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Mali-Cedeao-Uemoa : Les conditions pour une sortie sont réunies

Les communautés économiques sont des instruments de marché de l’économie libérale sur lesquels il ne faut pas s’attendre à du miracle.

 

On connaissait le F CFA, monnaie décriée, par ses détracteurs qui évoquaient principalement, la privation des pays des deux espaces économiques CEMAC et UEMOA, par le Trésor Français d’une proportion importante des devises provenant de leurs exportations.

Depuis le 09 Janvier 2022, à travers les sanctions prises contre le Mali, les plus de 200 millions de populations de ces deux espaces communautaires savent désormais qu’on peut utiliser « leurs » monnaies pour les étouffer.

On connaissait la Banque Centrale qui vole au secours de l’économie, on ne connaissait pas la Banque Centrale qui asphyxie l’économie. Par cette décision historique, la BCEAO est entrée dans l’histoire monétaire du monde.

Si elle voit le jour dans les conditions actuelles, la future monnaie « ECO » de la CEDEAO, serait pire que le F CFA.

 

I – LE F CFA EST DEVENUE UNE « ARME DANGEREUSE ».

Dans l’émission « Eco d’ici, Eco d’ailleurs de RFI » du 30 décembre 2015, le Professeur Kako NUBUPKO, économiste a avancé le chiffre de 14 000 milliards le montant des stocks de devises des pays de la Zone Franc, détenus par le Trésor Français : 8 000 milliards pour la CEMAC et 6 000 milliards pour l’UEMOA.

Cette manne financière serait même prêtée aux mêmes pays avec intérêts.

Mais le combat des « Anti F CFA » n’intégrait pas jusqu’à maintenant la possibilité que la BCEAO elle-même puisse décider de « mettre à genou » un pays membre par le gel de ses avoirs auprès d’elle. De la sorte elle serait dans l’impossibilité d’effectuer des paiements à l’étranger, donc de pouvoir faire des importations nécessaires à son économie.

L’efficacité de cette sanction tient au fait que les « réformes des finances publiques » en cours dans l’espace UEMOA prévoient « l’unicité de compte » ou la centralisation des recettes de l’Etat à la Banque Centrale. Si le Mali est avancé dans la mise en œuvre de ces réformes, le pays risque d’être, très rapidement, en difficultés pour assurer le paiement régulier des salaires des fonctionnaires.

La leçon à retenir de la sanction « du gel des avoirs de l’Etat du Mali auprès de la Banque Centrale », est que tous les pays sont désormais exposés à cette « arme d’asphyxie financière », une sorte « d’arme de destruction massive ». Il suffit d’être en désaccord pour peu, avec le « fabricant du F CFA » pour subir cette sanction.

Plus que jamais la question de la « souveraineté monétaire » dans les pays de la Zone Franc revient avec plus d’acuité. Le F CFA est-il au crépuscule de sa vie ? « La meilleure manière d’abroger une mauvaise loi, c’est de l’appliquer correctement », Abraham LINCOLN, ancien Président des Etats Unis.

 

II – LA FUTURE « ECO » SERAIT AUSSI UNE « ARME DANGEREUSE ».

Reporté plusieurs fois, le lancement de la monnaie de la CEDEAO, la future « ECO » serait prévue pour être en circulation en 2025. C’est ce que nous avons appris dans l’émission « POLITICIA » de la Chaine de télévision panafricaine « AFRICA 24.

Dans la foulée des mesures de relance économique post-COVID, la CEDEAO a mis en place, sur financement de l’Agence française de développement » (AFD), le Projet « Vers une transition économique durable des Etats de la CEDEAO ».

Ce projet s’étend sur 10 ans allant du 28 juillet 2020 au 28 Juillet 2030 pour un montant de 50 400 000 EUR. La France serait ainsi au cœur du dispositif de la monnaie « ECO ».

Le Royaume du Maroc est candidat non seulement à l’entrée dans la CEDEAO, mais aussi à adhérer à l’ECO » et siéger au Conseil d’Administration. Dans une émission sur la Chaine de télévision Ivoirienne « BUSINESS 24 », d’éminents économistes et experts Ivoiriens ont débattu de cette candidature pour une adhésion à la CEDEAO.

Au final, la probabilité est forte que les pays de la CEDEAO n’aient pas le contrôle de la future monnaie « ECO » et qu’elle soit battue dans les mêmes conditions que le FCFA. Encore des Africains qui se mettent volontairement la chaine de l’esclavage au cou et à celui des générations futures.

 

III – L’OPPORTUNITE POUR LE MALI DE SORTIR DE LA CEDEAO ET DE L’UEMOA.

