Le Mali et la Guinée ? « Ce sont les deux poumons d’un même corps ! », l’affirmation était du président Hamed Sékou Touré. Cette vision du leader de la révolution guinéenne a toujours été largement partagée par les dirigeants des deux pays. Sur les pas de leurs devanciers, les colonels Mamadi Doumbouya et Assimi Goïta œuvrent inlassablement au renforcement de la coopération entre les deux Etats. Des actes forts et même très forts ont déjà été posés entre Conakry et Bamako.
Le 9 janvier 2022 à Accra (Ghana), notamment les lourdes sanctions jugées « disproportionnées » infligées contre Bamako, et la réaction « nationaliste » et « ferme » des autorités maliennes soutenues par la Guinée ne se fait attendre.
La Guinée qui se trouve dans la même situation, membre de la Cédéao, n’entendait pas lâcher notre pays. Le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) dirigé par le colonel Mamadi Doumbouya l’avait fait savoir sans détour le lundi 10 janvier 2022 : « Le Mali peut compter sur le soutien de la Guinée, dirigée elle-même par une junte militaire, les autorités guinéennes ont fait savoir que les frontières du pays resteraient ouvertes au Mali ».
« Le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) tient à informer l’opinion nationale et internationale que la République de Guinée n’a, par conséquent, en aucune façon été associée à la décision du 4e sommet extraordinaire des chefs d’États de la CEDEAO en date du 9 janvier 2022 relative aux sanctions prises contre la République sœur du Mali. En conséquence, le CNRD réaffirme que les frontières aériennes, terrestres et maritimes de la République de Guinée restent toujours ouvertes à tous les pays frères conformément à sa vision panafricaniste », avait déclaré la Lt colonel Aminata Diallo, porte-parole du CNRD.
La Cédéao avait-t-elle omis ce détail ? La Guinée, malgré son statut de pays membre de l’organisation sous-régionale, et étant suspendue de ses instances, n’a logiquement pas été associée aux décisions finales du sommet extraordinaire du 9 janvier sur le Mali et par conséquent, ne se sent nullement engagée par les sanctions prises par contre son voisin. Mais qu’on se le tienne pour fait, le Mali et la Guinée sont dirigés respectivement par les colonels Goïta et Doumbouya. Deux dirigeants qui sont dans une logique de fermeté intransigeante par rapport aux conditions de la transition dans leurs pays respectifs, soutenus en cela par leurs peuples.
Le président Doumbouya et le président du CNT guinéen à Bamako
Aussi, pour sa première visite à l’étranger depuis sa prise de pouvoir, le président de la transition de guinéenne s’était rendu au Bamako à l’occasion de la célébration du 62ème anniversaire de notre pays.
Le colonel Doumbouya « a été accueilli, avec tous les honneurs, par le président [Assimi] Goïta ». . « Je suis à Bamako à côté de mon frère, le président Assimi Goïta, pour fêter l’indépendance du Mali et accompagner le peuple malien, qui est un peuple frère », dit le colonel Doumbouya.
Toujours dans la même dynamique de renforcer et de consolider les coopérations entre nos pays, le Président du Conseil National de la Transition guinéen à la tête d’une délégation de son institution a séjourné dans notre pays.
C’est ainsi que, le mercredi 05 octobre 2022, Dr Dansa Kourouma a pris part à la première réunion du bureau du CNT du Mali. Tout un symbole dans le cadre de la coopération entre les parlements transitoires de nos deux pays. L’initiative visait également à cimenter davantage les liens fraternels et amicaux entre Guinéens et Maliens.
Aujourd’hui, cette coopération est nourrie et entretenue par les colonels Mamadi Doumbouya et Assimi Goïta.
S’exprimant à cette occasion, le Président du CNT s’est réjoui de la convivialité et la confraternité qui ont caractérisés les échanges sous fonds de complémentarité entre les deux parties. Dr. Dansa Kourouma a aussi noté que cet acte va au-delà des discours et matérialise ainsi, la ferme volonté des deux parlements à marquer la véritable intégration par l’action.
Plusieurs sujets d’intérêts communs ont été débattus entre les conseillers nationaux Maliens et Guinéens. Cette rencontre constitue un point de départ d’une série d’activités qui sera menée conjointement entre les deux institutions législatives.
