D’ailleurs le rationnement du courant ouvre la brèche à un autre record, celui de la cherté du coût de la vie ! Un sachet d’eau à 500 F Cfa ! Dans certains quartiers de la capitale, la barre de glace est passée de 1 000 à 2 500 F Cfa. À prendre ou à laisser ! De longs fils devant des lieux de vente de glace… À Bamako, si par endroit le prix de glace reste inchangé, dans d’autres il a presque triplé. «J’ai acheté un sachet d’eau glacé à 300 F Cfa et c’était non négociable», témoigne un père de famille. A l’intérieur du pays, notamment à Gao et à Mopti, la situation est presque identique. Un sachet de glace peut y coûter jusqu’à 500 F Cfa. Et des fois, ce n’est que de l’eau avec un morceau de glace dedans.
Du jamais vu de mémoire de Bamakois. Comme d’habitude, le malheur de la majorité fait le bonheur d’une minorité qui peur s’offrir d’autres moyens pour produire de la glace, de l’eau fraîche… Autant en emporte les préceptes religieux qui font du mois de ramadan une période de ferveur, de solidarité, de collecte des bénédictions divines…
A quelque chose malheur est bon puisque cette surenchère permet au moins aux citadins comme les Bamakois de goûter au calvaire qui est celui des Maliens ruraux presque toute l’année. Même s’ils ne sont pas non plus épargnés par les hausses du ramadan. «Avec la glace à 500 ou 1000 F Cfa par endroit, c’est maintenant que les gens de Bamako comprennent enfin la vie. Sinon chez nous, à Koniakary (une ville et une commune du Mali, située à 65 km à l’est de Kayes) et Yélimané (Kayes), cela fait des dizaines d’années que nous visons cela», a réagi un Kayésien sur les réseaux sociaux.
Bien sûr que c’est abuser de l’infortune des consommateurs qui n’ont pas souvent le choix. C’est bien sûr de l’arnaque, du vol sans état d’âme… Comme le dénonce un client, «c’est honteux que des gens puissent profiter de cette malheureuse situation». Mais, à qui la faute ? Sans aucune volonté de les dédouaner pour le calvaire que nous semblons être condamnés à boire jusqu’à la lie, il est difficile de mettre cette surenchère sur le dos des autorités. Le Malien est devenu trop cupide et, pour lui, toutes les situations sont bonnes pour s’enrichir. Sinon en dehors des mesures sans effets et toujours martelés par le gouvernement, nous sommes convaincus que la solidarité est la meilleure solution à une grande partie des problèmes auxquels nous sommes confrontés, notamment à la hausse des prix pendant le ramadan.
Et déjà, les saintes écritures nous exhortent à la solidarité, à l’entraide au lieu de vouloir toujours tirer profit de la misère des autres. «Quiconque fait un bien fût-ce du poids d’un atome, le verra, et quiconque fait un mal fût-ce du poids d’un atome, le verra», nous rappellent les versets 7-8 de la Sourate «Az-Zalzalah» (La secousse). Et «Muslim» nous rappelle aussi, «celui qui soulage un nécessiteux, alors Allah le soulagera dans cette vie et dans l’au-delà». Sommes-nous alors dans un pays à majorité musulman ?
Nos marchands et opérateurs économiques voraces connaissent-ils tout cela ? Visiblement non, sinon les fidèles n’allaient pas autant souffrir. Si, oui, il y a quand même des gens consciencieux. «A cause du coût de l’électricité, j’avais souhaité augmenter le prix des jus (gingembre, tamarin, pain de singe, dablenin…) et du sachet de glace. Mais, mon mari s’y est fermement opposé. Pour lui, le ramadan n’est pas le meilleur moment pour augmenter les prix», nous a confié une vendeuse de jus et de glace. Et voilà la meilleure réaction qu’on attend de vrais musulmans, notamment pendant ce mois béni.
Comme l’écrit bien mon jeune frère et confrère Moussa Camara (conseiller à la communication de la BNDA), «entre le soleil qui darde ses rayons, l’EDM qui impose le noir et la pauvreté qui étreint, la foi est le seul paravent du croyant durant ce mois sacré du ramadan…» !
Gardons alors la foi ! La foi en Allah ; la foi en l’Homme ! La foi à toute épreuve en laissant ceux qui veulent faire de la détresse des autres les sources de fortune avec leur conscience. S’ils en ont bien sûr !
Moussa Bolly