D’abord il est intéressant de rappeler que les relations entre les pays se font dans un cadre de « coopération bilatérale » et de « coopération multilatérale ».

Notre pays a posé les « jalons » de son développement économique et social à travers la coopération bilatérale. La coopération multilatérale connue sous le nom de Communauté économique sont des « communautés de marchés » destinées à l’écoulement, dans des conditions plus faciles, des marchandises et fabrications et industrielles.

En langue « Bamanan », un proverbe dit : « A force de jeter le crapaud pour bien l’éloigner, il tombe finalement dans l’humidité ». La hargne de sanctionner le Mali a fait que nos frères Présidents ont mis notre pays dans des conditions très favorables pour tourner définitivement le dos à ces deux communautés.

Ils ont poussé le Mali à la porte de sortie, croyant l’avoir sanctionné et il faut saisir le ballon au rebond pour plusieurs raisons :

 

Premièrement, notre continentalité semble faire le bonheur de nos frères et sœurs.

Nous avons la responsabilité d’épargner les générations futures à ce qui se passe depuis 2013 avec la CEDEAO.

Cette communauté de marchés dispose d’un « Protocole pour la bonne gouvernance ». Au lieu d’utiliser cette arme dans l’intérêt des peuples en empêchent les Dirigeants de « piller » les ressources de leurs pays, non, la CEDEAO soutient les Dirigeants « pilleurs », autorise des troisièmes mandants et met sous embargo toute population qui ose se soulever contre le Dirigeant « pilleur ». Quelle Protocole ?

 

Deuxièmement, la volonté clairement affichée de nous détruire avec « l’arme monétaire ». Inutile de parler de légalité, de légitimité, de disproportionnalité des sanctions contre le Mali. Les sanctions politiques visent à assommer, voire anéantir l’adversaire.

Quand une personne échappe à son tueur, que doit-elle faire ? Doit – elle revenir chez lui aux sons de chansons mielleuses pour qu’il l’achève définitivement ?

Non, à moins qu’elle soit la « Poule d’HITLER ». Il torture la poule tout en lui donnant des graines à picorer. Chaque fois qu’elle veut s’en fuir, il jette des graines, elle revient. La pauvre, dans l’espoir d’en picorer plus, finit par rendre l’âme.

 

Troisièmement, la coopération multilatérale, une fois de plus sont des « communautés de marchés ».

En plus de 45 années de communauté économique, quel bilan pourrait-on dresser ? Les échanges intracommunautaires n’ont jamais dépassé les 15 % Pour qui donc, le marché est donc organisé ?

La CEDEAO a même élaboré en Août 2006, un instrument « Politique et Mécanismes de la CEDEAO sur la réduction des risques et des catastrophes ». Quinze ans après sa mise en place quel est son bilan ? Nos populations meurent par dizaine chaque année, envahies par des inondations, des tornades et autres catastrophes.

Finalement les Communautés économiques africaines semblent utiliser leurs « marchés » pour lever des fonds auprès de grands pays riches. Pour quelle finalité ?

Il n y’a pas plus esclave que celui qui pense que son avenir est dans les mains des autres.  Il ne faut pas avoir peur de quitter ces communautés de marchés au profit de la coopération bilatérale. Nous y sommes depuis 45 ans, chacun peut établir son petit bilan.

 

Quatrièmement, notre pays a des expériences en matière « souveraineté monétaire ».

Par la loi N°62-54 A-N-R-M Portant réforme monétaire en République du Mali, publié au Journal Officiel N°120 Numéro Spécial du 30 Juin 1962, notre pays a bâti sa propre monnaie le « Franc Malien » et quitter le Franc CFA.

L’article 2 dispose que « Le franc malien équivaut à 3,0036 gramme d’or fin ».

Cette monnaie est disponible en coupures et en pièces. Ce n’est pas tous les jours, qu’on assiste à la création de monnaies. Nous avons la chance que des femmes et les hommes qui ont vu naitre le Franc Malien, assuré sa gestion du 1er Juillet 1962 jusqu’au retour dans la Zone Franc en 1984 sont encore là parmi lesquels, on cite :

 