Avec cette initiative, les autorités des deux pays entendent imprimer une nouvelle dynamique qui favorisera l’intégration socio-politiques économique et culturelle.
Le Mali reconnaissant envers la Guinée
En retour, le Mali a décidé, le mercredi 28 septembre 2022, de “se désolidariser” des sanctions prises à l’encontre de la Guinée par la CEDEAO lors d’un sommet extraordinaire tenu le 22 septembre à New York aux États-Unis, a annoncé, le Premier ministre par intérim, le colonel Abdoulaye Maïga, porte-parole du gouvernement.
En effet, les dirigeants ouest-africains réunis, le jeudi 22 septembre 2022, à New York, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, ont décidé une série de sanctions visant certains responsables guinéens.
« Le gel des avoirs financiers » et « l’interdiction de voyager » sont les « sanctions ciblées à l’encontre des personnes et groupes de personnes » ou encore « les membres des autres institutions de la transition et toute autre personne cherchant à empêcher le retour à l’ordre constitutionnel en Guinée dans un délai raisonnable », avait indiqué la CEDEAO.
Le Premier ministre par intérim souligne que « compte tenu de la solidarité et de la fraternité entre le Mali et la Guinée, le gouvernement de la Transition décide de se désolidariser de toutes les sanctions illégales, inhumaines et illégitimes prises à l’encontre de la République sœur de Guinée et ne leur réservera aucune suite, d’adopter, si nécessaire, des mesures pour assister la République de Guinée, afin d’annihiler les conséquences de ces sanctions inutiles contre le peuple et les autorités de la Guinée ».
« Le gouvernement de la Transition souligne que l’objectif de la CEDEAO est d’améliorer les conditions de vie des populations et non d’adopter des sanctions contre-productives les
affectant ».
Enfin, le gouvernement malien exprime « sa solidarité indéfectible et son ferme soutien au peuple frère et au gouvernement de la République de Guinée dans leur engagement à jeter les bases d’une refondation de l’Etat guinéen à travers des réformes politiques et institutionnelles nécessaires à un retour apaisé, crédible et sécurisé à un ordre constitutionnel normal ».
Le colonel Abdoulaye Maïga affirme, toutefois, que « le gouvernement de la Transition reste ouvert, dans le respect mutuel et dans la cadre du panafricanisme, à toutes les initiatives sincères de recherche de solutions aux défis relatifs à la stabilité, à la paix et à la sécurité de notre sous-région ».
Autre acte posé par les autorités maliennes ? L’envoi d’une forte délégation lors de la célébration de son accession à l’indépendance, 2 octobre 2022.
En effet, le Premier ministre par intérim, le Colonel Abdoulaye Maïga, à la tête d’une forte délégation de haut niveau, s’était rendu à Conakry, le vendredi 30 septembre 2022, pour participer aux festivités marquant le 64è anniversaire de l’Indépendance de la Guinée.
La présence de cette forte délégation malienne à Conakry illustre les liens forts qui unissent les deux pays…
Auparavant, dans le cadre de renforcer les liens de fraternité entre la Guinée et le Mali, dans un contexte d’embargo imposé par la Cédéao, une délégation formée de plusieurs ministres maliens a été reçue, le lundi 17 janvier 2022, par le chef de la junte guinéenne, le Colonel Mamadi Doumbouya.
La délégation malienne conduite par Abdoulaye Diop, ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, a eu « des entretiens cordiaux et fructueux sur les questions d’intérêt commun » avec les autorités guinéennes.
Le deux pays qui sont dirigés par des gouvernements de transition, ont convenu « de continuer à partager leurs expériences respectives sur la transition au titre des avantages comparatifs et dans un esprit d’ouverture et de dialogue franc avec la communauté internationale ».
Le Mali et la Guinée « ont renouvelé l’esprit panafricaniste qui les a toujours animés pour l’intégration effective du continent et la défense de ses intérêts ».
Selon la présidence guinéenne, « les questions liées, entre autres, à la sécurité, à la circulation des personnes et des biens ainsi qu’au renforcement du partenariat stratégique durable ont fait l’objet d’échanges » entre la délégation malienne et les autorités guinéennes.
« Les relations entre la Guinée et le Mali sont excellentes. Les deux pays frères sont liés par l’histoire, la culture et la géographie », a déclaré le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Abdoulaye Diop.
Mohamed Sylla
Source: L’Aube