Première cause d’abandon scolaire, la problématique du mariage d’enfants était, hier mercredi, au cœur d’une journée d’échanges, d’orientation, et de réflexion avec les parlementaires à l’Assemblée nationale. L’objectif de cette rencontre vise à mettre fin aux affres causées par cette pratique très ancrée dans notre société.
Coprésidée par le Directeur pays de Save the Children et le vice-président du réseau parlementaire pour la lutte contre la violence basée sur le genre, respectivement Amavi AKMAGBO et Belco BA, la rencontre a regroupé plusieurs acteurs de la défense des droits des enfants. La réunion a eu lieu dans la salle Mahamane Alassane HAIDARA de l’AN.
S’inscrivant dans le cadre de sa campagne « Aucun Enfant Oublié », la journée entend contribuer aux efforts nationaux visant à mettre fin à toutes les formes de Violences Basées sur le Genre « VBG » incluant le mariage précoce des enfants avec la promotion et la protection des droits des enfants au Mali, tout en rappelant aux députés l’engagement pris par le Mali pour l’élimination du mariage des enfants. Aussi, s’agissait-il de discuter sur le processus d’adoption de la loi VBG et de susciter l’adhésion des parlementaires maliens au rehaussement de l’âge du mariage des filles. En effet, signataire de tous les textes relatifs au respect des droits des enfants, le Mali doit harmoniser certaines lois et conventions qu’il a ratifiées dont l’âge du mariage.
Lors de l’ouverture des travaux de cette journée, le directeur pays de Save the Children pour le Mali rappelle le risque que le mariage d’enfants représente pour les filles. Pour lui, il est un risque, de façon générale, pour l’avenir des enfants parce que la pratique est la 1re cause d’abandon scolaire pour les filles. Ce qui, selon lui, contribue à renforcer les inégalités sociales dans le pays entre les filles et les garçons. Arguant ses propos, Amavi AKMAGBO a indiqué qu’en 2016, le nombre de filles dans les écoles a beaucoup baissé comparativement celui des garçons. Au regard des conséquences de la pratique, il estime que les questions du mariage d’enfants ne doivent pas être un tabou. Aussi, a-t-il interpellé, elles ne doivent pas être différées.
De même, pour le représentant du ministre de la Promotion de la femme, de l’enfant et de la famille, Youssouf BAGAYOKO, la pratique du mariage d’enfants au Mali, à l’instar des autres pays qui en sont victimes, a des conséquences incommensurables sur le plan éducationnel et socio- sanitaire. Elle retire la plupart des filles, qui en sont victimes, de l’école et les prive de la jouissance d’un droit fondamental d’épanouissement socio-économique non seulement pour elles-mêmes, mais aussi pour leurs familles et leurs communautés.
« En 2014, 60 % des 999 866 enfants de 7-12 ans qui ne sont pas encore scolarisés sont des filles. Selon l’Étude Démographique et de Santé (EDS) V de 2012/2013 au Mali, 20 % des filles maliennes sont mariées avant l’âge de 15 ans et 50 % avant l’âge de 18 ans. 37%t des femmes ont eu leur premier enfant avant l’âge de 18 ans avec son corolaire, sur le plan socio – sanitaire de fistule, prématurité dans le meilleur des cas, voire décès maternels précoces (15 % des décès maternels surviennent chez les adolescentes) », a-t-il rapporté.
Pour sa part, l’honorable Belco BA a indiqué que de janvier 2013 à juillet 2016, 6127 cas de VBG ont été déclarés au Mali. Ce chiffre n’est pas une représentation de la prévalence des VBG au Mali. Il s’agit ici des données des services fournis dans un nombre limité de localités au Mali. Sur ces cas, aucune décision de justice n’a été rendue à ce jour.
S’agissant du mariage des enfants, il a souligné que la mortalité maternelle liée à la grossesse et à l’accouchement est une cause importante de la mortalité chez les filles âgées de 15 à 19 ans, à travers le monde, et est responsable de 70 000 décès chaque année (Selon l’UNICEF 2015). À elles seules, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale abritent six des dix pays présentant le taux de prévalence le plus élevé, dont le Mali, a déploré le vice-président du réseau parlementaire pour la lutte contre la violence basée sur le genre. Avant de préciser : « Notre pays occupe la 5e place en ex æquo avec le Burkina et le Soudan du Sud, des pays qui ont des plus forts taux monde, dont un pourcentage de 52 % ».
Également, le partenariat mondial « Filles pas Épouses », dans son document « Mettre fin au mariage des enfants en Afrique », stipule que toutes les deux (2) secondes, une jeune fille est mariée, avant même d’avoir atteint la maturité physique ou émotionnelle requise pour devenir épouse ou mère, a martelé Belco BA.
Par Sikou BAH