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Macina: pour avoir abattu 390 ânes 6 Nigérians devant le juge

Tout commence par une visite, dans le cercle de Ké-Macina, du ministre de l’Elevage et de la Pêche, Nango Dembélé. Le ministre, au cours de la visite qui a lieu le 16 avril 2016, rencontre les exploitants des cages flottantes d’aquaculture qui opèrent dans le village Kolongo, à 35 km du chef-lieu de cercle.

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Descente musclée

Un député du RPM, élu de la localité, vient apprendre au ministre Dembélé une étrange nouvelle : l’existence d’un centre d’abattage clandestin d’ânes à Kolongo. Le ministre prend note. Le même jour, il se rend sur les lieux censés abriter des abattages clandestins, accompagné de 8 véhicules 4/4 remplis de gendarmes et de journalistes, dont ceux de l’ORTM. A l’approche du présumé centre d’abattage, les forces de l’ordre bouclent toutes les voies d’accès. L’équipe ministérielle découvre dans le centre six personnes, dont un certain Cissé. Quand le ministre lui demande ce qui se fait en ce lieu, Cissé répond qu’on y abat des ânes. Le ministre, furieux, ordonne aux gendarmes de brûler les lieux et tout leur contenu, en particulier des carcasses et restes de viandes d’ânes abbatus. Un gendarme lui demande alors: « N’est-il pas préférable, monsieur le ministre, de solliciter une décision de justice brûler les lieux ? ».

Le ministre écarquille de grands yeux mais s’incline devant la sagesse de la mesure suggérée par le gendarme. Il demande aux responsables des services vétérinaires de  Kolongo de saisir la justice pour obtenir une autorisation d’incinération et, en attendant, de confisquer à titre conservatoire les carcasses d’ânes retrouvés.

Autorisation de brûler

Ainsi, dès le 23 avril, les services vétérinaires procèdent à la saisie des 390 carcasses d’ânes retrouvés au centre d’abattage. Puis, à la demande desdits services, le préfet de Macina, dans une correspondance en date du 27 avril 2016, demande au juge de paix à compétence étendue de Macina l’autorisation de destruire des produits jugés « impropres à la consommation ». Réagissant promptement à la demande, le juge Mahamane Abdoulaye, par une ordonnance en date du 28 avril 2016, autorise la destruction des produits concernés. Avant même que le juge ne prenne son ordonnance, le préfet avait mis en place, par décision n°025 du 25 avril, une commission de destruction des produits. Le 30 avril, vers 17 heures, la commission procède à la destruction par le feu des viandes et carcasses des 390 ânes abattus. Les membres de la commission sont: le juge de Macina, le sous-préfet de Kolongo,  le chef secteur vétérinaire de Macina (secrétaire de la commission), le maire de Kolongo, le médecin-chef de Macina, le président de l’Association des bouchers de Kolongo, le chef d’équipe des abattants d’ânes, le commandant de brigade de la gendarmerie de Macina, le chef de peloton de la garde nationale de Macina, le correspondant local de la presse. L’incinération a lieu en présence des villageois de Kolongo.

Imbroglio juridique

Nous avons rencontré Maître Mamadou Camara, l’avocat de l’entreprise  »Brenbros Ventures-SARL ». L’avocat nous apprend que  la société a été « régulièrement immatriculée » au registre de commerce le 11 janvier 2016 avec, pour objet, « l’exportation des peaux et cuirs ». Elle est dirigée par un Nigérian. Pour Me Camara, contrairement à ce que prétend le ministre Nango Dembelé, l’entreprise n’abattait pas clandestinement les ânes. « Mes clients ont commencé à abattre des ânes il tout juste deux mois. Ils l’ont fait quatre fois, en présence et sous le contrôle d’Oumarou Mounkoro, chef des services vétérinaires de Kolongo. ». Convoqué à Ségou par le directeur régional des services vétérinaires, le chef de l’entreprise a payé tous les droits d’abattage et a été autorisée à poursuivre son activité.

Pourquoi l’entreprise abattait-elle spécialement des ânes ? Maître Camara explique que les ânes abattus provenaient principalement de la Mauritanie et étaient abattus à Kolongo dans le centre  emménagé à cet effet. « Après l’abattage, la viande est saupoudrée de sel, conditionnée puis exportée au Nigéria. Pas un kilo n’est destiné au marché malien. D’ailleurs, l’entreprise n’a pas intérêt à vendre sa viande au Mali car ce produit est davantage prisé et beaucoup mieux  rémunéré au Nigéria. L’entreprise achète des ânes à 50.000 FCFA par tête (le prix d’un mouton) et tire des bénéfices substantiels du produit fini. Même les peaux d’ânes rapportent de l’argent: elles sont exportées en Italie où elles servent à fabriquer des sacs, des chaussures et des ceintures ». L’avocat déplore que l’on politise une affaire commerciale d’exploitation de viandes, de peaux et de cuirs. Surtout, souligne-t-il, « aucune loi malienne ne fait de l’âne un produit interdit ou une espèce animale protégée ». Maître Camara estime que ses clients sont tout bonnement victimes d’une injustice; il nous signale que lors de la saisie administrative des carcasses d’ânes, 70 ânes vivants gardés au centre d’abattage ont pris la fuite et n’ont plus été retrouvés. Une perte sèche supplémentaire d’au moins 20 millions de FCFA pour l’entreprise ‘Brenbros Ventures-SARL »  quand on se souvient que, selon l’avocat, « tout, dans l’âne, est vendable »!

L’infraction d’abattage clandestin ne résistant pas à l’analyse, 6 employés de l’entreprise trouvés sur les lieux ont été placés en détention pour « exercice illégal de la profession de boucher ». Au moment où nous mettions sous presse, les intéressés avaient été libérés.

Abdoulaye Koné

Source: Proces Verbal

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