  • Younouss TOURE, ancien Gouverneur de la Banque de la République du Mali, ancien Conseiller spécial du Gouverneur de la BECEAO, ancien premier de la 3ème République du Mali,
  • Drissa KEITA, Docteur en économie du développement, ancien Ministre du Développement industriel, ancien Secrétaire général de la CEAO. Il a particulièrement le retour du Mali dans la Zone franc, avec le Président Alassane OUATTARA, quand celui-ci était Gouverneur de la BCEAO.
  • Zoumana SACKO, PhD en économie, ancien Ministre de l’économie et des finances, ancien Premier ministre,
  • Docteur Boubacar Séga DIALLO, économiste monétariste, auteur de nombreux ouvrages sur la monnaie.
  • Docteur Bamou TOURE, économiste monétariste,
  • Diango SISSOKO, Economiste, spécialiste en commerce internationale, ancien premier ministre, il a aussi participé au retour du Mali dans la Zone franc.
  • Antoumani N’DIAYE, Economiste statisticien, ancien ministre des Sociétés et Entreprises d’Etat,
  • Docteur Lamine KEITA, ancien Directeur du Projet National pour l’analyse et l’évaluation des politiques économiques, auteur de nombreux ouvrages, et de nombreux articles sur le Franc Malien et le Franc CFA.

Avec de brillants jeunes économistes monétaristes et autres spécialistes, notre pays n’aurait certainement pas beaucoup de difficultés à remettre en circulation, cette monnaie aux caractéristiques techniques et financières avérées déjà disponibles.

 

En conclusion, il est très important de rappeler que les communautés économiques sont des instruments de l’économie libérale, sur lesquels, il ne faut pas s’attendre au miracle. C’est une illusion de croire qu’on est condamné en les quittant.

Ce sont les coopérations bilatérales qui ont toujours constitué le socle du développement des pays. Il est plus profitable de développer la « coopération bilatérale de bon voisinage » et de la « coopération bilatérale » avec d’autres pays que se lier pieds et mains dans des communautés qui nous apportent peu et qui nous humilient au gré des événements.

 

Certes, notre pays a eu le soutenu fraternel des populations Africaines et de nombreux pays. Mais « l’arbre ne doit pas cacher la forêt ». C’est utopique de croire que d’autres personnes viendront faire le bonheur des Maliens à leur place. Personne ne dira aux Maliens, partez vous souffrez. Non.

Il appartient à tous les peuples de prendre en mains leur destin. Dans la vie des personnes et des pays, il y a des situations qui ne se présentent pas fréquemment. Ce que les spécialistes en gestion appellent des « opportunités ». Quand on sait les saisir elles font le bonheur. Quand on ne les saisit pas, on risque d’en être malheureux et regretté toute sa vie.

Nous devons profiter de cette opportunité « d’avoir été mis à la porte de sortie de ces Communautés », pour les quitter définitivement et planifier notre développement dans le cadre de la coopération bilatérale.

Comme l’a dit le Président François Mitterrand « le courage consiste non pas à ne pas avoir peur, mais à dépasser sa peur ». Ayons du courage pour prendre notre destin en mains. /

 

Siné DIARRA

Expert-Comptable

Enseignant de Comptabilité de finances et d’Audit

Tel : 66 89 69 69 / 76 89 69 69.

Site : www.finauditsarl.com

 

Références bibliographiques

  1. Dictionnaire d’économie et de sciences sociales, édition 2014.
  2. Traité Révisé de la CEDEAO de Cotonou, le 24 Juillet 1993
  3. CEDEAO : « Protocole A/SP1/12/01 sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance Additionnel au Protocole Relatif au Mécanisme de Prévention, de Gestion, de Règlement des conflits, de Maintien de la Paix et de la Sécurité » du 21 décembre 2001 de Dakar.
  4. Département des Affaires Humanitaires (DAH) « Politique et Mécanismes de la CEDEAO sur la réduction des risques de catastrophes, Août 2006.
  5. Projet « Vers une transition économique durable des Etats de la CEDAO ».
  6. « Budget de la CEDEAO 2021
  7. GEMDEV et Université du Mali : Mali – France, Regards sur une histoire partagée » Dounia – Khartala, 2005. Chapitre 19 « Des cauris au Franc CFA » par Boubacar Séga DIALLO et Chapitre 20 « Le Franc Malien, fausses ruptures ou vraies continuités dans les relations franco-maliennes » Vincent Géronimi, Boubacar Séga Diallo et Lansina  Sidibé »
  8. Mamadou KOULIBALY Conférence du 17 Février 2017 à la chambre de commerce d’Abidjan « Sortir du franc CFA et créer une nouvelle monnaie ; principes et conditions.»
  9. Siné DIARRA : « L’après franc CFA ne s’improvise pas, cela se prépare » Business AFRICA N°146 Avril 2017.
  10. J « Principes d’économie moderne » 2èmeédition De Boeck Université, Nouveaux Horizon 2000.

Source: Mali Tribune

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