C’est à l’issue du conseil de ministres du 22 avril 2014 que le gouvernement du Mali a pris des mesures relatives à la libération des lits et servitudes de certains cours d’eau non flottables du district. Pour en savoir davantage sur cette vaste opération, nous nous sommes entretenus avec le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, Mahamadou Diarra. Les échanges avec l’artisan de cette mesure portent sur les motivations réelles du gouvernement et où en sommes-nous avec son application. Autant d’interrogations que notre interlocuteur a bien voulu répondre.
Pour un départ, ce sont les marigots traversant les Communes IV (Woyowayanko et Sourouncouba) et I (Banconi et Tigolé) qui sont concernés. La mesure de libération des servitudes et lits de ces marigots devrait commencer au cours de la 2e quinzaine du mois de mai.
Selon le ministre de tutelle, le paquet de décisions pris par le gouvernement lors de sa session du 22 avril 2014 est motivé essentiellement par le souci et la volonté de sécuriser et de préserver la vie et les biens des citoyens de Bamako, mais également partout ailleurs sur toute l’étendue du territoire national.
« Comme vous le savez, au cours de l’hivernage dernier, précisément en août 2013, Bamako et d’autres villes du Mali ont connu une grande inondation, laquelle a emporté des individus dont des enfants et des femmes, mais aussi a entraîné la perte des biens, meubles et immeubles. Des gens ont perdu leurs concessions, tous ceux qu’ils avaient à l’intérieur de leurs maisons, parfois jusqu’aux matelas », rappelle le ministre.
S’agissant du paquet de décisions du gouvernement, le ministre Diarra précise que cette disposition vise à rendre « plus sûres nos villes, de manière à mettre nos populations à l’abri du genre de drame déploré au cours de l’hivernage dernier à cause surtout de négligence ». Aux dires du ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, c’est « essentiellement ça, mais, il s’agit aussi de travailler à créer ou à récréer un cadre de vie décent par la normalisation des occupations. Regardez tout autour des familles de certains quartiers qui jouent sur ces cours d’eaux. C’est l’insalubrité qui est facteur de maladies, qui entraîne l’absence d’espaces de jeu pour les enfants ».
Pour ce qui est de la mise en application, Mahamadou Diarra assure que toutes les conditions sont réunies. « Qu’est-ce qui a pu être fait du 22 avril à nos jours ? D’abord la campagne de communication qui a commencé juste une semaine après la décision du gouvernement. C’est à ce titre que, lors du journal parlé du lundi qui a suivi, nous avons nous-même été l’invité de l’ORTM sur ce sujet. Depuis cette date, un ensemble d’activités de sensibilisation et de communication s’opère au quotidien. Les temps forts, il y en a eu. C’est la rencontre avec les populations des communes concernées par la première opération. Il s’agit des Communes IV et I, au cours de cette rencontre nous avons explicité le sens et l’orientation des décisions prises par le gouvernement », précise M. Diarra.
En termes de stratification de l’opération et de modalités de mise en œuvre de la libération, il y a, à en croire le ministre, une modalité qui touche, au moment où l’opération doit commencer, à l’intéressement des personnes concernées. Précisément, ceux qui devraient être indemnisés ou ceux qui devraient recevoir réparation des préjudices subis et le concours que l’Etat a décidé d’apporter à l’endroit des autres. « Cela a permis aux populations, à leurs représentants d’être dûment informés de l’ensemble de la situation, donc, des motifs et aussi des modalités de mise en œuvre des pratiques.
Et nous nous apercevons, surtout après la rencontre en Commune I, que la majorité des populations se montre très heureuse de soutenir une telle activité. Mais, il faut le dire franchement, la volonté de l’Etat d’aller jusqu’au bout de cette logique invite fortement les autres que nous sommes et que d’autres sont, à matérialiser ce paquet de décisions. Car, cela est une forte interpellation. Nous pouvons assurer que le portage que nous devons faire est essentiellement politique ».
