faso Yiriwa ton, quatre membres du gouvernement, dont le ministre de la Refondation de l’Etat chargé des Relations avec les institutions, Ibrahim Ikassa Maïga, de l’Urbanisme et de l’Habitat Bréhima Kamena (membre du Cnid) ont assisté aux débats.
Des membres du CNT, des président des formations politiques comme Jeamille Bittar, Hamed Sow… étaient aussi de la partie. Sans oublier les leaders religieux à l’image des leaders du Haut conseil islamique, du fils de Cherif Ousmane Madani Haïdara, Tidiane Haïdara.
Dans un exposé de près de deux heures, le président du Cnid a décortiqué en dix points cette nouvelle Constitution.
Qu’est-ce qu’une une Constitution ? La Constitution a-t-elle vocation à résoudre tous les problèmes du Mali et des Maliens ? Peut-elle être parfaite ? Telles furent les premières questions à laquelle le conférencier a répondu. A ces interrogations, le conférencier de rappeler que la Constitution est la norme la plus élevée de l’ordre juridique, dont découlent toutes les autres règles. Elle est au sommet de la hiérarchie ou de la pyramide des normes. Aussi, il a ajouté qu’une Constitution n’est jamais parfaite.
“Nul, y compris ses initiateurs, ne peut en être entièrement satisfait ni en être totalement insatisfait. Elle ne peut non plus régler tous les problèmes d’un pays en un instant T”, a-t-il déclaré d’ailleurs c’est pourquoi il a pris l’exemple sur certains pays cités comme des références en matière démocratique dont la France et les Etats-Unis dont les Constitutions ont été révisées à plus de 20 reprises.
Est-ce que le projet de Constitution est la négation de celle de 1992 ? Jette-t-elle à la poubelle la Constitution de 1992 ?
En répondant à cette question, Me Tall de préciser que le besoin de rénover la Constitution de 1992 a été exprimé, sans succès, par les trois présidents de la République élus depuis 1992. Pour lui, la Loi fondamentale adoptée en 1992, quoi qu’on en dise, a tenu trente ans. Mais, depuis son adoption il y a une trentaine d’années, la pratique politique et institutionnelle du Mali et l’évolution du monde ont mis en évidence la nécessité de prendre en compte de nouvelles réalités.
Pour Me Tall, la Constitution en cours d’adoption complète et actualise celle de 1992. “Et il n’y a pas de conflit, mais une complémentarité entre elles”, a-t-il martelé. S’agissant de savoir si un régime de Transition peut initier une nouvelle Constitution, il a répondu par l’affirmative évoquant les cas de la Constitution du 2 juin 1974 qui a été initiée et adoptée sous un régime d’exception et de parenthèses constitutionnelles dans un contexte de forte répression et celle de 1992 qui a été adoptée sous un régime de transition démocratique.
Se prononçant sur l’épineuse question de la laïcité, Me Mountaga Tall de clarifier que l’Etat laïc n’est pas irréligieux mais il n’est pas non plus fondé sur une seule religion.
“Ainsi l’Etat laïc ne doit pas rejeter les religions : ceci est le fait d’un Etat irréligieux comme Cuba jusqu’en 1992 ou d’ailleurs l’athéisme d’Etat a été aboli et remplacé par la laïcité ou de certaines anciennes démocraties populaires. L’Etat laïc n’est pas non plus gouverné sur la base d’une seule religion comme l’Arabie saoudite ou la Mauritanie. L’Etat laïc intègre toutes les religions, les respecte toutes mais se tient à égale distance d’elles ; ce qui induit la prise en compte de leur importance respective. Enfin L’Etat laïc peut et doit aider les citoyens à pratiquer leur foi”, a argumenté Me Tall.
Pour ceux qui est de la place accordée aux Maliens de l’extérieur dans ce projet de Loi fondamentale, le conférencier de poursuivre qu’elle est importante dans la mesure où il n’y a aucune restriction pour aucune fonction politique pour les Maliens établis à l’extérieur.
Comme atout avec cette nouvelle Constitution, il a ajouté que tous les Maliens établis à l’étranger peuvent désormais siéger sans ambiguïté à l’Assemblée nationale (article 96). Ils peuvent également être sénateurs (article 97), siéger au Conseil économique, social, environnemental et culturel leur reste ouvert (article 168).
Sans oublier qu’ils peuvent être Premier ministre, ministres, ambassadeurs, présidents d’institution, maires ou conseillers municipaux. “Ils peuvent être président de la République sans condition spécifique. Et la restriction de ne pouvoir se présenter à l’élection présidentielle pour un candidat qui dispose de deux nationalités s’applique à tout Maliens”, Me Mountaga Tall, dixit.
Le projet de Constitution lutte-t-il contre la corruption et moralise-t-il la vie publique au Mali ? Affirmatif, selon le président du Cnid qui a évoqué 10 points pour soutenir son argument. Il s’agit de l’impossibilité pour la Cour constitutionnelle d’inverser les résultats proclamés par des juridictions inférieures, la possible destitution du président de la République, des présidents de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique, social, environnemental et culturel. (Article 73), la responsabilité pénale du président. La responsabilité du président de la République peut être engagée pour des faits qualifiés de haute trahison (article 73). Aussi, il est désormais pénalement responsable, devant les juridictions de droit commun, des crimes et délits commis en dehors de l’exercice de ses fonctions. Sans oublier la fin des immunités pour les membres du gouvernement qui sont désormais pénalement responsables des crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions (article 82 et 103), la déchéance du mandat de tout député ou conseiller de la Nation qui fait l’objet d’une condamnation pénale définitive à la demande du ministre de la Justice ou de tout citoyen, la fin du nomadisme politique. Aussi, le champ d’action de l’immunité des parlementaires a été fortement réduit par suite des abus et dérives constatés. “Ainsi, les députés et les sénateurs ne bénéficient de l’immunité parlementaire que dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions (article 103)”, a-t-il soutenu avant de citer la Cour des comptes (article 156) chargée de recevoir les déclarations de biens des assujettis et du contrôle des comptes des partis politiques.
Ce projet, a-t-il martelé, renforce nos valeurs religieuses et sociétales ancestrales met en valeurs nos langues nationales. En tout cas Me Tall s’est dit convaincu que nous n’avons pas le droit de nous diviser autour d’une question aussi essentielle en des temps aussi difficiles pour le Mali.
“Les divergences d’opinion sont de la nature même d’un débat référendaire. Ceux qui croient au oui doivent convaincre les sceptiques jusqu’au dernier jour de la campagne dans le respect réciproque”, a-t-il conclu.
Le ministre Ibrahim Ikassa Maïga, le président du Haut conseil des Maliens de l’extérieur, Habib Sylla, et beaucoup d’intervenants ont salué cet exercice pédagogique de Me Tall et ont invité nos compatriotes à sortir massivement pour voter oui au référendum du 18 juin.
Notons que c’est à travers ces différents arguments que le président du Cnid Me Mountaga Tall a révélé qu’ils vont voter oui au référendum constitutionnel.
Kassoum Théra
Source : Aujourd’hui-Mali