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Mamadou I. Konaté, ancien ministre de la Justice : «Il est impossible de substituer la vérité au mensonge»

« Monsieur le Ministre de la Justice, la justice reste un sujet majeur dans notre pays. La justice peine à se faire accepter par la qualité de ses décisions. La justice souffre des influences et surtout des influences négatives, qu’elles soient d’origine politique ou sociale. D’autres types d’influence ont été jadis cités par un garde des sceaux que je salue au passage. En justice, le comportement des acteurs est essentiel et ultime.

Malgré tout, la justice même insuffisante, ne doit nullement être absente dans la gestion de nos terroirs, de nos communautés, de la cité. La justice est et demeure la première réponse à la situation de crise que traverse douloureusement notre pays et qui le menace jusque dans son socle social. La justice est un rempart absolu contre les violations, contre les excès et elle est le remède des contradictions. La justice est l’obstacle face au politique. La justice est le rempart puisqu’elle limite le politique dans son dessein d’abuser du pouvoir et contre les excès des gens du pouvoir. Elle est le bouclier qui doit protéger les faibles. Elle est l’épée qui doit frapper les puissants lorsque ceux-ci dévient du droit chemin au mépris du bien commun ». Voilà un extrait de l’intervention de Me Mamadou Ismaila KONATE à la cérémonie de passation, le 30 novembre 2017, au ministère de la justice. Après sa démission du 27 novembre dernier, Me Mamadou Ismaila KONATE a remis les clés du ministère de la justice à son successeur, Hamidou Youmoussa Maïga, magistrat à la retraite originaire  de Gao. Le désormais ancien ministre de la justice a prononcé un important discours qui sera acté dans les annales.

Monsieur le Ministre,

Monsieur le Secrétaire Général,

Monsieur le Chef de cabinet,

Messieurs les Directeurs des services centraux,

Madame la Directrice de la CPS,

Monsieur l’Inspecteur en chef de l’inspection des services judiciaires,

Madame et Messieurs les Conseillers techniques,

Madame et Messieurs les chargés de mission,

Mesdames et Messieurs les cadres et agents du Ministère de la Justice,

Mesdames et Messieurs,

En votre nom et en mon nom personnel, je voudrais souhaiter la bienvenue au nouveau ministre désormais en charge de la justice dans notre pays.

Monsieur le Garde des Sceaux, recevez plus personnellement mes vives et chaleureuses félicitations pour la confiance placée en vous. Cette confiance est à mon sens, méritée eu égard à vos qualités de magistrat, vos qualités d’homme, d’homme de droit et permettez-moi de le dire, d’homme droit.

Monsieur le Ministre, j’ai eu plaisir à servir la justice avec les hommes et les femmes en service au sein de ce département.

C’est le moment de les saluer. De saluer leurs mérites individuels et collectifs. De saluer leur courage. De reconnaître leurs mérites et leurs talents.

Principal trait de caractère d’un ministre de la justice : l’impopularité

Suivant une tradition bien de chez nous, qu’ils reçoivent mon profond regret de les quitter en si bon chemin. Les relations humaines et même professionnelles sont appréciées entre les défaillances et les excès des hommes et femmes qui se rencontrent, se côtoient, s’apprécient plus, peu ou moins. J’ai dû avoir un comportement et/ou une attitude défaillants ou excessifs à leur égard et qu’ils veuillent bien accepter mes excuses.

Sous tous les cieux, le principal trait de caractère d’un ministre de la justice est l’impopularité et vous comprendrez tous pourquoi.

Monsieur le Ministre de la justice, la justice reste un sujet majeur dans notre pays. La justice peine à se faire accepter par la qualité de ses décisions. La justice souffre des influences et surtout des influences négatives, qu’elles soient d’origine politique ou sociale. D’autres types d’influence ont été jadis cités par un garde des sceaux que je salue au passage. En justice, le comportement des acteurs est essentiel et ultime.

Malgré tout, la justice même insuffisante, ne doit nullement être absente dans la gestion de nos terroirs, de nos communautés, de la cité. La justice est et demeure la première réponse à la situation de crise que traverse douloureusement notre pays et qui le menace jusque dans son socle social.

La justice est un rempart absolu contre les violations, contre les excès et elle est le remède des contradictions. La justice est l’obstacle fait au politique. La justice est le rempart puisqu’elle limite le politique dans son dessein d’abuser du pouvoir et contre les excès des gens du pouvoir. Elle est le bouclier qui doit protéger les faibles. Elle est l’épée qui doit frapper les puissants lorsque ceux-ci dévient du droit chemin au mépris du bien commun.

Monsieur le Ministre, le réveil du juge est nécessaire dans un tel contexte. Pour peu qu’il veuille prendre conscience de sa mission et de ses prérogatives et reprendre du service, il observera la loi dans la cité et appliquera le droit aux gens de la cité. Il sévira contre les violations et rétablira l’équilibre social. Il limitera le pouvoir et ramènera le politique au service de l’intérêt général. Il jugera les faits au regard du droit et non de l’individu.

Aucune société ne peut se contenter d’apparences et de subterfuges. Il est impossible de substituer la vérité au mensonge, de confondre l’intérêt général à un intérêt particulier.

Aucune société ne peut vivre et se développer sereinement sans justice. Aucune société ne peut connaître paix, concorde et harmonie, sans justice.

La justice est pour tous et tous sont pour la justice.

Monsieur le Ministre, je n’ai pas le moindre doute que vous entendez bien ce message pour l’avoir compris jadis.

Monsieur le Ministre, je n’ai pas le moindre doute que vous agirez pour faire entendre aux juges à même de le comprendre encore qu’ils sont les plus utiles et les plus essentiels pour l’équilibre social. Que leurs absences et leurs défaillances donnent l’occasion à d’autres de se prendre pour ce qu’ils ne sont pas.

La mosquée à l’imam et la paroisse au curé.

Monsieur le Ministre, en vous remettant les clés de ce département que l’on m’a confiées il y a seize mois, je forme le vœu que vous ferez plus et mieux que ce que j’ai fait, pour faire tout ce que je n’ai pu faire et que j’aurais voulu faire,

Faute de temps,

Faute de moyens,

Faute de volonté,

Faute d’engagement,

Faute d’accompagnement et de soutien(s),

Faute d’accompagnants…

Monsieur le Ministre, bonne chance, bon vent sous la seule protection divine.

Source: Le Challenger

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