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Mali : la junte d’Assimi Goïta réclame la fin des accords de défense, la France s’y oppose

Bamako a franchi un nouveau cap dans son conflit avec Paris en demandant la révocation des accords de défense entre les deux pays. Une décision qualifiée « d’illégitime » par le chef d’état-major des armées françaises.

Entre Paris et Bamako, le divorce se joue désormais sur plusieurs fronts. Dans une note verbale confidentielle adressée lundi 2 mai au chargé d’affaires de l’ambassade de France à Bamako, la junte au pouvoir au Mali a dénoncé les accords de défense conclus depuis 2013 avec la France et ses partenaires européens de la force Takuba.

Déplorant « une détérioration profonde de la coopération militaire avec la France », Koulouba reproche à Paris de « multiples violations de l’espace aérien malien, opérées par des aéronefs militaires français, au mépris de l’esprit du Traité de coopération en matière de défense » et dit regretter « l’absence de réponse aux demandes de révision du traité de coopération » formulées par Bamako en décembre dernier auprès du ministère des Armées français.

LA JUNTE SOUHAITE RÉVOQUER TROIS TEXTES MAJEURS QUI RÉGISSENT L’INTERVENTION FRANÇAISE AU MALI

Selon nos informations, celle-ci concernait la révision de plusieurs dispositifs figurant dans le traité de coopération militaire signé en 2014. Le Mali a notamment manifesté sa volonté de changer la loi qui encadre le stationnement des forces françaises au Mali et celle qui lie les deux pays en matière de renseignements.

Lourdes conséquences
Mais désormais, Koulouba veut bien plus. La junte souhaite révoquer trois textes majeurs qui régissent l’intervention française au Mali. Parmi eux, l’accord Sofa de 2013 encadrant le statut de la force « Serval », devenue « Barkhane » au Mali ; le traité de coopération en matière de défense de 2014, qui définit la collaboration militaire entre les deux pays ; et le protocole additionnel de 2020, déterminant le statut des détachements non-français du contingent européen Takuba.

Des textes qui n’ont pas tous la même importance. Mettre fin « immédiatement », comme le veut la junte, à l’accord Sofa de 2013 et à son protocole additionnel de 2020 aurait de lourdes conséquences. En revanche, la révocation du Traité de coopération de défense de 2014 aurait un faible impact. Les coopérations en matière de formations et d’échanges d’informations entre les deux pays sont aujourd’hui quasiment toutes suspendues et doivent prendre fin dans six mois, conformément à ce qui est prévu dans la loi.

Condamnation de Paris
La réaction de Paris ne s’est pas faite attendre. Dans un point presse convoqué mardi 4 mai, l’état-major français des armées a « condamné cette décision unilatérale des forces maliennes « , considéré comme « injustifiable ». « Nous considérons que l’analyse juridique présentée par les autorités maliennes, selon laquelle le Sofa est dénoncé avec “effet immédiat” en raison d’une “violation constatée de ce traité” est infondé, a fait savoir l’état-major. Nous avons toujours été soucieux d’observer toutes les règles qui ont été définies par les autorités [maliennes] au sein de cet accord. »

LES PARTENAIRES EUROPÉENS SERAIENT CONTRAINTS DE RÉARTICULER LEUR MISSION AU MALI OU D’Y METTRE FIN

Dans sa contre-attaque, Paris entend s’appuyer sur la convention de Vienne de 1969, afin de porter à douze mois le délai qui actera la fin de l’accord Sofa. L’alinéa 2 de l’article 56 stipule qu’« une partie doit notifier au moins douze mois à l’avance son intention de dénoncer un traité ou de s’en retirer conformément aux dispositifs du paragraphe 1. »

La fin immédiate de Sofa aurait des effets irréversibles sur le fonctionnement des forces françaises et européennes encore présentes au Mali. En effet, elle acterait la fin de la coopération militaire scellée il y a dix ans entre la France et le Mali. « Cela pourrait avoir de lourdes conséquences sur la force française et la force européenne Takuba. Celles-ci ne pourront plus être exemptées de visas, ce qui leur permettait d’entrer et de circuler librement sur le territoire malien, explique à Jeune Afrique Julien Antouly, doctorant en droit des conflits armés à l’Université Paris-Nanterre. Cela mettrait également fin à l’exonération douanière pour l’importation de matériels. »

Si cette dénonciation vise directement Barkhane, elle aurait également des répercussions immédiates sur la force européenne. L’article 1 du protocole additionnel de Sofa signé en 2020 stipule en effet que Takuba est « sous commandement français pour participer aux missions menées par la France au Mali ». La fin de l’intervention française dans le pays contraindrait ainsi les partenaires européens à réarticuler leur mission au Mali ou à y mettre fin.

Dialogue en coulisses
Reste maintenant à savoir quelles réponses donneront les autorités maliennes au blocage de la France. Dans l’immédiat, officiellement, Paris a donné une fin de non-recevoir. « Nous estimons que l’accord sur le statut de Sofa continuera à produire ses effets jusqu’à ce que le dernier soldat français quitte le sol malien », a précisé l’état-major français.

EN CAS DE RÉSISTANCE DE LA PART DE BAMAKO, LA FRANCE POURRAIT AVOIR RECOURS À LA « FORCE »

Si Paris espère que les voies diplomatiques suffiront pour ramener le calme, une source bien introduite nous assure, qu’en cas de résistance de la part de Bamako, la France pourrait avoir recours à la « d’autres moyens » dans le but de poursuivre la réarticulation de Barkhane au Sahel.

Source : Jeune Afrique

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