Le rôle et missions des commissions
Pour matérialiser les ambitions des plus hautes autorités, le ministre fait remarquer qu’il y a déjà des sous-commissions qui travaillent sur des volets précis. En effet, il y a « un volet sensibilisation qui est porté par une sous-commission chargé de transmettre le message directement à l’endroit des personnes concernées par la libération. Celles qui sont en tout ou partie installées sur les servitudes. Je dis bien en tout ou partie parce qu’il y en a qui sont en tout dans les servitudes, il y en a qui sont partiellement dans les servitudes. Donc, le travail de cette commission, c’est d’aller dire à ces personnes comment la chose va se passer et ce qui est envisagé », souligne Mahamadou Diarra.
« Il y a une autre sous-commission qui travaille à faire l’inventaire et l’évaluation de la valeur des terres objet des occupations, selon qu’il s’agit des titres fonciers ou pas. Mais, la commission travaille aussi sur la valeur des réalisations effectuées sur les occupations (maison, jardinage, etc.) Ce travail a un coût et est important parce qu’il permet de déterminer le montant de ce qu’il faudrait engager en faveur des personnes concernées par la libération. En ce qui concerne les réalisations, ça va permettre, éventuellement, dans le cas où cela est admis par la loi, de savoir exactement qu’est-ce qui doit revenir à telle personne si son bâtiment était démoli. Cela qu’il y ait autorisation ou pas. Le travail de cette sous-commission que nous suivons au quotidien est important. Et il n’est pas loin d’être acheminé », précise le ministre.
Il ajoute : « Le troisième élément est une sous-commission qui travaille à l’identification précise des propriétaires des titres. Parce que l’identification nommément faite dans un rapport que nous avons, on connait les occupations, on a les noms de certaines personnes. Dans d’autres cas, on connait l’occupation, mais l’identification n’est pas faite. Il s’agit non seulement de faire l’identification mais surtout de déterminer la nature du titre. Est-ce que la personne est titulaire d’un titre simple, d’un litre provisoire ou il n’a pas de titre. Cette commission importante est présidée par le ministère des domaines des affaires foncières qui va donc statuer de l’exactitude et de la véracité des titres qui vont être présentés. Cette commission est aussi à pied-œuvre, nous pensons que son travail doit être acheminé d’ici à la fin de cette semaine ou en milieu de la semaine prochaine, selon un certain nombre d’aléas qui ne sont pas sous notre contrôle ».
Le coût de l’opération en question
Sur la question des investissements que cette opération va mobiliser, le ministre dit que dans un budget initial sur lequel des affinements ont été souhaités, le département était dans une proportion de 5 milliards et quelques de F CFA. « Donc plus de 5 milliards. Mais, sur la base de l’inspection du ministère de l’Administration territoriale confortée par un rapport du ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat, vérification faite, nous nous sommes aperçus qu’il y a des éléments qui n’étaient pas suffisamment précis. Ainsi, nous avons souhaité que la communication n’intègre pas ces montants-là et qu’on travaille à évaluer exactement les frais qui doivent aller en allocation des dommages intérêts, d’indemnisation et de ce coût d’appui aux populations. Egalement, en termes d’aménagement et de récurage de surcreusement », éclaire-t-il.
Le ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat évoque le bien-fondé de cette mesure qui permettra de réduire fortement les risques d’inondations et leurs conséquences dévastatrices. Le premier bienfait : « c’est la mise à l’abri des populations des inondations et de leurs conséquences. Autre bienfait, c’est la sécurisation et un plus grand confort de nos cadres de vie, donc de nos villes. Troisième élément que je voudrais ajouter de manière plus spécifique, c’est la protection des couches vulnérables. Surtout les femmes et les enfants. Il s’agit de les protéger de la peur pendant l’hivernage et dans le cadre de leurs activités. C’est aussi une meilleure façon de gérer nos villes à travers le schéma directeur. Enfin, cette opération de libération et d’aménagement des servitudes qui concerne, pour un départ, le district de Bamako s’étendra sur l’ensemble du territoire national ».
Alpha Mahamane Cissé
source:L’indicateur du renouveau