La mode malienne connait de plus en plus une grande évolution. Beaucoup de nos compatriotes se sont orientés vers ce secteur pourvoyeur d’emploi. Avec un génie dont eux-seuls détiennent le secret, les créateurs de modes valorisent indéniablement le consommé malien. Des habits faits à base de coton ou de banco, sont de plus en portés par les maliens, surtout par des hauts responsables du pays. Toute chose qui donne de l’oxygène à l’économie malienne.
Pour mieux connaitre ce secteur, nous sommes allés à la rencontre de Maria Bocoum, créatrice de mode. Cette grande actrice de ce secteur que nous avons rencontré à l’occasion de la deuxième édition du SIAMA au parc d’exposition de Bamako le samedi 16 Novembre dernier, nous révèle les grandes difficultés du monde textile malien et ses nombreuses opportunités. Suivez l’interview qu’elle a bien voulu nous accorder.
Figaro Mali : Présentez-vous s’il vous plait.
Je suis Maria Bocoum, créatrice de mode malienne et présidente de l’association « de fil en aiguille ». Une jeune association qui évolue dans la mode bio. Je suis dans ce domaine depuis une dizaine d’année.
Figaro Mali : Qu’est-ce qui explique votre présence au SIAMA.
Nous sommes là pour faire la promotion des différents textiles maliens. Parce que c’est les designers textiles qui créent le tissu, mais c’est nous qui le mettons en valeur. Notre souci c’est vraiment le textile malien qui n’est toujours pas à la place qu’il mérite. Car c’est un textile qui est aimé, mais qui contient beaucoup de lacunes et qui demande de formations et de renforcement de capacités.
Figaro Mali : Avez-vous de rapport avec la FNAM, qui est la faitière des artisans ?
Je n’ai pas vraiment de relation avec la FNAM. On n’est malheureusement tous un peu isolé. Et je crois qu’il est temps qu’on craie un écosystème du textile. Il faut que tous les acteurs du secteur se rencontrent, y compris les cotonculteurs et ceux qui égrainent. Car nous nous dépendons les uns des autres. Ce secteur est vraiment un secteur créateur d’emploi. Mais nous, nous dépendons beaucoup plus particulièrement des designers textiles.
Figaro Mali : Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
Nous avons beaucoup de difficultés à nous mettre ensemble. Nous avons créé beaucoup d’associations qui n’ont pas marché à cause des problèmes d’ego et de leadership. Alors que c’est quand on est uni que chacun peut tirer son épingle du jeu. Mais avec l’association qu’on vient de créer dont j’assure la présidence, nous ferons tout pour atteindre nos objectifs. Car nous avons l’un des meilleurs cotons du monde.
Figaro du Mali : Qu’est-ce qu’il faut pour que le malien porte le coton de son pays ?
Pour que le malien porte le coton de son pays, il faudrait d’abord que nous les créateurs arrivons à le couper de façon moderne. Nous devons aller vers les jeunes pour savoir ce qu’ils attendent de la mode africaine et essayer de les amener à l’aimer petit-à-petit. Mais je pense qu’on a un peu évolué, car de plus en plus les jeunes portent le bogolan en chemise et même lors de mariages. Il faudrait aussi que les designers textiles travaillent et ne restent toujours pas dans la même cotonnade. Les teeshirts et les jeans importés chez nous sont en coton. Alors qu’il existe des designers au Mali qui savent faire du jeans. Il faut juste les renforcer pour qu’ils puissent satisfaire la population malienne et d’arrêter de tout importer.
Figaro du Mali : Les gens estiment que votre prix est très cher par rapport aux textiles importés. Qu’est ce qui explique cela ? Le prix est cher car tout se fait à la main et c’est ce qui fait que ça prend trop de temps. Par exemple, pour tisser un pagne, il faut une journée et demie de travail plus le coton. Donc, forcément le prix correspond exactement au travail fourni, à l’énergie fournie.
Figaro Mali : votre dernier mot ?
Mon dernier mot c’est un vœu de voir une usine de textile au Mali. Notre textile est magnifique, mais il faut l’amener sur une autre dimension. Nous avons une ministre qui se soucie vraiment de l’artisanat textile. Parce qu’elle m’avait une fois chargé d’habiller tout le gouvernement en textile malien en collaboration avec le CDAT. Ça c’est très bien passé car les ministres ont été collaboratifs. Et depuis, j’ai énormément de commandes que je ne peux plus répondre à toutes les demandes. Il faut reconnaitre qu’on aime réellement le textile malien. Mais on n’en a pas beaucoup. Et je crois qu’il va falloir songer à former les jeunes, soit en teinture, soit en couture ou au tissage. Cela va beaucoup contribuer à diminuer le chômage. Enfin j’appelle tous mes collègues à l’unisson. Sinon, si chacun décide de rester dans son coin, gagner des petites miettes, le textile malien va rester tel qu’il est.
Boubacar Kanouté
Source: Le Figaro du Mali