Née dans une famille mixte (musulmane et chrétienne), Maïmouna Hélène Diarra a perdu très tôt sa mère. Elevée par son oncle, avec l’assistance de ses tontons, sa grand-mère, elle dit avoir reçu une éducation normale sans se rendre compte de l’orphelinat. Admise au diplôme d’études fondamentales (DEF), en 1975, elle est orientée à l’Institut pédagogique national pour être enseignante. Elle rêvait plutôt de blouse rose pour devenir sage-femme, sauf qu’elle a échoué au concours d’entrée à l’Ecole secondaire de la santé (ESS).
Il lui restait en ce moment de donner une valeur à son DEF, en intégrant un établissement, où elle pouvait se rendre utile, son niveau en littérature étant très acceptable. Des aînés lui conseillèrent l’Institut national des arts pour apprendre la musique ou le dessin bâtiment.
Déjà fascinée par les pièces de théâtre du Groupe dramatique national lors de ses tournées à l’intérieur, Maïmouna Hélène optera finalement pour le théâtre.
A peine a-t-elle commencé les cours que feu Minanba Kéita, un dirigeant du Djoliba pour l’avoir connue à San, l’approchera pour qu’elle joue dans l’équipe féminine de basket-ball des Rouges de Bamako, avec les Pinpin, Adiza Maïga, Salamata Maïga, Seynabou Diop (l’ancienne ministre des Infrastructures et de l’Equipement). Elle aura passé deux ans 1975-1977 avec une présélection en équipe nationale.
Une carrière sportive écourtée par son arrestation. Pourquoi et comment ? Maïmouna Hélène Diarra explique : “C’est à la suite de la grève estudiantine dirigée par Boniface que j’ai été arrêtée au terrain d’entraînement du Djoliba parce que j’étais membre du comité UNEEM de l’INA. Nous avons été matés et maltraités pendant deux jours. A notre libération, je suis retournée à Ségou pour retrouver mes esprits. Pendant ce temps de réflexion, j’ai décidé de tourner dos au basket-ball, pour me consacrer à mes études. Surtout que pendant les vacances, je jouais avec le Groupe dramatique pour forger mon talent”.
Victime de la fermeture des classes, Maïmouna Hélène Diarra décroche son diplôme de l’INA en 1981, et d’emblée elle se fait découvrir par le public pendant au moins dix ans dans divers rôles : “Gouverneur de la Rosée”, “Bura Musso Djugu”, “Nabou Ndiaye”, “Bougougnery”, “Wari I et II”, “Féréké Gnagamibougou”, des pièces de théâtres français tournés à Paris, Antigone, EDIP, Salina.
Tournant
Son talent de comédienne confirmée suffit pour expliquer son saut dans le cinéma, dans des films comme : “Finyé”, “Finzan”, “Niamanto”, “Guimba le Tyran”, “La Genèse”, “Bamako”, “Kabala”, “Rapt à Bamako”, “Taffé Fangan”, “Sya”, “Faro”, “Moolaadé” de Sembene Ousmane.
Contre toute attente elle décide de quitter le théâtre pour l’ORTM en1990. Pourquoi ? Elle évoque des raisons personnelles sans autre détail. Son ministre de tutelle Diadié Dagnoko, qui devait émettre un avis sur sa demande de transfert au ministère de la Communication ne s’est pas rendu compte qu’il perdait un maillon important de l’art malien. Selon elle, il n’a pas cherché à arrêter le processus, le coup était déjà parti. En allant à l’ORTM, Maïmouna Hélène Diarra envisageait de faire la caméra, parce que cette denrée est rare dans la gent féminine. Mais le directeur lui conseilla la radio, compte tenu de ses expériences.
Assistante de presse et de réalisation à l’ORTM, elle animait des émissions à la radio, en plus des productions, des avis et communiqués, du journal en bambara. A la télé, elle animait aussi des émissions. C’est en 2015 qu’elle a fait valoir ses droits à la retraite. Que retient-elle de sa longue et riche carrière ? “Durant ma carrière, je n’ai connu que de bons souvenirs, parce que le théâtre me plaisait. C’est le traitement que le département faisait de nous qui décourageait. A l’intérieur du pays, nous avions mille (1 000 F CFA) comme frais de mission quel que soit le nombre de jours ou de spectacles. La seule explication, selon laquelle nous étions des fonctionnaires ne tenait pas debout. Cela a découragé beaucoup de comédiens, qui ont profité de la politique de retraite anticipée pour quitter le groupe dramatique”.
Que fait-elle de sa retraite ? Le repos est son quotidien, avec des visites chez ses parents. Pour demeurer dans l’art, Maïmouna Hélène Diarra a créé la nuit du comédien. Ce qui est un espace pour rendre hommage aux comédiens et artistes disparus, de décerner des diplômes de reconnaissance et d’encouragement aux comédiens en herbe.
Cependant, nous ne pouvions prendre congé de notre héroïne de la semaine sans lui poser la question de savoir comment elle réussit tous les rôles qu’elle interprète ? Son secret n’est autre que l’ambiance qui a toujours régné dans sa famille, l’observation de l’environnement, de l’entourage. Parce que la formation ne fait pas un bon comédien, elle inculque juste les B.A.ba. Le reste du temps, il faut être naturel, pour la simple raison qu’il est impossible de tricher en théâtre.
Regrette-t-elle le théâtre ? Non, affirme-t-elle ajoutant que si c’était à refaire elle choisira une fois de plus l’art, tout en rendant hommage à son professeur de nationalité grecque Arma Dreyfus.
Musulmane Maïmouna Hélène Diarra a effectué le pèlerinage à La Mecque en 2019. Ce qui nous a surpris, parce que nous avions toujours cru qu’elle était chrétienne. D’où notre question de comprendre si le pèlerinage dont elle parle s’est fait à Kita ? Elle nous avouera alors que son père était un musulman.
O. Roger Tél (00223) 63 88 24 23
Source: Aujourd’hui Mali