A vrai dire, la communauté internationale ne sait plus à quel Saint se vouer au sujet du Mali. Le pays est confronté à une crise multidimensionnelle depuis 2012. Pendant ces neuf dernières années aucun résultat probant n’a été atteint sur le front de la lutte contre l’insécurité. À présent, les autorités reconnaissent que près de 60% du territoire échappe à leur contrôle. L’absence de l’État dans plusieurs zones a exposé les populations aux groupes terroristes.
La dégradation de la situation malienne ne date ni du coup d’État du 22 mars 2012 conduit par le capitaine Amadou Haya Sanogo ni de celui du 18 août 2020 porté par le Colonel Assimi Goïta.
Au sujet des évènements du 24 mai 2021 ayant conduit à l’arrestation du Président de la transition et de son Premier ministre, les différentes parties prenantes peinent à donner un qualificatif, s’agit-il d’un coup d’État, d’une rectification de la transition ou encore d’une correction du coup d’État du 18 août 2021 ? L’absence de réponses claires à cette question démontre la grande complexité de la situation malienne.
« Dès l’instauration de la démocratie au Mali en 1992, le pays a pris la mauvaise trajectoire »
Ce qui se passe n’est autre que la conséquence de 30 ans d’échec démocratique à tous les niveaux. Pendant ces trois décennies, le Mali s’est enfoncé dans les pires travers de la gouvernance. La corruption est devenue systématique, à tel enseigne que le détournement des fonds dédiés à l’armée est devenu l’une des principales activités. La spéculation foncière, le blanchiment d’argent et le népotisme ont fini par détruire toutes les possibilités d’émergence d’un véritable État. La crise de la confiance est à son comble.
« Les citoyens ne votent plus par conviction. Les politiques sont dans des jeux d’intérêts et les militaires ne peuvent même plus faire confiance à leurs chefs ».
C’est le sombre tableau d’un pays détruit de l’intérieur par des principes qui auraient dû faire le bonheur de son peuple. Le travestissement de la démocratie malienne par ses éternels acteurs, a condamné des millions de Maliens, à travers entre autres, l’affaiblissement de son outil de défense et de sécurité.
La préoccupation majeure des Maliens est avant tout le rétablissement de la sécurité nationale et la relance économique.
« Le Mali a plus que jamais besoin de résultats et le Colonel Assimi Goïta peut et doit relever ce défi. Il le dit lui-même que les décideurs n’ont plus droit à l’erreur ! »
En effet, il fait partie de cette génération de militaires maliens qui a vécu de plein fouet la décadence des forces armées maliennes. Il a l’avantage de bien connaitre le théâtre d’opération pour avoir séjourné plusieurs années dans le centre et dans le nord du pays.
Le Colonel Goïta dispose désormais de tous les leviers pour inscrire au moins l’armée malienne sur une trajectoire de redressement pour les quelques mois restants de la transition qu’il dirige.
Il dispose de l’autorité et du dynamisme nécessaires au processus de redressement.
Cependant, il risque d’être confronté à un problème majeur, l’obligation de gouverner avec certains politiques n’ayant jamais pu apporter des réponses pertinentes aux problèmes des Maliens. Il doit trouver l’équilibre fondé sur la capacité de produire des résultats et de rassurer les citoyens maliens quant à la qualité des personnes devant gouverner avec lui pour l’atteinte des résultats.
La communauté internationale doit accompagner ce processus en ayant pour exigence la production de résultats. Le Mali doit consolider ses fondations sur lesquels devront s’ériger un processus démocratique de qualité.
Boubacar Salif Traoré
Directeur du cabinet Afriglob Conseil
Source: info-matin